L’IRAN ENTRE DEUX EAUX

février 2014

L’Iran est un pays complexe, qui se dérobe à une analyse conduite selon des catégories occidentales.

Pour comprendre il faut se pénétrer de l’imaginaire iranien. Ce pays et son peuple se perçoivent comme les héritiers de l’empire perse. L’empire des Achéménides qui, né au VIe siècle avant Jésus-Christ, finit avec les Sassanides au VIIe siècle de l’ère chrétienne, sous les coups de boutoirs des Arabes et de l’islam.

Tout est dans la manière de concrétiser le rêve de la résurrection de l’empire défunt. Le shah, Reza Pahlavi (1919-1980), fraternisait avec l’Occident et s’offrait à lui comme gendarme du Moyen-Orient. Pour avancer ses pions, l’imam Khomeiny jouait lui des divisions de l’Occident, entre l’Amérique et l’Europe, entre États européens. Président, Mahmoud Ahmadinejad a préféré la confrontation intransigeante, tournant le dos à l’art subtil des ruses propre à la politique irano-persane.

À sa méthode, la main de fer nue et brutale, succède celle d’une poigne, plus ferme peut-être encore, mais gantée de velours, avec le nouvel élu, Hassan Rohani.

Celui-ci est d’abord pragmatique. Les années d’hostilités diplomatiques avec l’Occident ont coupé l’Iran des avancées technologiques et des investisseurs. Pire, déclenchées plus récemment, les sanctions économiques ont réduit ses capacités d’exportation de pétrole et de gaz quand le pays en détient d’énormes réserves.

Il fallait renouer avec l’Occident et, pour cela, cesser d’agiter le chiffon rouge de l’arme nucléaire dont Ahmadinejad faisait usage sans aucune subtilité. Depuis novembre dernier, Rohani a fait le nécessaire dans ce sens. Mais a-t-il pour autant renoncé aux visées impériales de son peuple ? Certainement pas !

Or, celles-ci reposent sur trois piliers : la religion chiite, la culture persane et, pour toucher les Arabes au coeur afin de les rallier, l’offensive contre Israël au nom de la justice. Inutile de préciser que, sur ce plan, les excès de la politique du gouvernement israélien servent on ne peut mieux la stratégie iranienne.
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Si Rohani accepte des concessions sur les aspects secondaires, à ses yeux le nucléaire militaire par exemple, il reste ferme sur l’essentiel : les trois piliers de l’impérialisme iranien. Or, la Syrie est devenue la clé de voûte de cette construction.

Dans ce cadre, l’art de la ruse, la ficelle fût-elle un peu grosse, est pratiqué à haute dose pour sauver le régime de Damas, réputé chiite par opportunisme. Au Forum de Davos ( Forum de leaders politiques et d’hommes d’affaires), fin janvier, le ministre des Affaires étrangères iranien, Javad Zarif, a affirmé que l’Iran « n’envoie pas de gens en Syrie ».

Tout le monde le sait pourtant. On compte aux côtés de l’armée de Bachar Al-Assad des membres des Pasdaran, des hommes des services de renseignements iraniens et des combattants du Hezbollah libanais financé et équipé par Téhéran. En fait, les propos de Zarif tiennent lieu de message. Il signignifient : « Nous ne retirerons pas nos forces de Syrie ».

Difficile à comprendre pour un Occident toujours prêt à abandonner au présent ce qu’il avait entrepris hier, comme en Irak ou en Afghanistan. Mais derrière son apparence de mollesse orientale, l’Iran a des déterminations d’une force qui nous surprend.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
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