Fermeture
de Guantanamo

 UN BIEN POUR UN MAL

février 2009

Le 22 janvier 2009, deux jours après son investiture, Barack Obama a ordonné la fermeture de la prison de Guantanamo d’ici un an. Certes, il s’est donné le temps de réflexion mais il faut craindre que le bien ne devienne un mal.

Même un innocent, après le régime subi plusieurs années à Guantanamo, risque d’en sortir plein de colère et assoiffé de vengeance. Que dire des plus convaincus de leur « cause », cadres d’Al-Qaïda et militants endurcis ! Une fois dehors, tous les internés représentent un danger potentiel pour les États-Unis, en particulier, et nos sociétés en général.

Le princeTurki al Fayçal

Cette réalité n’a pas échappé à certains dirigeants et aux services de sécurité. En Arabie Saoudite, sous l’égide du prince Turki Al-Fayçal (Faysal), un programme dit de réhabilitation a été mis en oeuvre depuis deux ans.

Le choix de Turki n’a rien d’innocent. Ancien patron des services de renseignement saoudiens, de 1977 à 2001, sous la férule des Américains il a canalisé les contingents islamistes des pays arabes vers l’Afghanistan, alors sous occupation soviétique, dans les années 80. Il entretenait aussi une relation suivie avec Oussama Ben Laden, à la famille duquel il était très lié. En d’autres termes, il est sensé connaître le « matériel humain » sur lequel il travaille.

Au Yémen, où l’on attend 94 ressortissants de ce pays, aujourd’hui retenus à Guantanamo, un autre programme est mis sur pied.

Problème, d’anciens prisonniers, libérés et passés par le programme saoudien sont retournés dans les maquis islamistes.

Le 24 janvier 2009, « Al-Arabiya », télévision arabe satellitaire, diffusait une cassette vidéo du chef d’Al-Qaïda au Yémen, Nasser Abdelkarim Al-Wéhéchi (ou Wahachi), Abou Bassir de son nom de guerre. Il fait partie d’un groupe de 23 hommes qui se sont enfuis de la prison de Sanaa (Yémen) en février 2006. Cela devrait déjà inspirer la plus grande des méfiances, quant à l’efficacité du système carcéral yéménite, auquel les Américains veulent confier des détenus de Guantanamo.

Ce n’est pas tout. Parmi les hommes figurant aux côtés d’Al Wéhéchi, on notait la présence de Saïd Ali Al-Chehri et de Mohammad Al-Aoufi. Tous les deux saoudiens, ils ont séjourné à Guantanamo portant respectivement les numéros matricules 372 et 333. Remis à l’Arabie Saoudite par les États-Unis, en cours de « réhabilitation » ils se sont échappés pour rejoindre les maquis yéménites et reprendre le « jihad ».

Ces deux exemples ne relèvent pas de l’exception. D’après le Pentagone (1), confronté à ses propres erreurs, sur un demi millier de prisonniers de Guantanamo libérés depuis 2002, 71 sont soupçonnés d’avoir réintégré des structures qualifiées de terroristes. Pour 18 d’entre eux, la preuve a été établie sur la base d’empreintes et de photographies. Plus grave, le taux de récidive des anciens prisonniers, passé de 7% à 11% au cours des derniers mois, apparaît en croissance (2).

Le système ultra punitif de Guantanamo était une erreur. Associée à des programmes de réhabilitation à l’efficacité douteuse, la libération sans précautions suffisantes des détenus risque d’en être une seconde. Barack Obama est confronté à une lourde responsabilité.

 

Notes


(1) La Défense américaine.
(2) Dépêche Reuters du 13 janvier 2009.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

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