A Washington, on balance. Dune part, pour avoir assassiné des Américains, il y a les partisans dune belle vengeance contre les Moujahidine-e-Khalq. De lautre, les pragmatiques, tentés de renvoyer larme du terrorisme à certains maîtres de lart à Téhéran. Autrement dit, dutiliser les compétences des Moujahidine-e-Khalq contre lIran. Cette dernière tendance semble bien lemporter. |
En juillet 1999, numéro deux dans lorganigramme des Moujahidine-e- Khalq (MEK), Maryam Rajavi (ou Radjavi) sest rendue à plusieurs reprises à Alger. En la présence dun officier de la CIA qui se faisait appeler "colonel Hank," elle a participé à des réunions avec les généraux qui gouvernent en sous-main lAlgérie. |
Arrivée la première fois de Paris sur Air-Algérie, pour ses autres visites Maryam Rajavi louait un avion privé et atterrissait à laéroport militaire de Boufarik. Khalida Messaoudi, députée au Parlement algérien et égérie du régime, venait la chercher en voiture blindée avec escorte. Avec Maryam Rajavi, participaient aux réunions de travail les généraux Toufik Médiene (chef des renseignements), Mohamed Lamari (chef détat-major) et Smaïn Lamari (chef du contre espionnage). On remarquait aussi la présence dun colonel égyptien et dun général tunisien. A la suite de ces rencontres, des petits groupes du MEK se sont rendus en Algérie à Beni-Messous (pour se former à lespionnage), à Ben Aknoun (pour les communications codées), à Skikda et à Bejaïa (pour lentraînement de nageur de combat), à Biskra enfin (pour sentraîner au parachutisme). Le "colonel Sadegh," du MEK, assurait la liaison sur place. il était logé en permanence dans une villa de Ben Aknoun. Il se vantait davoir participé à lattentat du 28 juin 1981 à Téhéran (72 morts). La présence du "colonel Hank," de la CIA, établissait déjà la collusion entre les États-Unis et une organisation terroriste (1). Pourtant, le MEK figure en 19ème position sur la liste des organisations terroristes, aujourdhui 33 répertoriées. Ce document est publié tous les deux ans par le Département dÉtat et, le 27 mars 2002, Colin Powell en personne a renouvelé larrêté. Or, une loi, promulguée à Washington en 1996, interdit aux citoyens américains "de fournir une aide financière ou autre aux organisations terroristes." En outre, leurs membres ne peuvent recevoir de visas pour les États-Unis. Pourtant, Alireza Jafarzadeh, représentant officiel du MEK, jouit dun permis de séjour aux États-Unis. Mieux, sous le nom de "National Council of Resistance of Iran," et de "People Mojahedin of Iran," il a ouvert deux bureaux dans les locaux du très honorable Club de la Presse à Washington, au numéro 529 de la 14ème Rue. |
POUR COMPRENDRE Depuis le début du soulèvement islamiste en Algérie, les Américains soutenaient discrètement cette dernière la jouant gagnante contre le pouvoir en place. Mais, fin 1997, ils arrêtaient Anouar Haddam, représentant du FIS et du GIA à New York. Il était pourtant jusque-là leur protégé et avait ses entrées au Département dÉtat. Puis les affaires commençaient à pleuvoir. Les États-Unis devenaient les fournisseurs privilégiés de larmée algérienne et obtenaient onze contrats dexploration pétrolière quand la France nen décrochait que deux. LAlgérie, avec dautres pays du Maghreb, était devenue un nouveau point dancrage de la CIA et de laxe passant par les services de renseignements dIsraël. |
Il y a trois ans, les services américains dimmigration arrêtaient Mahnaz Samadi, une jeune iranienne, à la frontière du Canada. Activiste du MEK et depuis plusieurs années réfugiée politique aux États-Unis, dans son dossier elle avait omis de parler de ses activités au sein de lorganisation. Entre autres choses, les policiers lui reprochaient un séjour de sept mois en Irak dans un camp dentraînement militaire classé terroriste par ladministration. John Ashcroft, sénateur du Missouri et ancien procureur général, prit laffaire à cur. Dans une lettre adressée le 10 mai 2000 au service de limmigration, il qualifiait Samadi de "militante des droits de lHomme" et voyait en elle "une puissante voix pour la défense de la démocratie." A la suite de cette intervention, la jeune femme a reçu lautorisation de demeurer aux États-Unis. Or John Ashcroft (2) nest pas nimporte qui. Très proche de Georges W. Bush, il partage avec lui des convictions extrémistes protestantes. Plusieurs dizaines de parlementaires américains soutiennent ainsi le MEK. Parmi eux, Chris Bond, sénateur républicain comme Ashcroft, mais aussi Bob Torricelli, sénateur démocrate, qui voit dans le parti de Massoud Rajavi "une légitime alternative à la répression des mollahs iranien." Le MEK a pourtant à son actif une longue liste de crimes. On estime à une dizaine de milliers le nombre des victimes, depuis 1979, des affrontements entre le MEK et lÉtat iranien. La violence de la répression nexplique pas tout. Le 31 janvier 1971, Ahmed Rezai, lun des chefs du MEK, commettait le premier attentat suicide, imité depuis par une trentaine dautres candidats à la mort violente. Le MEK sest aussi fait une spécialité des tirs de mortier contre des bâtiments officiels. Depuis le 2 juillet 1998, en raison de leur imprécision, ce type dattaques a fait des dizaines de morts et des centaines de blessés dans la population. |
Mohamed Lamari Massoud et Maryam Rajavi Khalida Messaoudi John Ashcroft AliReza Jafarzadeh MEK, attentat à la bombe contre un bureau de l'admnistration, Téhéran février 1998 |
(1) Renseignements obtenus auprès dune source militaire algérienne.
(2) Sur John Ashcroft, voir larticle de Michael Isikoff dans "Newsweek" du 26 septembre 2002.
En mai 2005 l'organisation Human Rights Watch a rédigé un rapport accablant sur les Moujahidine du peuple d'Iran (MEK) ou OMPI des Rajavi. Ils sont accusés de torture, séquestrations et mauvais traitements contre leurs propres membres.
Lire: Brûlé Vif, entre Marx et Mahomet, Enquête sur les Moujahidine du peuple d'Iran
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