HISTOIRE

LA RECONQUISTA

En 711, les Arabes et leurs alliés berbères islamisés franchissent les colonnes d’Hercule, l’antique nom du détroit séparant le Maroc de l’Espagne. Dominant le passage, la montagne prend le nom du chef des envahisseurs, devenant Djebel Tarik, pour se transformer plus tard en Gibraltar. Du 19 au 26 juillet 711, à Guadalete, non loin de Cadix, le roi Rodrigue est vaincu. En moins de deux ans, l’ensemble de l’Espagne, chrétienne, passe aux mains des musulmans.

Contrairement à une certaine légende musulmane aujourd’hui en vigueur, la conquête se fit dans la violence et non par la reddition d’une population subjuguée par la « grandeur de l’islam ».

 

Ibn Al-Athir, un historien arabe (1), rapporte les exploits du général Abdel Melik (2). En 793, « il foula le sol de la Cerdagne. Pendant plusieurs mois, il parcourut ce pays dans tous les sens, faisant violence aux femmes, tuant les guerriers, détruisant les forts, brûlant et pillant tout, chassant devant lui l’ennemi qui s’enfuyait en désordre ».

Au nord, cependant, une mince bande de territoire échappe aux envahisseurs, le versant sud des Pyrénées et la partie littorale jouxtant l’Atlantique. De là partira la « Reconquista », la reconquête en français.

Mais un événement bouleverse la donne. En Orient, la première dynastie de califes (3), les Omeyyades, est renversée en 750. Un seul de ses princes parvient à s’échapper, Abd Ar-Rahman 1er. Il rejoint le Maroc, puis l’Espagne et fonde l’émirat de Cordoue. L’un de ses successeurs prendra le titre de calife en 929. Mais en 1031, le calife Hicham III est détrôné et l’Espagne musulmane éclate en petites royautés.
Il faut rester honnête. Pour la période omeyyade, mises à part les actions de guerre, l’occupation musulmane se solde par un bilan positif. Nommés Mozarabes, les chrétiens, du moins ceux qui refusent la conversion, pratiquent librement leur culte et, basée sur un artisanat de qualité et une agriculture florissante, l’économie prospère.

carte de l'Espagne avant la Reconquista ou l'Espagne  sous les Musulmans

 

 

Carte de l'Espagne sous la domination musulmane.

 

 

 

Néanmoins, l’occupation reste l’occupation. Au nord du pays, à partir des enclaves de survie, la résistance s’organise. Dès 718, à Covadonga, elle enregistre sa première victoire. Elle s’organise politiquement en créant le royaume des Asturies. Ce dernier soutient des îlots indépendants plus au sud, en Castille, et dans les hautes vallées de l’Aragon et de la Navarre.

En 997, la mise à sac par les musulmans de St Jacques de Compostelle, lieu de pèlerinage révéré par toute la chrétienté, fouette un peu plus la volonté de reconquête. En 1035, le tiers de l’Espagne est reprise. En 1085, c’est au tour de Tolède. A la même époque, El Cid Campeador se taille un royaume aux dépens des musulmans dans la région de Saragosse et s’empare de Valence en 1094.

Mais l’Espagne musulmane appartient à un plus vaste ensemble dont le Maroc fait partie. En 1062, surgissant des confins sahariens, une secte de guerriers puritains, les Almoravides, pénètre en Espagne. En 1086, ils défont Alphonse VI, roi de Castille et plus puissant des souverains chrétiens d’Espagne à Sagrajas. Néanmoins, la « Reconquista » s’accroche à la ligne du Tage, contrôlant désormais les deux tiers du pays.

Les Almoravides s’affaiblissant, les chrétiens reprennent leur progression vers le sud. Mais, une nouvelle vague de guerriers intégristes, les Almohades, déferle d’Afrique du nord. En 1195, ils défont les chrétiens à Alarcos. Le roi Alphonse VIII fait alors appel à l’esprit de croisade et, grâce au soutien des chevaliers des pays du nord, principalement des Francs, écrase les nouveaux envahisseurs en 1212 à Las Navas de Tolosa.

Les villes restant aux mains des musulmans tombent les unes après les autres : Cordoue (1236), Carthagène (1243), Jaén (1246), Séville (1248) etc... Il ne reste aux musulmans que le royaume de Grenade qui, à son tour, tombera en 1492, pris par Isabelle la Catholique.

 

Quand tout semble perdu, comme à l’aube du VIIIème siècle pour les Espagnols, la «Reconquista» nous apparaît comme une leçon offerte. Avec le temps, armé de l’esprit de résistance, il n’est de peuple dont la souveraineté soit irrémédiablement perdue.


Jean Isnard

 

Notes


(1) 1160 à 1233, a vécu en Mésopotamie et en Palestine.
(2) Abdel Melik ben Abdel Wahid Ben Moghit.
(3) Khalifat en arabe. Historiquement, le chef suprême, religieux et politique, des musulmans.

Centre de Recherches sur le Terrorisme depuis le 11 septembre 2001
www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

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