Liban : polémique
inter chrétienne sur la Syrie

octobre 2011

Le 5 septembre, le nouveau Patriarche maronite, Béchara Raï, rencontrait Nicolas Sarkozy et le Premier ministre François Fillon à Paris. La discussion entre le Président français et le chef religieux de la principale communauté chrétienne du Liban ne s’est pas déroulée sous le signe de l’entente cordiale.

Se basant sur les interviews qui ont accompagné la visite de Raï en France, Sarkozy a invité les chrétiens du Liban à se préparer à un nouvel ordre en Syrie. Son interlocuteur lui aurait répondu en substance : « Toute escalade de la crise en Syrie conduira à l’établissement d’un régime plus dur encore que l’actuel, comme l’imposition de la loi des Frères musulmans, et les chrétiens en paieront le prix ».

Il faut admettre que le risque d’une émergence des Frères musulmans n’est pas à exclure. Mais faire de cette hypothèse une certitude après la chute des Assad, est une erreur. La masse des manifestants en Syrie n’est en effet en rien contrôlée par les Frères. Seule la colère l’anime.

Il y a plus grave : hypnotisé par son interprétation des faits, Raï en vient, implicitement, à suggérer de défendre le régime en place en Syrie contre la volonté, semble-t-il, de la majorité des Syriens. Sans surprise, Michel Aoun, allié du Hezbollah, lui-même allié de Damas, a applaudi les propos du Patriarche en ajoutant : « La chute du régime en Syrie n’est dans l’intérêt ni des chrétiens, ni des musulmans ».

La plus grosse partie des leaders de la communauté chrétienne a répondu vertement à Raï. Le chef du parti chrétien des Forces libanaises, Samir Geagea, par exemple, a déclaré dès le 6 septembre : « Si la présence chrétienne (en Orient) doit être celle d’un troupeau de moutons, si c’est d’aller se cacher dans les replis des pantalons de dictateurs, je n’en veux pas personnellement... elle ne sert alors à rien ». La réaction d’un homme de conviction.

Mais il y a plus grave. Sarkozy aurait invité Raï à soutenir le maintien des réfugiés palestiniens au Liban. Une idée qui répugne à tous les Libanais. Le Patriarche, avec raison cette fois, se serait un peu emporté. Accepter la présence des Palestiniens au Liban revient en effet à consacrer une purification ethnique intolérable.

En revanche, quand, sur la chaîne Al Arabiya, le prélat s’est déclaré en faveur du maintien des armes du Hezbollah jusqu’au « retour des Palestiniens dans leurs foyers et la libération de la terre », il a servi la soupe au parti chiite.

Il est complexe de critiquer un camp sans se rallier aux thèses de son adversaire. Raï ne semble pas à la hauteur de la difficulté.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

Lire aussi: Appel aux chrétiens du Liban et de la région pour un monde arabe nouveau, pacifié et démocratique

 

Retour Menu
Retour Page Accueil