LE PRIX DE NOTRE DÉROBADE AFGHANE

juin 2013

Les 30 et 31 mars, le Président Hamid Karzaï s’est rendu à Doha, la capitale du Qatar. Il devait rencontrer une délégation des Taliban dont quelques-uns constituent une cellule diplomatique hébergée par l’émirat pour faciliter les négociations. Karzaï n’a pas obtenu la rencontre souhaitée.

Il faut savoir le Pakistan pesant d’un poids redoutable sur les Tabiban afghans auxquels il assure la base arrière tout en restant alliés avec les États-Unis. C’est à une partie de poker menteur que se livrent les deux pays.

Or, le Pakistan veut tirer le plus possible de la géopolitique régionale comme du retrait des forces de l’OTAN d’Afghanistan. Il veut la rupture des relations entre l’Afghanistan et l’Inde, son ennemie, l’exclusivité de la formation des officiers afghans dans ses académies militaires et un partenariat stratégique signé par Kaboul. Karzaï refusant, le Pakistan bloque les négociations.

Or, derrière le Pakistan, il y a la Chine. Elle entretient des relations avec tout le monde dans la région : les gouvernements iranien, pakistanais, afghan et même avec les Taliban. Grâce à l’ISI, les services secrets pakistanais, elle a eu plusieurs entrevues avec ces derniers. Elle a surtout concrétisé ses relations avec des accords militaires et économiques pour s’assurer du pétrole et du gaz d’Iran, des minerais d’Afghanistan, en particulier le cuivre d’Aïnak, et a ouvert une base navale pour ses bateaux de guerre dans le port pakistanais de Gwadar qu’elle a construit.

Sur le moyen terme, elle compte prolonger la route de Karakorum qui, franchissant la frontière chinoise de l’Himalaya, entre au Pakistan. Elle veut ouvrir une voie ferrée et des pipe-lines reliant Gwadar à l’Iran et envisage une autre liaison ferrée à partir de ce pays à travers l’Afghanistan et le Tadjikistan*.

La situation est grave pour les Occidentaux. Après le départ de leurs troupes d’Afghanistan, la Chine deviendra la puissance tutélaire de la région. Or, le Golfe arabo-persique détient 60% des réserves mondiales de pétrole et 40% des réserves de gaz. Les États-Unis, mais encore plus l’Europe dépendent de ces approvisionnements.

En d’autres termes, quittant l’Afghanistan nous allons dépendre de la bonne volonté de la Chine pour une grosse partie de l’énergie que nous consommons. Soyons en sûr, nous allons en payer le prix politiquement, économiquement et même militairement. Ce sera le coût de nos erreurs politiques, stratégiques et tactiques en Afghanistan, plus encore de notre manque de détermination à gagner la guerre.

Note

* Voir « Les Chinois prêts à remplacer les États-Unis en Asie du sud » .

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

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