EN LIBYE |
juin 2011
Le 31 mai 2011, la presse française publiait
des informations contradictoires sur les négociations
en cours entre Kadhafi et Jacob Zuma, Président sud-africain
chargé de mission par lUnion africaine. On lisait
dans « Métro » : « Kadhafi
prêt à un cessez-le-feu, selon Zuma »,
quand « LExpress » proclamait : «
Pas de progrès lors des discussions de Jacob Zuma
». En fait, dès le lendemain du déclenchement
des hostilités, il y a bientôt trois mois, Kadhafi
a accepté un cessez-le-feu. Mais, comme la rappelé
Zuma devant la presse à Tripoli, il veut aussi la fin
des bombardements de lOTAN. Or, le commandement des forces
alliées refuse dy mettre un terme. Ce que veut, mais ne dit pas le commandement de lOTAN, cest une reddition de Kadhafi, cest à dire sa soumission totale. Or, il y a là un problème car ce cas de figure nest pas envisagé dans la résolution 1973 (1). Cette dernière, pour reprendre ses termes, « exige un cessez-le-feu immédiat et la cessation totale des violences et de toutes les attaques et exactions contre la population civile » pour mettre fin à lintervention des puissances étrangères, mandatées par les Nations Unies. Pour Kadhafi, cessez-le-feu veut dire cessation des combats des deux côtés. Comment, dun mot, lui reprocher une interprétation qui remonte à laube des temps ? Ce décalage entre le texte de la résolution et la manière que les puissances attaquantes ont de linterpréter se remarque sur un autre point. La résolution 1973 appelle en effet, plus particulièrement, à lapplication du paragraphe 9 de la résolution 1970, votée en février. Or celle-ci dit : « que tous les États Membres (des Nations Unies) doivent prendre immédiatement les mesures nécessaires pour empêcher (...) la mise à disposition de mercenaires armés venant ou non de leur territoire » à la « Jamahiriya arabe libyenne », en dautres termes lEtat libyen. Par ailleurs, la résolution 1973 exclut « le déploiement dune force doccupation étrangère sous quelque forme que ce soit et sur nimporte quelle partie du territoire libyen ». Or, le 29 mai, « Al-Jazeera », la chaîne de télévision financée par le Qatar, filmait par hasard un groupe de six occidentaux en tenue de combat, dont cinq armés, sur la ligne de front de Misrata (2), du côté rebelle. Sagit-il de soldats de forces spéciales en mission pour la France, plus probablement la Grande-Bretagne, pour diriger les tirs des avions de lOTAN ? La rumeur se fait insistante du positionnement de telles troupes sur le sol libyen. Il pourrait aussi sagir de mercenaires envoyés en mission pour soutenir la rébellion contre Kadhafi. Sur ce plan, nous avons des documents prouvant que des offres ont été faites par la rébellion à danciens militaires occidentaux. Preuve quil y a du feu à lorigine de la fumée, le Français Pierre Marziali, tué dans des conditions non élucidées, le 11 mai à Benghazi sur un barrage de la rébellion libyenne, était un fournisseur de mercenaires. Il dirigeait la Secopex, une société se livrant à cette activité et ayant pignon sur rue à Carcassonne. Il avait servi au 3ème RPIMa (3ème Régiment de Parachutistes dInfanterie de Marine) dont il était sorti adjudant. On se doute que Marziali et ses trois compagnons, pour leur part un moment arrêtés, nétaient pas en Libye pour des raisons purement touristiques. En résumé, dune part les puissances occidentales, la France au premier rang, ne respectent pas la résolution 1973 quils ont fait voter, en refusant le cessez-le-feu accepté par Kadhafi. Dautre part, ils violent la résolution 1970, laissant des mercenaires intervenir en Libye, ou la résolution 1973, en déployant des forces terrestres, fût-ce en petit nombre, dans le pays. Si nous comprenons la hâte des Occidentaux et de pays arabes comme le Qatar de se débarrasser dun homme responsable datrocités multiples, nous voyons dans lapproche quils empruntent une dangereuse dérive du point de vue du droit international. Faut-il le rappeler, la fin ne justifie pas les moyens. À croire le contraire, lon réduit à néant les fondements du droit et lon suscite le retour à la barbarie originelle. Kadhafi, comme Saddam Hussein, comme Oussama Ben Laden doit être traité selon les règles. Ne respectant pas ces dernières, cest à nous mêmes que nous causons le plus grand tort. Alain Chevalérias (1) La résolution 1973 autorisant
lattaque des forces loyales à Kadhafi a été
votée le 17 mars 2011. Loffensive a commencé
le 19 mars. |
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