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mai 2007
Le 9 avril 2007, les habitants du Timor oriental votaient pour élire leur nouveau Président. Des accusations de fraude éclataient. A la même date, dans " Le Figaro ", l'envoyée spéciale dressait un tableau alarmant de la situation du pays, l'un des plus pauvres du monde, avec un revenu de moins d'un euro par habitant et par jour, une guérilla en résurgence et des troubles qui, il y a à peine un an, faisait encore 37 morts et 150 000 déplacés. La journaliste disait vrai. Elle n'oubliait que deux détails. D'une part, si la population est pauvre, une fabuleuse réserve d'hydrocarbures gît au pied des côtes du Timor oriental. D'autre part, l'Australie est largement responsable de la misère et de la violence qui y sévissent. Le Timor oriental, partie est de l'île de Timor, un territoire de 15000 km2, représente l'équivalent d'un ou deux départements français. Il était sous domination portugaise depuis le XVIème siècle, mais inclus dans la sphère d'influence de l'Indonésie. Après la Deuxième Guerre mondiale, les dirigeants indonésiens le savent, le Portugal, ne restera pas éternellement. Les Australiens en sont aussi conscients. Or, gisant par le fond, on a déjà découvert des réserves considérables d'hydrocarbures qui suscitent la convoitise de l'Australie. Mais il faut savoir. En accord avec les autorités britanniques, les Portugais avaient tracé la frontière maritime entre l'Australie et Timor à équidistance des deux pays. Or, cette ligne de démarcation plaçait la plus grande partie des nappes de gaz et de pétrole dans les eaux territoriales timoraises. Pour corriger l'édit du destin, en 1972, les Australiens signent un accord avec l'Indonésie, pour rapprocher les frontières maritimes des côtes de Timor. En d'autres termes, pour rejeter la plus grande partie des réserves d'hydrocarbures dans les eaux internationales. Révélateurs de leurs méthodes, l'Australie et l'Indonésie concluent cet accord sans même prendre la peine de consulter l'autorité légale, fût-elle coloniale, le Portugal. Mais l'Histoire continue sa marche. En 1974, au Portugal, éclate la Révolution des oeillets. Lisbonne n'a plus ni la force, ni la volonté, de se battre pour ses colonies et, en 1975, les forces indonésiennes en profitent pour débarquer au Timor oriental. Puis elles l'annexent, dans le sang et contre la volonté de la population. Les frontières maritimes du Timor oriental L'Australie reconnaît l'autorité du vainqueur sur Timor oriental et, pour salaire de sa complaisance, en 1989, obtient des droits sur les réserves d'hydrocarbures de Timor. Complice, Canberra ferme les yeux sur les exactions commises par l'armée indonésienne, quand l'agression continue de celle-ci cause la mort de plus de 200 000 personnes en quinze ans. En 1999,
à son tour confrontée à une crise à
la fois économique et politique, l'Indonésie se
voit contrainte d'accepter un référendum de la
population du Timor oriental. Il débouche sur l'indépendance
du pays. L'Australie change alors de camp. Elle envoie ses soldats
pour protéger l'est de l'île, puis prend le commandement
de l'ATNUTO, une mission de maintien de la paix des Nations
unies. Les Timorais résistent. Ils refusent de reconnaître la frontière de 1972, négociée entre l'Indonésie et l'Australie. Ils lâchent cependant du lest et, espérant une aide économique de Canberra, lui concèdent des droits exorbitants sur les réserves d'hydrocarbures comprises dans les limites de la frontière dessinée par les Portugais. Le 20 mai 2002, jour de la reconnaissance officielle de l'indépendance de Timor oriental par la communauté internationale, mêmes insatisfaits, les Australiens s'empressent de signer le TST (Timor Sea Treaty) avec Dili. Celui-ci fait tomber le champ le plus important de la zone, " Sunrise ", à 80% entre les mains des Australiens. Ces derniers n'en continuent pas moins leurs pressions pour en obtenir plus. Ils exercent un chantage à l'aide humanitaire sur les Timorais, pendant que les travaux préparatoires à l'exploitation piétinent. Furieux, les Timorais adressent alors des demandes de services aux sociétés pétrolières européennes. Chefs de programme pour les principales nappes, ConocoPhillips, une compagnie américaine, et Woodside Australian Energy, s'inquiètent pour leurs intérêts. Les Australiens, poussés par leurs pétroliers et ceux des Américains, finissent par céder. Un accord intervient en décembre 2005. Sur le fameux champ " Sunrise ", les royalties seront partagées à parts égales avec Timor oriental. En échange, le problème des frontières sera laissé de côté pendant 40 ans, la durée de vie attendue du site. Canberra s'estime cependant lésée. Comme par hasard, la tension monte au Timor oriental à partir d'avril 2006. A Dili, 600 militaires se rebellent. Ils sont dirigés par le commandant Alfredo Reinaldo et veulent la chute du chef de gouvernement, Mari Alkatari. Or, celui-ci est un obstacle déterminé aux prétentions australiennes sur le pétrole timorais. Le chef de gouvernement chute. Le rebelle, lui, est arrêté en juillet. Mais à la surprise générale, moins de deux mois plus tard, il s'évade de sa geôle avec une facilité déconcertante. Depuis, il a repris la guérilla. La population le perçoit comme un instrument aux mains de l'Australie pour faire céder l'autorité timoraise aux exigences de Canberra. Détail intéressant, Reinaldo a du reste été entraîné en Australie, comme la plupart des hommes qui le suivent. Signant sa traîtrise, dans une interview accordée à la chaîne ABC, il déclarait le 25 mai 2006 : "Je suis avec les Australiens". Difficile de ne pas voir dans
l'Australie la "petite Amérique" de la
région quand, elle aussi, cherche systématiquement
à contrôler les sites pétroliers au mépris
de tous les principes. |
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