LAPSSET, pipeline de la guerre

février 2013

LAPSSET signifie Lamu-Port-Sud-Soudan-Éthiopie-Transport.
C’est un vaste projet de pipeline, de routes et d’un port en eaux profondes, à Lamu, au Kenya, pour évacuer le pétrole et le gaz du Sud Soudan vers le reste du monde, d’une part, pour approvisionner en hydrocarbures l’Éthiopie, d’autre part.

LAPSSET a néanmoins pris beaucoup de retard. Les travaux du port de Lamu n’ont commencé qu’en 2012 sous la direction d’une société chinoise. Ce n’est pas la moindre surprise dans l’affaire.

Dans les années 90 et 2000, on se souvient de l’activisme américain pour soutenir la guerre de sécession du Sud Soudan. L’intérêt de Washington pour les champs pétroliers de ce pays ne faisait aucun doute. Or, déjà à l’époque, on parlait de la nécessité de créer un oléoduc passant par le Kenya pour évacuer le pétrole du futur État du Sud Soudan et éviter ainsi à ce dernier de dépendre du Nord Soudan. Aujourd’hui, étrangement, les États-Unis font profil bas dans cette affaire.

Mais la situation a beaucoup changé. Nous sommes entrés dans l’ère du gaz de schiste exploité avec frénésie aux États-Unis. En outre, de nouvelles réserves de gaz et de pétrole ont été découvertes en Afrique de l’est, en Ouganda, surtout en Tanzanie et au Mozambique, où en mer l’évacuation des hydrocarbures en est facilité.

Dans un rapport du 23 mai 2013, le département de l’administration américaine en charge de l’énergie ne consacre plus qu’un paragraphe au pétrole du Sud Soudan, comme s’il avait perdu tout intérêt pour Washington.
Certes, les nouvelles ressources en hydrocarbures, fussent-elles potentielles, peuvent expliquer ce désengagement. Mais à cela s’ajoute l’insécurité.

Avec son indépendance, le Sud Soudan est loin d’être pacifié. La fin de la guerre avec Khartoum permet aux haines tribales de s’exprimer en toute liberté sur fond d’ambitions personnelles des chefs. De plus, cela ne vaut guère mieux du côté du Kenya, comme on l’a vu en septembre dernier avec la sanglante attaque d’un supermarché de Nairobi par un commando islamiste venu de la Somalie voisine.

Pour ces raisons, on comprend Washington ayant laissé de côté ses plans soudanais. Mais d’autres, en revanche plus assoiffés de pétrole que le géant US aujourd’hui bien pourvu, restent à l’affût de la plus petite goutte du précieux liquide. Le Kenya s’est donc ouvert à la Chine en passe de devenir le principal maître d’oeuvre du LAPSSET. Mais aussi à Israël, qui fait valoir, comme lors de l’attaque de Nairobi, ses compétences en matière de sécurité.

Reste que le Nord Soudan voit tout cela d’un mauvais oeil. Si le Sud se ménage un autre chemin d’exportation du pétrole que Port Soudan, au nord, cela représente une importante perte de devises pour Khartoum.
Cela permet de mieux comprendre les raisons de l’insécurité dans la région. Le Nord Soudan a en effet tout intérêt à encourager les différends tribaux au Sud et les attaques au Kenya par l’entremise des islamistes somaliens qu’il soutient comme nous le savons.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
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