décembre 2009
Depuis quelques semaines, on entend parler de la révolte des Houthis au Yémen. En sédition depuis 2004, les Houthisse sont donné le nom de leur ancien chef tué au combat, Hussein Al-Houthi. De religion zaydite, une branche du chiisme, ils constituent 40% de la population du nord du pays. Ils sont une arme dans les mains du pouvoir iranien qui cherche à déstabiliser les États sunnites du Moyen-Orient. |
« Yémen » vient du mot « félicité », en arabe. Cest lancienne « Arabia Felix » des Romains. Ses montagnes arrêtent les pluies de la mousson arrivant de locéan Indien, et arrosent un sol fertile. Depuis lantiquité, on y cultive l'arbre dont on tire lencens, utilisé dans toutes les religions, et la myrrhe, base de parfums. Lexportation de ces produits a été autrefois la source de la richesse dun pays très différent du monde de bédouins du reste de la péninsule arabique. Très tôt une civilisation originale se développa au Yémen sous lautorité des « mukarrib », prêtres dune religion mal connue. Mais, à la fin du Vème siècle av. J-C, une dynastie juive subjugue le pays et, sous le nom de rois de Saba, force la population au judaïsme (1). Ce royaume va jusquà étendre son influence sur lAbyssinie (actuelle Éthiopie), alimentant lhistoire très romancée de la « Reine de Saba », qui aurait rencontré le roi des Hébreux, Salomon. Avec lapparition du christianisme dans la région, une période conflictuelle éclate entre les deux religions bibliques. Au Yémen, les juifs persécutent les chrétiens. En 523, leur communauté est massacrée à Najran par un souverain juif (2). En réponse, soutenu par lempire de Byzance, lÉthiopie, devenue chrétienne, occupe le Yémen. En 570, lempereur de Perse, Khosrô, sempare du Yémen, le réduit à létat de satrapie et introduit sa religion, le zoroastrisme. Mais, dès le VIIème siècle, le Yémen se donne à lislam. Néanmoins, soumis en titre au calife, il garde son autonomie. De petites dynasties locales divisent le pays. Trouvant dans les montagnes et léloignement du calife le moyen déchapper aux persécutions sunnites, plusieurs sectes chiites sinvitent alors au Yémen. Ainsi, les qarmates (3) prennent pied au nord de Taizz et les ismaéliens (3) dans le sud-est du pays. Puis, autour de Saada, on assiste au IXème siècle à linstallation dune monarchie indépendante dinspiration zaydite (3) sous lautorité de Yahia Ibn Al-Husayn. Celle-ci instaure le règne des imams qui, selon la tradition chiite, sont héréditaires et se veulent descendant dAli, à la fois cousin et gendre de Mahomet et 4ème calife de lislam. Certes, à lautorité des califes de Bagdad, succédera celle des Ayyubides dÉgypte (1228 à 1446), puis des Ottomans (à partir du XVème siècle). Mais les imams zaydites font preuve dune remarquable opiniâtreté. En dépit de plusieurs interruptions, liées aux aléas des guerres et des révoltes, ils gouverneront à Sanaa jusquà lindépendance. Au lendemain de leffondrement de lempire ottoman, après la Première Guerre mondiale, limam Yahya Al-Mutawakkil doit combattre larmée du roi Abdelaziz dArabie Saoudite qui cherche à annexer la principauté zaydite. Cette dernière perdra néanmoins la région de lAsir, laissant de lamertume dans la relation entre Riyad et le Yémen. Au sud, en revanche, les imams zaydites resteront retenus par les frontières qui les séparent du protectorat dAden, sous autorité britannique. En 1962, cependant, éclate un putsch militaire mené par le colonel Sallal. Cest la fin du règne des imams. Puis, le 30 novembre 1967, devenue colonie britannique, Aden accède à lindépendance. Cest la naissance de la République populaire du Yémen du Sud, aligné sur Moscou, face au Yémen nord, plus proche de lOccident. Lanimosité entre les deux Yémen ira jusquà déclencher une guerre en février 1979, suivie de nouveaux affrontements en 1981 et 1982. Il faudra attendre 1990 pour que la réunification mette fin aux tensions. Mais, aujourdhui, attisant les frustrations chiites, lanimosité à légard de lArabie Saoudite et lextrême pauvreté de la population, lIran manoeuvre pour mettre le feu aux poudres. Jean Isnard Notes (1) Daprès le «
Dictionnaire encyclopédique du judaïsme »,
collection Bouquins. |
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