DE RENSEIGNEMENT... " Par Patrice Bougrain-Dubourg |
novembre 2007
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En rendant hommage au passionnant article du général Masson paru dans le bulletin de l'AASSDN (1) et compte tenu des articles ayant paru dans la revue " Défense ", qu'il soit permis de compléter ces exposés scientifiques en fonction d'expériences vécues en temps de guerre. D'abord comme modeste Honorable Correspondant, puis en témoin de direction en tête de la hiérarchie et de l'exploitation du renseignement en tant que secrétaire de la Commission de la Défense Nationale. Certes, les données de base avec 40 ans d'écart sont bien différentes puisque nous avons gagné la guerre dans la bataille nazie et que nous avons vécu une accalmie pendant la guerre froide sur le " front " soviétique. Néanmoins, certaines constantes demeurent dans le renseignement. Ainsi, si nous n'avons pas les moyens budgétaires suffisants pour doter notre armée du matériel le plus performant, nous devrions privilégier nos services de renseignements avant même l'armement atomique ou les porte-avions. Confrontés aux autres
armées, amies ou ennemies, le renseignement de qualité
pèse d'un poids décisif, mais il semble que nos
services soient contaminés par le mal du siècle,
que l'on pourrait appeler " l'ENA", qui sait tout et
fait trop confiance à la technologie en oubliant l'importance
de l'homme. Les Américains, qui sont convaincus d'être
les plus forts en tout, basent leurs renseignements sur la suprématie
incontournable du matériel : puisqu'ils voient tout et
entendent tout, ils ne peuvent pas se tromper pensent-ils. Résultat,
ils enchaînent les échecs. Rappelons le Viêt-Nam
et la Somalie, plus récemment l'Irak et l'Afghanistan
où leurs services de renseignements ne parviennent pas
à venir à bout des Talibans. La France, sans le matériel d'écoute dont disposaient les Américains et avec ses modestes moyens, prévint pourtant l'Amérique du danger, y compris au cours d'échanges de Président à Président. Mais l'Amérique, pleine d'assurance, n'avait que faire de l'avis des petits Français. Leurs énarques du cru imposèrent leurs vues utopiques et détruisirent la monarchie iranienne sans penser que cela conduisait à la disparition de l'édifice dont ils avaient le contrôle. Leur échec s'explique bien par la supériorité supposée de la machine sur l'homme. Actuellement, l'Amérique croit génial de nous chasser de Djibouti. Elle va y réussir... Mais quid du kat (2), du Yémen et de l'Ethiopie entre autres ? Bien sûr, l'Amérique réussit par exemple en Allemagne et tout dernièrement en France en y installant sa domination grâce au dieu Dollar, imposant les moeurs américaines en matière de mode de vie, de pensée, d'habillement ou d'alimentation. C'est en fait le triomphe du " lobby " israélien qui contrôle l'Amérique permettant à l'Etat hébreux d'anéantir la Palestine avec des chars, des bombes et des mines américaines. Pour revenir à nos services français, nous devons éviter de copier l'exemple américain quand, en Europe, nous avons sous nos yeux l'exemple britannique qui forme ses agents en fonction de la spécificité de leurs régions de travail. Ainsi, pour chaque pays est nommé un officier traitant parlant la langue locale, familier des coutumes et contrôlant deux sortes d'agents : les " agents dormants ", qui n'ont aucune activité liée au renseignement mais reste en réserve en cas de crise, et les " informateurs actifs ", rattachés au réseau des technocrates et des machines. L'officier traitant doit assurer le contact avec toute personne allant ou revenant de son secteur géographique et y suivre l'évolution de toute entreprise sensible. Prenons l'exemple d'un fait vécu durant l'occupation. Londres en 1943 envoyait câbles sur câbles pour que lui soit adressé le plus de renseignements possibles concernant la ficelle utilisée sur les moissonneuses-lieuses. A force d'envoyer des hommes au front, l'Allemagne se trouvait en effet démunie d'agriculteurs pour assurer les moissons et manquait donc de nourriture pour alimenter les armées. Afin de palier à ce manque, elle leur substituait l'utilisation massive de moissonneuses. Or, ces dernières manquant de ficelle pour lier les bottes, l'effort de guerre s'en voyait entravé. L'affaire peut paraître
comique, mais elle prit une telle importance qu'Hitler ordonna
l'arrestation des plus grands chimistes européens des
territoires occupés et les fit enfermer dans un château
de la Forêt Noire sous bonne garde SS. Là, ils reçurent
pour mission d'inventer un produit de remplacement à la
ficelle. Ils avaient trois mois pour trouver une solution sinon,
les informa l'Ober SS, ils seraient fusillés. Les quinze chercheurs délibérèrent. Les Allemands voulaient refuser de travailler. Le Polonais estimait au contraire qu'il fallait chercher. Mon ingénieur alsacien proposa de trouver une solution mais avec des produits de base introuvables pour l'Allemagne. L'unanimité s'étant ainsi faite, après trois mois de vie de château pendant lesquels les SS satisfirent tous leurs souhaits, les chimistes annoncèrent à l'Ober SS avoir trouvé la ficelle de remplacement. Congratulations suivies du retour pour chacun dans son foyer. Mon ami ingénieur, sur mes conseils, n'attendit pas et prit le maquis. Il n'eut qu'à s'en féliciter car, deux mois après, les composantes nécessaires étant introuvables, le produit de substitution fut impossible à fabriquer et les SS tentèrent d'arrêter à nouveau les chimistes. Ceci pour rappeler qu'en matière de renseignement tous les domaines présentent un intérêt. Autre exemple dans un domaine stratégique : lorsque le mur de Berlin a été détruit, les services soviétiques, pendant le trimestre qui suivit, parurent désorientés. Ils espéraient un soutien des puissances occidentales. Celles-ci les boudèrent. Ces trois mois d'attentisme des Occidentaux permirent aux Soviétiques de se ressaisir et d'obtenir de l'Est le soutien que l'Ouest ne leur apportait pas. Maintenant que les services se sont réanimés et rajeunis, ils ont retrouvé leur agressivité contre l'Ouest, forts de leurs collaborations avec la Chine, l'Inde et les pays du Tiers monde. Les services de renseignements occidentaux n'ont pas su éviter à nos Etats cette nouvelle situation de déséquilibre. Quant à Vladimir Poutine, il a réagi avec les hommes dont il disposait dans toutes les couches de la société et constaté que c'était ses services de renseignements qui étaient restés les plus solides et devaient bénéficier de la priorité des ressources de l'Etat. Madame Alliot-Marie avait compris le danger mais qu'en est-il de son successeur ? Saura-t-il faire admettre à nos ronds de cuir de l'état-major que la force de notre armée dépend de la qualité du renseignement ? Qu'il faut par conséquent réorganiser les services qui le procurent, y compris et surtout la chaîne de commandement ? Le nouveau ministre aura-t-il le courage du combattant de l'ombre pour mener à bien ce qui doit être la première arme de notre armée ? Les Chinois, les Russes, les
Anglais, les structures islamiques sont des champions en matière
de renseignement, grâce à l'excellence de l'implantation
de leurs agents dans le monde. Sans oublier le mouvement "mondialiste",
avec Al Gore et la Trilatérale, dont le programme prône
la désintégration de tous les États en profitant
de la confusion, pour mettre à leur place un gouvernement
mondial. Ce serait aussi une lâcheté de taire l'existence
des capacités de renseignement d'un certain pouvoir juif. L'erreur de l'Allemagne sous Hitler a été de croire qu'elle pouvait se passer de la puissance juive. Au début, le Nazisme dut son succès aux persécutions contre les Juifs. Mais, très vite, les élites de l'Allemagne furent décapités, perdant au moins 50% de leur efficacité en raison de la disparition de leurs meilleurs mathématiciens et chercheurs. Hitler s'en est-il rendu compte ? Toutes les semaines, il avait un entretien avec le professeur Mittelthauser, le plus grand savant du monde en ce qui concerne, entre autres, les ersatz de matières grasses et les substituts de pneumatiques en buna (3). Le professeur était devenu un familier d'Hitler, voire un ami écouté. En 1943, Himmler, rendant visite à Hitler, lui remit un dossier prouvant que le professeur Mittelthauser était juif. Hitler consulta le dossier puis, se tournant vers la cheminée de son bureau, le jeta dans le feu en disant à Himmler: " Le chancelier du Reich sait qui est un bon ou un mauvais citoyen allemand. Le professeur est un bon Allemand ". Himmler se précipita aussitôt dans le bureau du professeur pour lui raconter l'évènement. Il ajouta de l'appeler si le professeur, ou un membre de sa famille, avait le moindre ennui. Le professeur poursuivit ses entretiens hebdomadaires avec le Führer sans que, de part et d'autre, la moindre allusion ne soit faite à propos de la judaïté de Mittelthauser. Pour la petite histoire, à la fin de la guerre, les troupes spéciales américaines se saisirent du professeur qui fut envoyé aussitôt en Amérique dans une ravissante propriété où il fut prié de continuer à travailler pour les Américains. Sept ans plus tard, à la suite d'une demande du général De Gaulle et en raison du souhait du chancelier Adenauer, le professeur fut transféré en France, au départ en résidence surveillée dans sa villa de la Côte d'Azur, à Antibes. Deux ou trois ans plus tard, le gouvernement allemand le nomma sénateur conseil auprès de son gouvernement et il rejoignit Berlin. C'est alors que je fis sa connaissance, qu'il devint mon ami et qu'il me confia ce qui précède. Plus tard, j'ai organisé avec lui un voyage d'études sur les questions de traitement du pétrole avec Petromine (4) en Arabie Saoudite. Je vois là un bel exemple
de survie mais aussi de mobilité. En conclusion, le renseignement est les yeux du gouvernement et de l'armée. Il est capital et domine tout. Si un renseignement obtenu grâce aux machines est utile, il reste insuffisant si sur place il n'y a pas le support humain. Il y a danger à s'abandonner aux énarques ou assimilés, comme en Amérique, car ils savent tout sauf écouter l'homme et le bon sens.
(1) ASSDN : Amicale des Anciens des Services
Spéciaux de la Défense Nationale. |
www.recherches-sur-le-terrorisme.com |