Al-Qaïda en Libye

juillet 2011

La Libye est confrontée à deux dangers : la guerre civile, sous couvert de conflit tribal, et la montée de l’islamisme avec le renfort d’Al-Qaïda sur un terreau islamo-conservateur dans l’est du pays.

Pour le danger de guerre civile, le CNT, sorte de gouvernement provisoire, est formé de 31 membres, dont seulement une douzaine ont été dévoilés. Or, sur cette douzaine, la plupart sont des membres de la tribu des Harabis, l’une des 140 tribus dénombrées en Libye. On comprend la « révolution libyenne », comme il est convenu de l’appeler, favorisant un véritable coup de force d’une ethnie sur les autres.

Ce n’est pas tout. Sous la monarchie, les Harabis occupaient une position dominante, y compris parmi les tribus de Cyrénaïque, base populaire du pouvoir. Or les Harabis sont des islamo-conservateurs, dans la ligne de l’ancienne monarchie, la dynastie des Senoussi, créatrice par ailleurs d’une secte islamiste dont la doctrine était inspirée par le dogme au pouvoir en Arabie Saoudite, le wahhabisme.

Indication qui ne trompe pas, sur les photos du chef du CNT, Moustapha Abdeljalil, on voit la marque de la « zbiba », ce durillon formé en frappant le front sur le sol au moment de la prière. La « zbiba » apparaît comme un signe de religiosité exacerbée dont se moquent la majorité des croyants.

On comprend la « révolution » très facilement pénétrable par la propagande d’Al-Qaïda. Avant sa mort, du reste, Oussama Ben Laden avait pris les devants, ordonnant à plusieurs dizaines de ses hommes de rejoindre les soulèvements en Égypte, en Tunisie et en Libye, afin d’orienter la destinée de ces pays.

La Libye offrait le meilleur profil. Depuis le début des années 90, les Libyens représentent en effet le contingent le plus important des recrues d’Al-Qaïda. Ainsi, en 2007, les Américains découvraient une liste de 112 Libyens combattant en Irak. Or, sur ces 112, 52 venaient de Darnah, ville de 50 000 habitants située sur la côte de Cyrénaïque.

Sans surprise, des informations inquiétantes nous parviennent de cette petite ville. Les femmes ne sortent que le jour, portant la burka importée d’Afghanistan. Le maire de la ville, Mohammad Al-Mesori, a déclaré à RFI : « Nous voulons faire appliquer les lois de l’islam, où est le problème ? »

Toujours à Darnah, Abdul Hakim Al-Hasadi jouit d’un grand prestige. Nommé chef de la sécurité, il dit avoir mille combattants sous ses ordres. Or, capturé en Afghanistan en 2002, il y combattait depuis cinq ans et reconnaît avoir été en relation avec les chefs d’Al-Qaïda. Avec quelques anciens djihadistes qui se sont battus contre les forces occidentales en Irak et en Afghanistan, Al-Hasadi assure lui-même la formation de ses hommes.
Contrairement aux affirmations de Kadhafi, Darnah n’a pas été proclamée émirat islamique. Néanmoins, elle est bien une tête de pont des réseaux d’Al-Qaïda en Libye.

Or, à tout cela s’ajoute un autre danger : à la mi-juin, l’armée nigérienne a intercepté un convoi de l’AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique) transportant 640 kg de semtex, de l’explosif à usage militaire dérobé dans les stocks libyens. De leur côté, les Maliens ont signalé plusieurs captures d’armes, dont des missiles anti-aériens, et même des transports de troupes, venant eux aussi de Libye et destinés à l’AQMI.

Pourtant, en toute ingénuité, fin juin, Nicolas Sarkozy, ordonnait des parachutages d’armes en zone rebelle, dans le Djebel Nafusa. Une zone où vivent des Touaregs, eux-mêmes liés à l’AQMI, dont ils constituent les réseaux de soutien.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
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