NOMMÉ À LA DGSE |
avril 2013
Le 10 avril, Bernard Bajolet a été nommé à la tête des services de renseignements de la Défense sur décision du Président de la République. Né le 21 mai 1949, après Sciences Po et l'ENA, il a fait une carrière essentiellement au Quai d'Orsay. Parenthèse significative, de juillet 2008 à février 2011, il a exercé les fonctions de coordonnateur national du Renseignement auprès de Nicolas Sarkozy. Mais qui est Bajolet ? Il s'est fait une réputation de spécialiste de pays sensibles, d'efficacité et a montré sur le terrain un certain courage. Premier secrétaire en Algérie de 1975 à 1978, il est retourné dans ce pays comme ambassadeur de 2006 à 2008. Wikileaks, l'opération de divulgation des dépêches diplomatiques américaines, rapportait les propos désabusés et peu conventionnels de Bajolet sur cet ancien territoire français. Il jugeait le pays totalement corrompu, ses structures sclérosées et le taxait d'immobilisme. En outre, sur ce dossier, il prônait la neutralité de la France. En 1986, on retrouve Bajolet premier conseiller à Damas, avant d'exercer les fonctions de directeur adjoint pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient au Quai et de se retrouver de 1994 à 1998 ambassadeur en Jordanie. Puis c'est la Bosnie-Herzégovine (1999-2003), à la sortie des accords de Dayton (1), et l'Irak de 2004 à 2006. Dans ce pays, il se fait remarquer par son engagement sur le terrain. Il traverse Bagdad de part en part quand les diplomates américains se calfeutrent dans la zone verte, un secteur surprotégé. Il va avoir à gérer les dossiers de trois otages, ceux de Christian Chesnot, Georges Malbrunot et Florence Aubenas. C'est pour lui l'occasion de travailler en étroite relation avec les services de renseignement. Dans les années 70, il avait fait la connaissance de François Hollande à Alger quand ce dernier effectuait un stage à l'ambassade. Les deux hommes avaient sympathisé et le tutoiement devint de rigueur entre eux. C'est encore à Alger, mais vingt ans plus tard qu'il est remarqué par Nicolas Sarkozy. Bernard Bajolet
Il ne garde cependant pas la place. En février 2011, il démissionne. S'il ne s'exprime pas sur le sujet, on le suppose contrarié. Pour mémoire, c'est en février 2011 que nos services commençaient à faire des livraisons d'équipements aux rebelles libyens. Puis, le mois suivant, la France poussait les feux pour obtenir le vote d'une résolution onusienne lui permettant d'attaquer Tripoli. Si nous ne nous trompons pas, et si la raison du désaccord de Bajolet est bien le dossier libyen, cela plaide encore en sa faveur. Sa nomination par Hollande peut faire craindre chez Bajolet un tropisme atlantiste (2), D'autant plus qu'en 1985-1986 il a pris une année sabbatique pour étudier à l'Université d'Harvard et rédiger un rapport intitulé " Les États-Unis et la Défense de l'Europe ". Au cours de son séjour en Irak, cependant, il suscite le mécontentement des Américains en jouant sa propre partition. Nommé ambassadeur de France à Kaboul en février 2011, sa liberté de ton est même devenue sa marque. Lors de son discours d'adieu, le 23 avril dernier, il a osé dire : " Je n'arrive toujours pas à comprendre comment la communauté internationale et le gouvernement afghan sont parvenus à cette situation où tout doit se passer en 2014 : les élections, un nouveau président, les transitions économiques et militaires, et tout cela alors que les négociations pour le processus de paix n'ont pas encore vraiment commencé ". Indépendant, en paix avec les milieux politiques de droite comme de gauche, arabisant et excellent connaisseur du continuum musulman, Bajolet jouit de solides atouts pour mener la DGSE en quasi situation de guerre. (1) Accords consacrant la fin de la guerre
de Bosnie. |
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