ENTRE BANDITISME, TERRORISME ET PROPAGANDE |
juin 2012
Couvrant une opération antidrogue menée
par larmée colombienne pour France 24, Roméo
Langlois sest retrouvé sous le feu dans une embuscade
tendue par les FARC, les « Forces armées révolutionnaires
de Colombie ». Quatre soldats ont été
tués. Lui-même touché au bras, il a été
capturé par les attaquants. Les FARC nont rien dune bande de boy-scouts. Ils émergent en 1958, dans le contexte de la création de zones autonomes à prétention paysanne mais en réalité dinspiration communiste. Attaqués par larmée colombienne le 22 juin 1964 et forcés à la fuite, ils font de cette date celle de leur fondation. Ouvertement marxistes léninistes, jusquen 1991 ils apparaissent comme le bras armé du Parti communiste colombien dont ils sémancipent cette année-là, ce dernier ayant refusé dorganiser son congrès dans une zone contrôlée par la guérilla. Organisés, disciplinés, structurés en fronts et en milices dencadrement de la population, ils contrôlent de vastes régions reculées du pays qui échappent à lautorité de lÉtat. À plusieurs reprises, des négociations prennent place avec la capitale. En 1984, sous le gouvernement de Belisario Betancur, puis en 1998, avec le Président Andrés Pastrana. Ce dernier crée même une zone démilitarisée par les belligérants. Mais les FARC, violant laccord, se servent de celle-ci comme base arrière pour lancer des opérations militaires. Puis, ruinant tout espoir de conciliation, ils chassent les fonctionnaires de lÉtat de la zone démilitarisée. Au début des années 2000, forts de 17 000 combattants, présents jusque dans la banlieue de Bogota, la capitale, on leur prête alors la capacité de renverser le pouvoir. Néanmoins, le renforcement de laviation de guerre colombienne et lapparition de milices para-militaires provoquent leur affaiblissement. Faisant évoluer leur tactique, ils se lancent alors dans lenlèvement dhommes politiques, renforcent leurs activités dans le trafic de la drogue, légitimé dès 1982 par leur VIIè congrès, et transforment lextorsion de fonds et les kidnappings contre rançon en véritables industries. Les FARC sintègrent aussi dans le dispositif terroriste international. En 2001, trois hommes de lIRA (mouvement terroriste irlandais) ont été interceptés à Bogota et condamnés pour avoir transmis leur savoir-faire en matière dattaques à lexplosif à leurs « collègues » colombiens. Des échanges de connaissances ont aussi eu lieu entre lETA (mouvement terroriste basque) et les FARC À partir de 2002, lélection dAlvaro Uribe à la Présidence leur donne un coup redoutable. Celui-ci mobilise larmée contre eux. Ils perdent plusieurs commandants au combat et lÉtat reprend ses droits dans des régions dont le contrôle lui échappait totalement. En 2010, les FARC ne disposent plus que de 8 000 hommes, dont des enfants recrutés de force. Plus grave pour eux, jusque-là conciliant à leur égard allant jusquà les soutenir, sur son territoire, le Venezuela voisin coopère désormais avec la Colombie pour arrêter des commandants des FARC. À cela sajoute le peu de soutien dont jouit lorganisation dans lopinion colombienne. Preuve du peu dengouement quelle suscite, les partis de gauche, en raison leur proximité idéologique avec les guérilleros, ne parviennent pas à dépasser quelques pour cents aux élections. Cest dans le contexte de lérosion de leurs forces quil faut placer la libération de Roméo Langlois par les FARC. On note quà son retour en France, ce dernier était porteur dune missive adressée par leur commandement à François Hollande pour demander « une sortie négociée » du conflit. Cette apparence douverture des FARC ne doit pourtant pas duper. Dans la région de Caqueta, le 3 juin dernier, sur le chemin dune maternité, ils assassinaient quatre personnes : une femme qui allait accoucher, son accompagnatrice et les deux policiers qui les escortaient. Les atrocités commises par lorganisation colombienne nous rappellent que les islamistes radicaux ne sont pas les seuls à pratiquer le terrorisme. Alain Chevalérias |
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