RÉSISTANCE & TERRORISME

mars 2006

 Un lecteur nous a adressé le texte d'une conférence prononcée par l'Amiral Paul Auphan, nous invitant à ne pas " en rester à la distinction officielle légitime entre terrorisme et lutte contre l'occupation étrangère. " Ce lecteur faisait référence à un article écrit par nous dans le journal " L'Homme nouveau. "

Nous disions : " La résistance désigne une opposition à l'occupation étrangère. Elle peut-être non violente, comme autrefois en Inde contre les Anglais, ou armée, comme en France pendant la Deuxième guerre mondiale. Le terrorisme, par contre, est une méthode de combat qui prend pour cible principale la population civile. Cette tactique peut aussi bien servir dans un contexte de résistance, qu'au cours d'attaques contre un pouvoir légitime, comme Action Directe en France dans les années 80."

Le propos pouvait paraître lapidaire. Il n'en exprimait pas moins notre pensée. Néanmoins, répondant à la suggestion de notre correspondant, nous avons repris les passages du texte de l'Amiral Auphan, à nos yeux les plus en rapport avec le sujet, pour ensuite les commenter.

Allocution de l'Amiral Auphan, au Congrès de Lausanne,
(31 mars au 2 avril 1967) *
 

 

" Je vais vous parler de la guerre... tout en m'appuyant sur les constantes de la pensée chrétienne... "

Parmi les trois conditions posées par Saint Thomas d'Aquin, la première : " la guerre doit être déclarée par un État souverain qualifié. " Ce qui, estime l'amiral Auphan, " exclurait aujourd'hui sans doute celles que mènent des gouvernements clandestins ou des noyaux de conspirateurs en exil. "

" Il y avait en 1914 un document international fondamental sur la manière de faire la guerre : c'étaient les conventions de La Hayes (1899-1907)... En vertu de cet accord souscrit par toutes les nations civilisées, les milices n'étaient tolérées à côté des armées régulières que si elles avaient, comme elles, un " signe distinctif reconnaissable à distance " et " portaient ostensiblement les armes. " Ce qui éliminait les combattants sans uniforme, comme on se plait à dire aujourd'hui, et prohibait d'avance les assassinats commis au temps de l'occupation dans le métro ou dans la rue, par un passant apparemment inoffensif qui tire tout à coup un pistolet de sa poche. "

" L'article 26 de la convention de 1899 obligeait le commandement (en dehors évidemment des zones de front) à n'entreprendre le bombardement d'une cité (il s'agissait alors de bombardements au canon) qu'après en avoir prévenu les autorités locales. "

" Deux techniques nouvelles, si je puis dire, ont profondément altéré l'esprit des combats et des combattants : d'une part la guerre subversive, d'autre part le bombardement systématique des non combattants... "

" En apparence moins massivement sanglante, la guerre subversive est plus perverse que les bombardements terroristes car elle dégrade (je le répète) les vertus de loyauté, de confiance réciproque, de franchise..."

* Actes du Congrès de Lausanne III, "Politique et Loi Naturelle, " les 31 mars 1er et 2 avril 1967. Communication de l'Amiral Paul Auphan : " La guerre et le droit naturel. "

 

 

 

 

 QUI EST L'AMIRAL AUPHAN ?

L'amiral Gabriel Paul Auphan était directeur de la marine marchande en juillet 1940. Il est nommé chef d'état-major de des forces maritimes en 1941, puis Secrétaire d'État aux marines marchande et de guerre sous Vichy. Il rompt avec Laval en novembre 1942. Condamné aux travaux forcés à perpétuité en 1946, on lui inflige une peine de principe en 1955 quand il se rend.

 NOTRE COMMENTAIRE


L'Amiral Auphan tend, dans son allocution à refuser la notion de résistance qu'il qualifie de " gouvernements clandestins ou de noyaux de conspirateurs en exil. " Nous considérons pour notre part la résistance à l'occupation étrangère un " droit naturel " du reste reconnu par les Nations unies.

Par contre, la résistance doit s'inscrire dans le respect de règles d'humanité minimum. Ceci devrait exclure le terrorisme de ses méthodes puisque ce dernier prend pour cible des civils.

Quant au port systématique de l'uniforme, il nous semble impossible car il interdirait la pénétration dans les villes de la résistance. Nous n'avons pas d'autre choix que d'intégrer " la guerre subversive, " comme Auphan désigne encore la résistance, dans l'environnement politico-militaire.

Par contre, le bombardement des villes nous apparaît une aberration, hélas largement pratiqué par tous les camps à partir de la Deuxième guerre mondiale. Auphan a raison de le dire terroriste, car il prend la population en otage.

Néanmoins, nous ne pouvons l'inclure dans le terrorisme lui-même car cela reviendrait, qualifiant la plupart des pays de terroristes, à ôter tout sens à cette notion. Voilà pourquoi il nous semble plus pertinent de parler, en matière de bombardement de cité, de crime de guerre.

 

Alain Chevalérias

est consultant au:

Centre de Recherches sur le Terrorisme depuis
le 11 septembre 2001

 

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