QUI EST GBAGBO ?

avril 2011

Le 11 avril 2011, vers 15 heures, Laurent Gbagbo était capturé par les hommes d’Alassane Ouattara, son adversaire aux élections présidentielles de Côte d’Ivoire, avec le soutien des forces françaises.

Né en 1945, historien de formation, Gbagbo entre en politique en suivant l’itinéraire syndical, le seul moyen de faire de l’opposition, sous le régime de Félix Houphouët-Boigny, sage Président du pays depuis l’indépendance, mais pratiquant une gestion autoritaire du pays.

Grâce aux investissements français et à la présence d’une importante communauté française, la Côte d’Ivoire est alors en pleine expansion. Perle de nos anciennes colonies d’Afrique de l’Ouest, elle va voir circuler sur son territoire 40% de la masse monétaire des États de la CDEAO (1).

En 1971, les activités syndicales de Gbagbo lui valent un emprisonnement de 22 mois. Libéré, il se marie avec Simone, née Ehivet. Ils ont tous deux quitté le catholicisme et rejoint l’Église méthodiste afin de pouvoir se remarier. Puis il contractera un mariage coutumier, pour prendre une seconde épouse.
Se faisant à nouveau remarquer lors de manifestations, afin d’éviter un retour en prison, il s’exile volontairement en France, en 1985, où il développe de bonnes relations avec les socialistes. Il rentre en Côte d’Ivoire en 1988 et, se présentant aux élections présidentielles, obtient 18,3% des suffrages.

De nouvelles manifestations d’étudiants éclatant, Ouattara, alors Premier ministre, fait à nouveau emprisonner Gbagbo pendant six mois. En 1995, après la mort d’Houphouët-Boigny, ce dernier appelle au boycott des élections. En 1997, on signale son passage aux États-Unis, où il noue des liens avec les milieux politiques et évangélistes du pays.

Le 22 octobre 2000, il est élu aux présidentielles. Avec Simone, il instaure un pouvoir fantasque et violent. Le gourou du couple, un ancien joueur de basket, le « Prophète » Koré Moïse, devient chapelain de la présidence et une certaine Cyprienne Flumoku est nommée « ministre internationale de la grâce de Dieu ». Plus grave, Gbagbo exacerbe les tensions ethniques et religieuses quand Houphouët-Boigny avait travaillé à les réduire. Puis il accuse la minorité musulmane de comploter sous les couleurs de l’islamisme. Thèse soutenue avec enthousiasme par les évangélistes américains et les proches de George W. Bush.

Résultat, une rébellion éclate, dans le nord à majorité musulmane, le 19 septembre 2002. Le pays se retrouve coupé en deux, une force des Nations Unies, à laquelle participe la France, s’interposant entre les belligérants.

On doit aussi à Gbagbo la création de milices coupables de nombreux meurtres. En novembre 2004, tout à son obsession de se trouver des adversaires, pour coaliser la population derrière lui, il lance une campagne de violence contre la communauté française et une attaque aérienne, le 6, contre nos unités, de la force d’interposition sous mandat des Nations Unies, causant la mort de neuf de nos soldats.

Cette tragédie mérite un détour. Plusieurs titres français, dont « Le Monde » et « Valeurs Actuelles » ont fugitivement évoqué le rôle de mercenaires israéliens dans les attaques contre les Français (2). Dans le journal israélien « Maariv », un ancien diplomate de l’État hébreu a été jusqu’à dire : « Pendant toutes ces années et sous couvert d’indépendance, la France a agi en Côte d’Ivoire selon un modèle néo-colonialiste... Le Président Gbagbo l’empêche d’imposer ce modèle et les Français veulent provoquer sa chute ».

C’est que la position des Français en Côte d’Ivoire fait des jaloux. En outre, ce pays produit 43% de la consommation mondiale de cacao. Quelques semaines avant la rébellion du nord à majorité musulmane, l’USAID et différents organismes américains avaient même dépêché à point nommé des missions inattendues auprès des producteurs. Or, la crise a provoqué le doublement du prix du cacao sur le marché, enrichissant les négociants anglo-saxons qui le dominent, comme Anthony Ward.

Son mandat arrivant à terme en 2005, Gbagbo retarde les élections d’année en année, jusqu’à fin 2010. Il perd au second tour, mais refuse de quitter de pouvoir, provoquant une nouvelle crise et un nouveau bain de sang.

Puis la machine se met en marche. Les États-Unis et Israël ont choisi un nouveau poulain. Forts des résultats, face à un Gbagbo décrédibilisé, ils soutiennent Ouattara, le musulman.

Reste à se demander si la France, irréprochable dans cette affaire, comparée à sa gestion du drame libyen, n’a pas fait le travail au seul profit des États-Unis et d’Israël qui se préparent à en récupérer les bénéfices.

Notes


(1) Communauté économique des États de l’Afrique occidentale, formée de 15 pays, comprenant les anciennes possessions françaises de la région, mais aussi le Nigeria, le Libéria, la Sierra Leone, le Ghana etc...
(2) « Le Monde » du 16 novembre 2004 et « Valeurs Actuelles » du 3 décembre 2004.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

 
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