DE DEUX OTAGES ESPAGNOLS La manipulation des services marocains |
septembre 2010
Le 24 août 2010, Albert et Roque Pascual, deux Espagnols retenus au Mali, par lAQMI (Al Qaïda au Maghreb), depuis 268 jours, sont arrivés à Barcelone. Leur collègue, Alicia Gamez, avait été libérée en mars. En échange, selon le quotidien « El Mundo », les autorités de leur pays ont, dune part, versé une rançon de 3,8 millions deuros. Dautre part, elles ont demandé et obtenu de la Mauritanie lextradition vers le Mali dun citoyen de ce pays, condamné à douze ans de prison pour lenlèvement des trois Espagnols : Omar Ould Sid Ahmed Ould Hama, alias Omar El Sahraoui. Dans un article précédent, nous avons mis en exergue les relations étroites entretenues par les services algériens et lAQMI. Cette relation semblait recevoir une nouvelle preuve à la mi-août, quand Al-Arabiya, chaîne de télévision satellitaire en arabe, « révélait » lappartenance dOmar El Sahraoui au Polisario. On sait en effet le Polisario, né en 1973 et luttant pour lindépendance du Sahara occidental, sous linfluence des services algériens. Il semblait logique quOmar El Sahraoui, sil était membre du Polisario, ait aussi travaillé pour lAQMI, les deux organisations entretenant des liens avec les SR algériens. Recherchant lorigine de linformation, on sapercevait quelle avait transité par le journal espagnol ABC... le 12 avril 2010. Certes, elle avait été démentie le 15 avril par le Polisario lui-même, mais nétait-ce pas après tout lintérêt de cette organisation que de démentir une relation avec Al-Qaïda. Cest une structure espagnole « Inteligencia, espionaje y servicios secretos » qui a découvert le pot aux roses. Le 25 avril, il disait dans un communiqué en espagnol : « Les services de renseignements marocains ont lancé une consigne : lier le Front Polisario au terrorisme pour justifier lannexion du Sahara occidental par le Maroc. Problème, continue le document, lAQMI ne favorise pas les intérêts » du Polisario. Linformation de la structure espagnole se voyait confirmée, tous les bulletins et officines proches du Maroc insistant sur la prétendue relation entre lAQMI et le Polisario, tout en citant comme « source » ABC. Pourtant, le journal espagnol amputait rapidement son article de la référence au Polisario sur son site Internet. Le 25 août, quatre mois plus tard, cela nempêchait pas « Maghreb Intelligence », site dinformation basé au Maroc, de déclarer à nouveau Omar El Sahraoui un ancien du Polisario. Cette affaire est révélatrice des manipulations auxquelles se prêtent les services de renseignements, en loccurrence marocains et algériens, pour téléguider les organisations armées ou déguiser la vérité à laide dinformations fabriquées. Nous avons vu les services américains se livrer au même sport de la manipulation des infos en Irak. Quant aux Français, ils ont sans doute épuisé leur quota pendant la guerre dAlgérie. Le travail des journalistes consiste à réfléchir, enquêter, vérifier et revérifier. Encore peuvent-ils se tromper ou se faire piéger. Ce qui est arrivé à ABC hier, à Al-Arabiya aujourdhui. |
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