Dans l'article Les Barbaresques, nous avons parlé de l'esclavage pratiqué par des musulmans contre l'Europe. Quand le " bouffon " Dieudonné ne cesse d'attaquer notre pays pour la traite des Noirs pratiquée par nos ancêtres, quand un certain Claude Ribbe cherche à se faire une réputation en flétrissant le vainqueur d'Austerlitz pour la réinstauration de l'esclavage sous son règne, il convient de rappeler ce que fut la traite en Afrique. Dans un autre article, nous évoquerons la pratique actuelle de l'esclavage. |
Sur un ton par ailleurs peu conciliant, à l'égard de la période coloniale, un universitaire malien, Soumana Soni, écrit à propos de l'Afrique avant l'arrivée des Blancs : " L'esclave et l'esclavage font partie des moeurs et coutumes de l'Afrique et de l'Africain... Certains chefs de guerre (africains) se constituaient des réservoirs d'esclaves... L'anarchie régnant, le plus fort pouvait capturer le plus faible, le réduire en esclavage soit pour lui-même, soit pour le vendre à la frontière voisine à d'autres commerçants noirs ou à des esclavagistes. Les prisonniers de guerre devenaient de facto esclaves... " Cet universitaire malien va plus loin. A propos de la traite faite par les Blancs en Afrique, il interroge : " Qui pénétrait dans les confins de la brousse, dans l'arrière pays pour capturer les esclaves et les acheminer vers les comptoirs situés sur les côtes ? " Puis il assène : " Ce sont les Africains qui sont les principaux responsables, sinon les seuls responsables... " Enfin, il lâche une nouvelle note dissonante pour notre société bien-pensante : " Je répondrais, dit-il, que les Africains n'ont pas attendu l'arrivée des Européens pour s'adonner au commerce des esclaves. Ils avaient traité dans le temps
Selon Soumana Soni, un auteur français aurait écrit: " On reconnaissait de loin un navire négrier à son odeur, " tant l'état sanitaire de ces centaines d'êtres humains entassés à fond de cale était déplorable. Peu flatteur. A notre crédit cependant, au XIXème siècle, toutes les puissances européennes abolissent l'esclavage (1834 pour les Britanniques, 1848 en France, 1878 dans les colonies portugaises). Les Arabes, eux, continuent. Henry Stanley, fameux explorateur britannique, arrive à Zanzibar en 1871. L'île sert de base aux négriers arabes. C'est du reste grâce à l'un d'eux, Tippu Tib, qu'il pourra pénétrer en Afrique par la côte est à la recherche d'une autre célébrité, portée disparue, Livingstone.
Marché aux esclaves à Zanzibar en 1872
Ce dernier, adversaire de l'esclavage, a décrit sa rencontre avec une caravane d'esclaves pris par les Arabes: " Une longue chaîne composées d'hommes, de femmes et d'enfants, liés à la file et les mains attachées... Chacun de ces malheureux avait le cou pris dans l'enfourchure d'une forte branche de 6 à 7 pieds de long, que maintenait à la gorge une tige de fer solidement rivée. " En 1873, Livingstone mourra à la tâche en Afrique, cherchant à mettre un terme à l'esclavage. Depuis 1839, la Société Anti-Esclavagiste, basée à Londres, travaillait à la même chose. A la fin, les conquêtes coloniales, certes aussi inspirées par des motivations plus mercantiles, mirent un terme à l'esclavage qu'Arabes et Noirs n'avaient pas cessé de pratiquer. Mais à force de ne voir que les côtés négatifs de la colonisation, on fini par oublier ses aspects humains, comme la lutte contre l'esclavage. Souvent, comme en Mauritanie, si profondément ancré dans les moeurs, nous n'y pûmes rien. Dans " Terre des hommes, " Saint Exupéry a écrit : " Parfois l'esclave noir, s'accroupissant devant la porte, goûte le vent du soir. Dans ce corps, pesant de captif, les souvenirs ne remontent plus... Un jour pourtant, on le délivrera. Quand il sera trop vieux pour valoir ou sa nourriture ou ses vêtements, on lui accordera une liberté démesurée. Pendant trois jours, il se proposera en vain de tente en tente, chaque jour plus faible, et vers la fin du troisième jour, toujours sagement, il se couchera sur le sable. J'en ai vu ainsi à Juby*, mourir nus... " Si, en tant qu'Européens, nous n'avons pas lieu d'être fiers des souvenirs de la traite des Noirs, les Arabo-musulmans, les Africains de race noire plus encore, devraient en la matière faire assaut d'humilité. Nous avons au moins pour nous, en tant que Blancs ou que Français, d'avoir été les premiers à nous élever contre cette infâme tradition héritée des origines de l'humanité. D'autres devraient rougir plus que nous. Jean Isnard * Au sud du Maroc, à 40 km de la frontière mauritanienne. |