La contre-attaque des lobbyistes |
janvier 2011
Lélection de Barack Obama, le 4
novembre 2008 à la Présidence des États-Unis,
avait suscité beaucoup despoir. Lespoir que
la Maison Blanche pèserait enfin dun poids décisif
pour obliger Israël à concéder une paix accompagnée
daccords tolérables pour les Palestiniens, ou au
moins pour la majorité dentre eux. Soyons clairs,
chez les Américains, comme ailleurs, il ne sagissait
pas de faire justice aux Palestiniens, mais dannihiler
la principale motivation idéologique sur laquelle sappuie
le terrorisme islamiste. Le 4 juin 2009, le discours du Caire
allait dans ce sens. On avait entendu Obama dire : « Les
États-Unis nacceptent pas la légitimité
de la continuation de la colonisation israélienne... Il
est temps quelle sarrête ». Fin novembre,
il arrachait un gel des colonisations sur les territoires palestiniens
pour une période de dix mois. Puis les choses à
nouveau traînaient. A lautomne 2010, les pressions
de Washington saccentuaient sur le gouvernement israélien.
Pressions dautant plus fortes que la période de
gel des colonisations étant arrivée à son
terme, les ultras israéliens réclamaient son annulation.
Obama, pour sa part insistait pour son maintien. Le 12 novembre,
Benyamin Netanyahou était aux États-Unis pour tenter
dassouplir la position de la Maison Blanche. À peine
sortait-il du bureau dHillary Clinton, que la radio israélienne
annonçait le lancement dun programme de 230 logements
juifs à Jérusalem-Est, en pleine zone arabe. Semble-t-il,
il avait été débordé par plus extrémistes
que lui au sein du gouvernement *. Une manière de le mettre
au pied du mur, mais aussi un camouflet pour Obama. En tout cas,
Natanyahou, nannulant pas le programme des 230 logements,
en avalisa lexécution. Côté palestinien
on déclarait ne plus pouvoir se rendre à la table
de négociations dans ces conditions. Comment allait réagir
le chef de lexécutif américain ? Depuis quelques semaines, on assistait à une avalanche de démissions parmi ses proches. Le 8 octobre, le général James Jones, son conseiller à la Sécurité nationale, avait remis son tablier. Au Pentagone, Robert Gates, son secrétaire dÉtat à la Défense, et lamiral Mike Mullen, son chef détat-major interarmes, avaient eux aussi annoncé leur intention de partir. Lawrence H. Summers, son directeur du Conseil économique national, prenait aussi la tangente sous prétexte de se présenter aux élections à la mairie de Chicago. Au cours de lété, deux autres membres de léquipe économique sétaient volatilisés : Peter Orszag, le directeur du Budget, et Christina Romer, la présidente du Conseil économique de la Maison Blanche. Enfin, plus significatif que nimporte quel autre symbole, Rahm Emanuel, juif né en Israël, collaborateur dObama depuis sa campagne aux sénatoriales en 2004. Un repli dur à vivre car Emanuel, en plus dun collaborateur, était un ami avec lequel il croyait partager une vision commune de la politique internationale. Il faut le constater, tous les démissionnaires entretenaient des liens plus ou moins forts avec Israël, ne serait-ce que par lintermédiaire de réseaux dassociations, damitié ou dappartenance. Aussi, si léquipe dObama avait tenu face aux réformes bancaires et sociales, elle se lézardait quand il sagissait de faire preuve de fermeté face à lÉtat hébreu. Les attaquants allaient du reste se dévoiler et « Haaretz », journal israélien, vendre la mèche. Dans son édition du 22 octobre 2010, il révélait que le parti républicain avait bénéficié au cours de la dernière année dune aide importante de Sheldon Adelson, un homme daffaires de Las Vegas, pour sopposer à la politique dObama. Or, placé parmi les dix plus grands donateurs du parti, Adelson nest pas nimporte qui : de religion juive, il est un ami et un soutien politique de Benjamin Netanyahu. Le journal israélien commentait : « Quoi de plus naturel que lun des opposants les plus déterminés (à Obama) soit lun des meilleurs amis du Premier ministre israélien ». Vu de Jérusalem, en effet ! Il faut mesurer limportance de cette offensive à léchelle planétaire. Dans le « Nouvel Economiste » du 21 octobre, connu des milieux nationaliste, mais néanmoins discret soutien à Israël, Xavier Raufer envoyait quelques torpilles de plus contre le vaisseau Obama. « En matière de sécurité globale, écrivait-il, même de fidèles alliés, mêmes des amis proches sinquiètent désormais ouvertement de lAmérique de Barack Obama ». Or le Président en place ne fait quhériter du désordre créé par Bush. « La confusion qui règne à la Maison Blanche, insistait-il, freine lélaboration et la mise en oeuvre de toute stratégie pertinente et durable ». Certes, « Le Nouvel Economiste » nest pas une publication de référence. Mais, à son niveau, Raufer sefforçait de répandre la mauvaise nouvelle : Obama nest bon à rien. Il avait néanmoins la prudence de ne pas dire la cause de ce rejet : la menace que représentait lactuel Président des États-Unis pour la stratégie conquérante dIsraël. André Kaspi, par ailleurs écrivain et spécialiste
de lhistoire des États-Unis, appartient lui aussi
à cet environnement qui soutient Israël avec ferveur.
Interviewé dans « Actualité Juive
» du 28 octobre dernier, il disait sur un ton faussement
détaché : « Je crois que Barack Obama
sest fait beaucoup dillusions quand il est arrivé
au pouvoir. Il a cru quil pourrait sattaquer directement
au conflit israélo-palestinien, contrairement à
ses prédécesseurs qui avaient attendu la fin de
leur mandat ». Le 8 décembre, linformation tombait comme un couperet : la Maison Blanche renonçait à obtenir le gel des colonies juives en territoire palestinien. Faut-il sen étonner ? Les lobbyistes avaient gagné. Mais Obama, en cédant, avait manqué sa chance de réduire la cause principale du terrorisme islamiste : la colère générée par larrogance dIsraël. * Voir « Les courants adverses au sein de lautorité israélienne ». |
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