BURHANUDDIN RABBANI ASSASSINÉ |
octobre 2011
Cette « mise à mort »
est passée quasi inaperçue en France. Et pour cause
! Lanalyser revient à admettre que la situation
empire en Afghanistan, quand nous prétendons le contraire
pour justifier le départ annoncé des forces occidentales. Revenant à Kaboul, il exerce comme professeur à luniversité et est lun des fondateurs du Jamiat Islami afghan, dont il deviendra le chef. Ce parti soppose fermement à lhégémonie communiste et sera lune des principales composantes de la résistance à loccupation soviétique à partir de décembre 1979. Le Jamiat Islami tire sa renommée
du prestige de lun de ses commandants, Ahmad Chah Massoud,
qui sera lui aussi assassiné par deux Arabes des réseaux
dOussama Ben Laden quelques jours avant le 11 septembre
2001. La vision intégriste de Rabbani
connaît-elle une évolution au cours des années
? Force est de reconnaître, quau-delà de sa
vision personnelle, il collabore avec tous ceux qui peuvent servir
son accession au pouvoir. Pendant la résistance des années
80, avec les Occidentaux, face aux Taliban, avec lIran
chiite, quil déteste pourtant, et même avec
la Russie. Au Badakhshan, province où se sont infiltrés les rebelles depuis deux ans, il jouit dun grand prestige. Cet été, il y a marqué quelques points supplémentaires en retournant plusieurs groupes armés. Cela a-t-il inquiété les Taliban qui ont ordonné sa mort ? Une autre piste, convergente, existe néanmoins. Depuis le renversement des Taliban, les Iraniens travaillent à infiltrer lAfghanistan. Ils trouvent chez les Hazaras, ethnie chiite, des clients fidèles. Mais ils ont aussi acheté nombre de Tadjiks, dont le principal candidat de lopposition aux dernières présidentielles, Abdullah Abdullah, et Rabbani lui-même. Du reste, ce dernier revenait dun nième voyage en Iran quand il a été tué. Les Iraniens, retors comme on le sait, ont aussi ouvert un canal auprès des Taliban. Depuis deux ans, ils les forment aux techniques de guérilla et leur fournissent des armes. Dans cet imbroglio, les Pakistanais cherchent aussi leurs intérêts. En guerre ouverte contre les Taliban qui posent des bombes sur leur territoire, pourtant alliés stratégiques des États-Unis, ils laissent agir les factions combattant les forces de lOTAN en Afghanistan quand ils ne les aident pas. De cette situation est née une alliance de fait entre lIran et le Pakistan, ces deux pays souhaitant le départ dAfghanistan des forces étrangères. Rabbani, devenu un allié essentiel de lIran, entretenait aussi des relations avec le Pakistan. Néanmoins, quand lobjectif de Téhéran et dIslamabad nest plus seulement de chasser les Occidentaux, mais de préparer leur prise de contrôle de lAfghanistan, ces deux capitales se retrouvent concurrentes. Rabbani, pris dans un conflit dintérêts, son assassinat peut avoir été commandité du Pakistan pour éliminer le gêneur quil était devenu pour Islamabad. Le résultat est là. La mort violente de Rabbani le sacralise en même temps quelle dope la haine des Tadjiks contre les Pachtouns. Le retour à la paix, ou même une réduction de la violence, paraissent de plus en plus improbables dans ce pays en guerre depuis plus de trente ans. |
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