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Après une tragédie comme celle du 13 novembre dernier, on sent l'humanité marchant d'un pas pressé vers un auto sacrifice collectif. Comment en sommes-nous arrivés là ? Certes il y a les manipulations des groupes jihadistes. Ils récupèrent frustrations et colères et, les aromatisant aux parfums d'une idéologie islamiste, en font une drogue qui va doper les candidats à une mort violente. Certes encore, il y a les injustices acceptées, voire engendrées par nos pays : l'inqualifiable traitement des Palestiniens par les Israéliens, la guerre sous le faux alibi des armes de destructions massive perpétrées en Irak, l'intervention nécessaire en Afghanistan mais suivie d'une occupation mal gérée. Il convient de ne
pas oublier l'abandon du peuple syrien depuis 2011. Nous avons alors permis à une révolte
pacifique de muter en guerre civile en laissant un pouvoir cynique
massacrer la population. Sur le terrain putride de la vengeance,
Daech, l'Etat Islamique, a plongé Cette fois, comme
en disant non à la guerre en Irak, comme en Hélas ! Seule, la France ne pouvait rien. Pire, aujourd'hui, résultat de son courage, elle a canalisé certaines haines contre elle. Celle du régime, furieux d'être prié de sortir du décor, et celle de Daech, qui sait son véritable ennemi l'opposition démocratique soutenue politiquement par Paris. Dans ce genre de situation, il existe deux choix. Celui de la lâcheté qui consiste, reculant, à abandonner les victimes. Le camp de l'horreur, nous le savons d'expérience, alors renforcé, resurgit un jour sur nos frontières. L'autre choix porte le nom de courage. Il consiste à faire face à l'adversaire. Avec un avantage : il est encore faible. En même temps, ce choix permettrait au peuple syrien de choisir librement ses dirigeants et de renouer avec la sérénité. Cette première victoire montrerait aux Arabes qu'il existe une troisième voie. Que le radicalisme des jihadistes n'est pas l'alternative à un régime dictatorial. Notre action fortifierait le jeune camp de la démocratie et de la modernité au moyen Orient. Du même coup, comme le révèle les attaques du 13 novembre, nous renforcerions notre sécurité en Europe, en France plus particulièrement. Cependant, il y a encore loin du but espéré. Car, d'Orient en Occident, il nous faut combattre nos propres démons. Nous pensons par exemple à notre complaisance à l'égard d'Israël. Sur ce plan, après les attentats du 13 novembre, le traitement de l'information a été révélateur. Des radios notaient les messages de soutien des pays européens, des États-Unis et d'Israël. Pas un mot de ceux des pays arabes. Mieux, plusieurs intervenants pontifiaient affirmant ces attaques sans relation avec la crise israélo-palestinienne. Comme si la salle du Bataclan, l'une des cibles des terroristes, n'avait pas été menacée à plusieurs reprises pour recevoir sur sa scène des organisations " israélo-sionistes " comme le Magav, la police des frontières de l'État hébreu. Comme si, pour les musulmans, le comportement d'Israël n'était pas la source de leur première colère. La première aussi instrumentalisée par les jihadistes. Nier l'évidence ne fait qu'exacerber cette colère. N'oublions pas les démons des Arabes : leur utilisation de la religion à des fins politiques et le recours aux pétro dollars pour répandre un islam archaïque ont permis aux jihadistes de prospérer. Enfin, rappelons-le, la manière dont parfois l'Occident, principalement les États-Unis, ont de leur côté eu recours aux jihadistes pour miner les forces d'un adversaire. Cette méthode se retourne contre nous. Pour faire un tour complet des démons du pôle Atlantique, convenons que nous avons aussi souvent, après un conflit, abandonné des pays à la misère : l'Afghanistan, à la fin des années 80, la Tunisie, au lendemain de la révolution, l'Irak, la Somalie, la Libye etc... Comme si seul l'aspect sécuritaire nous intéressait. La encore la logique politique nous rappelle à l'ordre. Souvenez-vous ! Tout a commencé en Afghanistan, quand les Américains ont appelé des extrémistes islamistes pour combattre les Soviétiques au cours des années 80. Dans les maquis, je les ai entendus*. Déjà, ils promettaient d'attaquer l'Europe. La France principalement. Ils nourrissaient l'espoir imbécile de nous convertir par la force à leur islam. Les Afghans les écoutaient, sidérés. À l'époque, j'ai publié plusieurs articles pour dénoncer la menace. Ils m'ont valu des désaveux. Les Américains, coupables de cette dangereuse opération, ont laissé ces gens prospérer librement après la chute du régime communiste. Cette engeance a gangrené le pays, puis le Pakistan. Aujourd'hui la moitié du monde arabe. Par chance, en attaquant à Paris, en janvier et en novembre, comme en Irak ou en Syrie, les jihadistes ont montré qu'ils ne faisaient pas de distinction. Ils tirent tous azimuts. Ils s'en prennent aux musulmans au même titre qu'à tous les autres passants ou spectateurs, de toutes confessions, de toutes catégories. Ce comportement fait des musulmans raisonnables, la majorité d'entre eux, nos alliés naturels. Or c'est parmi eux, se fondant dans la masse, que les terroristes cherchent à se cacher pour préparer leurs forfaits. La tentation serait de les suspecter collectivement. Pourtant, ils se sentent victimes. Aussi, si nous avons la force morale de résister à cette tentation, nous ferons de ces musulmans raisonnables des soutiens, comme une multitude d'agents prêts à nous informer. Agissant pour éviter le pire pour eux, ils serviront du même coup les intérêts de la nation toute entière. Cette méthode déplaira à tous les extrémistes. Les jihadistes, bien sûr, mais aussi les radicaux d'extrême droite, les radicaux sionistes ou les radicaux d'extrême gauche, parce qu'elle est efficace contre ce qu'ils souhaitent : toujours plus de guerre. Certes, il faut répondre au feu par le feu. Mais dans cette guerre d'une forme inhabituelle en Europe, il faut aussi mobiliser l'intelligence. Pour triompher contre l'ignorance et la barbarie. Alain Chevalérias * Alain Chevalérias a effectué 5 séjours de 3 à 8 mois en tant que journaliste dans les maquis afghans dans les années 80. |
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