LA MANIPULATION CONTINUE |
février 2012
Le 10 janvier, juges d'instruction au Tribunal de grande instance de Paris pour les affaires de terrorisme, Marc Trevidic et Nathalie Poux remettaient un rapport des experts techniques en matière de balistique et d'acoustique, sur l'attentat perpétré contre l'avion du Président rwandais Juvénal Habyarimana le 6 avril 1994. Une partie de la presse s'est empressée de disculper Paul Kagamé, actuel Président du pays d'un crime dont il est soupçonné. On a vu " Le Monde " aller jusqu'à titrer : " Le camp Kagamé innocenté " (1). Ce journal et d'autres ne vont-ils pas un peu vite en besogne ? Dans un dossier où nos armées sont victimes de la désinformation ambiante, on aurait pu attendre de l'objectivité de la part du " Figaro ". Le journal de M. Dassault va pourtant jusqu'à écrire en conclusion d'un article que l'affaire pose " la question de l'implication de notre pays et de son degré de connaissance dans la planification d'un génocide puis de l'éventuelle manipulation de la Justice " (2). En fait le rapport de plus de 400 pages n'apporte qu'une seule information nouvelle : le lieu supposé du tir des deux missiles SA-16, dont un, frappant le réservoir de l'avion, a fait exploser celui-ci. Ce lieu serait le camp de Kanombé, tenu par l'armée rwandaise, et non pas la ferme de Masaka, située à trois kilomètres, où se tenait la rébellion tutsie commandée par Paul Kagamé, le FPR (Front populaire rwandais). Nous parlons néanmoins au conditionnel, comme du reste le rapport nous y invite. On lit : " Le tir des deux missiles, dont le second a abattu l'avion, a pu avoir lieu depuis le camp de Kanombé, à proximité des maisons des coopérants belges... " Pour arriver à cette conclusion,
les juges se sont appuyés sur les experts et les témoignages
sur le terrain. Néanmoins, les deux magistrats ne donnent
à aucun moment l'appartenance des auteurs des tirs. Et
pour cause, car il reste trop de questions sans réponses.
Sans les connaître toutes, en voici quelques-unes.
Restent cependant des faits troublants à décharge pour Kagamé et ses hommes. Par exemple, de faux messages incriminant ses hommes ont été livrés à la Justice. D'autres sont indéchiffrables, comme le comportement du capitaine Paul Barril, sur place au moment des faits. Il prétend être parti avec des éléments de l'enquête mais n'a jamais été interrogé. D'autres éléments apparaissent à charge pour le FPR. Les accords d'Arusha, conclus entre Habyarimana et le TPR sous les pressions de François Mitterrand, prévoyaient des élections. Or les Tutsis, ne représentant que 10% de la population, n'avaient aucune chance d'arriver au pouvoir. Dans la nuit suivant l'attentat, comme s'ils n'attendaient que cela, les chefs du FPR rompirent le cessez-le-feu et lancèrent leurs forces, pré- positionnées, à l'attaque d'une armée rwandaise dont les chefs avaient été tués avec le Président. Depuis, les Tutsis ont installé une dictature raciste qui interdit aux Hutus un retour aux affaires. Pour toutes ces raisons il nous apparaît prématuré de conclure, pour le moment, à l'innocence de Kagamé, déjà parce que c'est à lui que profite le crime. Voilà pourquoi le disculper aujourd'hui revient à déformer la réalité.
(1) " Le Monde " du 12
janvier 2012. |
www.recherches-sur-le-terrorisme.com |
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