Il y a vingt ans, les derniers membres d'Action directe étaient interceptés. La France traversait alors une vague de terrorisme comme elle n'en avait jamais connue. Ici, Denis Gorteau met en évidence une inquiétante hypothèse à propos de l'Iran. Ceci nous suggère d'apprendre à apprécier la réelle menace émanant de ce pays, s'en gardant, sans l'exagérer, ni la provoquer. | ||||
20 ans après En
février 1987, le groupe terroriste français d'extrême
gauche Action Directe était démantelé par
la police, à l'initiative de Charles Pasqua alors ministre
de l'Intérieur. Le groupe, qui ne comptait plus qu'une
dizaine de membres, est alors mis hors d'état de nuire. Des questions se posent : Pourquoi cette dérive meurtrière quand, à l'époque, l'extrême-gauche se décompose ? Comment le groupe a-t-il choisi ces cibles ? Et surtout, dans quel but a-t-il commis ces crimes ?
De 1977 à 1979, le groupe passe à la " guérilla urbaine ". Les premières actions violentes ont lieu (mitraillage du siège du patronat, de ministères, de bâtiments de l'armée française, etc...) dirigées contre les symboles du pouvoir politique ou économique. Néanmoins, aucune victime n'est à déplorer malgré les dizaines d'actions menées. Dans l'atmosphère de l'après 68, Action Directe n'est pas seule à s'inscrire dans cette logique de " sabotage du capitalisme " et quelques grouscules n'hésitent pas à se servir des cocktails Molotov. La plupart se contente dans les faits de débats théoriques abscons, associés parfois à des actions plus proches du vandalisme que du terrorisme. A cette époque, en France, des membres de ces mouvances d'extrême gauche, seules les "Brigades Internationales" (groupe d'inspiration maoïste) ont assassiné : un colonel uruguayen en 1975 et l'ambassadeur de Bolivie à Paris en 1976. L'année 1981 marque cependant un tournant. La plupart des chefs de l'organisation ayant été arrêtés, Action Directe décide de suspendre ses actions le temps des élections présidentielles. Une fois élu, François Mitterrand gracie ces prisonniers dits politiques en échange d'un arrêt de la lutte armée. La majorité des militants accepte l'offre du pouvoir, mais quelques uns restent néanmoins actifs et décident de coordonner leurs actions avec d'autres organisations d'extrême-gauche et des groupes de militants étrangers (essentiellement européens et turcs).
Néanmoins, pourquoi Georges Besse et non pas un autre capitaine d'industrie confronté au problème du licenciement d'une partie de ses employés ? Nous pensons à une piste iranienne. Au milieu des années 80, loin du folklore de Mai 68, des agents iraniens frappent la France. On sait, à l'époque, le soutien de la France à l'Irak de Saddam Hussein, en guerre contre l'Iran, la cause de ces tentatives de déstabilisation. A la même période, la jeune république islamique cherche aussi à pousser Paris à honorer un contrat nucléaire signé entre l'Iran du Shah et la France. En effet, la France s'était engagée en décembre 1974 à aider le monarque à mettre sur pied son programme nucléaire. Jacques Chirac, alors premier ministre de Giscard d'Estaing, s'était rendu en Iran et avait engagé notre pays à livrer 10 % de son uranium enrichi à ce pays. En échange, ce dernier entrait dans Eurodif, consortium européen chargé de l'enrichissement de l'uranium. Or, Georges Besse était alors président d'Eurodif. Cet accord était unilatéralement dénoncé par la France à la suite de la révolution islamique de 1979. L'Iran n'en cessait pas pour autant de faire valoir ses droits. Notre pays faisant la sourde oreille, en 1986, Paris était la cible de plusieurs attentats. La même année, Georges Besse était assassiné, alors que, dans le même temps, il s'opposait à la reprise des livraisons d'uranium à l'Iran. Mais dès la fin de l'année 1986, la France et l'Iran renouaient des relations. En 1991, l'Iran redeviendra même pleinement actionnaire d'Eurodif. Entre temps les attentats cessaient et les otages français au Liban retrouvaient la liberté. Dès lors, que faut-il penser de la mort de Georges Besse ? Les prisonniers d'Action Directe ont toujours nié l'interprétation des faits suggérée plus haut. Ils peuvent cependant avoir été manipulés. Les Iraniens sont experts en la matière. En outre, Action Directe coopérait déjà depuis des années avec d'autres groupes armés sévissant au Moyen-Orient, dont certains étaient en relation avec l'Iran. Denis Gorteau |
Lire dans brèves la déclaration des parents d'Hélène Castel, une ancienne d'Action Directe