NOS COUSINS ACADIENS |
Du 7 au 23 août
2009, sest déroulé le congrès mondial
des Acadiens, à Moncton, au Canada. En France, nul nen
a parlé. Pourtant, plus de 70 000 personnes ont fait le déplacement. A une époque où lon vilipende le nationalisme, qui serait,avec la religion, fauteur de toutes les guerres, nous ne croyons pas inutile de rappeler lhistoire de ces Français par le sang et francophones par la langue, toujours victimes, jamais bourreaux, et pourtant ardents nationalistes. |
Tout commença pour les Acadiens avec larrivée de Jacques Cartier, en 1534, dans la baie du St Laurent. Les Français attendirent néanmoins 70 ans avant de sinstaller sur les bords du fleuve et en Acadie, avec lintention évidente de bloquer lexpansion vers le nord des colonies anglaises, du littoral des futurs États-Unis. Encore aurait-il fallu disposer dune masse de population expatriée suffisante pour réaliser ce plan. Or, deux siècles plus tard, quand lAngleterre avait deux millions de colons établis en Amérique du Nord, les Français ny étaient que 54000. Au Canada, même alliés avec les indiens Hurons, nous ne faisions pas le poids. Le 10 février 1763, ce déséquilibre aboutit à la signature du traité de Paris et à la perte par la France de ses possessions nord américaines, à lexception des îles de St Pierre et Miquelon. Quant à lAcadie, les actuelles provinces canadiennes du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse (1), dès 1713, en vertu du traité de dUtrecht, elle était déjà tombée dans lescarcelle de lAngleterre. Londres se contenta dabord de lévacuation des troupes françaises laissant les Acadiens livrés à eux-mêmes. Mais au bout de trente ans, le gouverneur de la province décida dexiger deux un serment dallégeance. Cette démarche cachait en réalité une perfidie. Dans une lettre adressée à ses supérieurs à Londres, Charles Lawrence, le gouverneur des Anglais, écrivit quil proposera le serment dallégeance une dernière fois aux Acadiens. « Sils le refusent, précisait-il, nous aurons dans ce refus un prétexte pour les expulser. Sils lacceptent, je leur refuserai le serment en appliquant un décret qui interdit à quiconque ayant déjà refusé de prêter serment dallégeance de le prêter » en revenant sur son choix. Puis il concluait : « Dans les deux cas, je les déporterai ! » (2) Lawrence neut pas besoin dinvoquer le décret, les Acadiens sentêtant à refuser lallégeance. En 1755, les soldats anglais les regroupèrent dans les églises et les forts puis les déclarèrent prisonniers. Enfin, les embarquant sur des bateaux, ils les dispersèrent à travers leurs colonies de la Nouvelle-Angleterre (2). Cest le « Grand Chambardement », comme disent les Acadiens. Plus de la moitié de ces derniers, estiment les historiens, périrent de faim, de maladie ou dans les naufrages. Cette épuration ethnique avant la lettre na jamais été reconnue par la Grande-Bretagne, aussi peu encline à admettre ses crimes que la Turquie. Puis, le Canada devenant britannique et le conflit avec la France cessant, à partir de 1763, les Acadiens retrouvèrent un peu de liberté. Certains sétaient enfuis au Québec ou à St Pierre et Miquelon, quand dautres avaient été rapatriés en France. Quelques-uns, réduits à létat de prisonniers de guerre sur le sol même de lAcadie, furent dabord employés aux travaux publics puis graduellement relâchés. On assista alors à un étrange phénomène. En dépit des difficultés, nombre dAcadiens affluèrent des lieux où on les avait déportés, pour retrouver leur province. Préservant leur francité à tout prix, leur condition navait pourtant rien denviable. Leurs fermes avaient été cédées à des colons allemands et anglais. De plus, ils navaient aucun droit et, en tant que catholiques, pas même celui de posséder une terre. Ils survécurent, travaillant comme manoeuvres ou en sinstallant dans des lieux reculés. Puis, petit à petit, ils se regroupèrent. Les temps se faisant moins sectaires, augmentant leur nombre grâce à une forte natalité, dès la fin du XIXème siècle, ils commencèrent à faire valoir leurs droits. On appelle cette époque la « Renaissance acadienne ». Aujourdhui, les Acadiens ne constituent quune minorité de la population de lancienne province de leurs ancêtres. Certes, ils sont un peuple sans État. Mais ils cultivent leur identité, parlent leur propre langue et se sont donné un hymne national et un drapeau : nos trois couleurs frappées dune étoile dor en hommage à la Vierge. Ils ont même une fête nationale, « le Tintamarre ». A cette occasion, tous les 15 août, ils défilent en masse dans les rues en sattachant à faire le plus de bruit possible, pour montrer aux Anglais quils existent. Une belle leçon, qui nous vient de lAmérique où lon parle « françois ». Jean Isnard (1) À lextrême est du Canada et
au sud de Terre-Neuve. |
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