LE CRIF A-T-IL VÉHICULÉ,
PAR MÉGARDE,
UNE DÉSINFORMATION ?

août 2008

Le 25 juillet 2008, le CRIF, reprenant un article du journal israélien Yedioth Aharonot de la même date, annonçait une explosion, quelques jours plus tôt à Téhéran, de matériel militaire destiné au Hezbollah libanais.

Tous les éléments collectés par le Centre de recherches sur le Terrorisme, tant en Iran qu'en Europe, tendent à prouver qu'il s'agit d'une désinformation et que cet incident n'a jamais eu lieu.

Le texte du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) disait :

" D'après une information du journal londonien, Daily Telegraph, une forte explosion a eu lieu le 19 juillet dernier dans une banlieue de Téhéran contre un convoi militaire qui devait transporter des armes afin de les fournir au Hezbollah. Au moins 15 personnes ont été tuées dans l'explosion. D'après le quotidien, les Gardiens de la Révolution iranienne ont interdit la diffusion de cette information dans les médias et ont lancé une enquête sur l'incident... "

Nous avons retrouvé l'article du " Daily Telegraph ". Ce journal précisait : " L'explosion a eu lieu dans la banlieue de Téhéran à Khavarshahar * (...) C'était une explosion importante qui a été entendue d'un bout à l'autre de Téhéran ".

carte de l'Iran

Nous avons demandé à notre correspondant en Iran, Hassan Chirazi, de faire une recherche.

" Le 19 juillet dernier, dit-il, aucune explosion d'une telle ampleur n'a été entendue à Téhéran. Les gens du secteur n'ont rien entendu non plus. Une explosion de l'importance décrite par le Daily Telegraph n'aurait pas pu échapper aux milliers de résidents du district touché ".

L'article du " Daily Telegraph " est signé par Con Coughlin. Ce nom est bien connu des milieux journalistiques. A plusieurs reprises, Coughlin s'est vu reproché de fabriquer ou de propager des désinformations allant dans le sens des politiques américaines et britanniques en Irak.

Deux exemples.

On se souvient, avant le déclenchement de la guerre contre l'Irak, que Tony Blair avait dit Saddam Hussein capable de déclencher le feu de ses armes de destruction massive en 45 minutes.

  • Le 6 décembre 2003, dans le " Daily Telegraph ", Coughlin publiait l'interview d'un certain lieutenant-Colonel Al-Dabbagh. Cet ancien haut gradé de l'armée irakienne se révélait très coopératif. Il confirmait les propos de Tony Blair et ajoutait : " Je suis aussi sûr que je vous vois, que les armes de destruction massive sont cachées en Irak ".
  • On n'a jamais trouvé les armes en question et elles ont été déclarées inexistantes par l'occupant lui-même. Par conséquent, Saddam Hussein aurait eu bien du mal à ordonner leur mise en oeuvre. Quant au lieutenant-colonel Al-Dabbagh, on n'a plus jamais entendu parlé de lui.

  • Le 13 décembre 2003, dans un nouvel article, Coughlin parlait d'un document, découvert en Irak, prouvant que Mohammad Atta, l'organisateur des attaques du 11 septembre 2001, s'était entraîné dans ce pays, au mois de juillet, avant d'accomplir ses crimes.
  • Citant un homme politique irakien, il fera même dire à celui-ci : " Nous découvrons tout le temps des preuves de l'implication de Saddam avec Al-Qaïda". Là encore, il sera prouvé et confirmé plus tard par les services américains, que Mohammad Atta ne s'est jamais rendu en Irak et que Saddam Hussein n'a pas eu de relation avec Al-Qaïda.

    En d'autres termes, cette fois encore, Coughlin semble avoir joué de malchance en annonçant une explosion, le 25 juillet dernier, dans la périphérie de Téhéran. Néanmoins, si les autorités iraniennes, faisant preuve d'une compétence extraordinaire pour dissimuler la vérité, étaient vraiment parvenues à occulter un pareil incident, il reviendrait à Coughlin de donner ses sources ou sinon des preuves. Nous attendons.

    Il ne s'agit pas pour nous de prendre le parti de l'Iran, dont les nombreux écarts nous inquiètent au plus haut point, mais de nous en tenir à une ligne stricte en matière de diffusion des nouvelles. Fabriquer ou diffuser de fausses informations, même par inadvertance, dessert la cause que l'on souhaite servir. Voilà pourquoi nous suggérons au CRIF de vérifier les affirmations des uns et des autres avant des les publier.

     

    Alain Chevalérias

     


    *
    En réalité, il s'agit de Khavarshahr ou Khavar Sharhr, situé à 18 kilomètres au sud-est de Téhéran, sur la route de Machhad.

    Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
     www.recherches-sur-le-terrorisme.com

     

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