Les humanitaires pavent l’enfer de bonnes intentions

décembre 2011

Le 29 septembre 2011, une table ronde se tenait au CAPE (1) sur le thème : « Libye : une guerre humanitaire »

La rencontre était organisée par la mouvance des ONG à vocation humanitaire avec la participation de Rony Brauman, proche de MSF mais défendant un point de vue qu’il veut personnel, Hasni Abidi, politologue basé à Genève, Boris Michel, pour le CICR, et Véronique Gaymard, journaliste à RFI, qui jouait le rôle de modératrice.

La salle était principalement formée de représentants des ONG, en nombre bien moindre de quelques journalistes.

Brauman a condamné avec fermeté la notion de guerre humanitaire, soutenue en revanche par Abidi. Ce dernier a été jusqu’à affirmer les interventions, principalement occidentales, au Moyen-Orient, porteuses d’améliorations. Dans son aveuglement, il a été jusqu’à se féliciter « de l’introduction de la démocratie en Irak », allant jusqu’à oublier les 200 morts par mois tués dans des attaques terroristes, l’exil de la moitié des chrétiens, les assassinats politiques etc...

Michel, en parfait représentant du CICR s’est perdu en considérations juridiques qui réduisent, comme nous l’avons vu sur le terrain, l’efficacité de cette organisation. Il a néanmoins conclu que toutes ces « guerres, dites humanitaires », sont en réalité des opérations politiques.

La salle était divisée, certains allant jusqu’à critiquer les nombreuses violations des Résolutions 1970 et 1973 du Conseil de Sécurité, sur lesquelles se sont appuyées les pays intervenants, principalement la France et la Grande-Bretagne (2).

D’autres, tombés sous le charme de la propagande officielle ne voulaient voir qu’une fantastique impulsion vers la démocratie qu’apporterait l’Occident à « des peuples écrasés par les dictatures ».

En filigrane, c’était bien « le droit d’ingérence », prôné par Bernard Kouchner, qui était mis en cause.

Un certain Philippe a été jusqu’à évoquer la nécessité de réfléchir à l’activité des ONG dans le cadre des interventions humanitaires. En clair, aux côtés des opérations militaires comme celle menée en Libye. Brauman, avec à propos, lui a fait remarquer que poser la question était déjà accepter ces interventions.

On sent chez une partie des humanitaires les effets de l’action de l’OTAN. Au printemps 2010, nous avions assisté à une conférence à l’IHEDN au cours de laquelle des officiers généraux français exposaient la stratégie de l’Organisation Atlantique dans le cadre de « L’Approche globale ».

Complètement inféodés à Washington, les intervenants suggéraient d’associer les ONG à l’OTAN afin de les rendre plus efficaces et d’assurer l’harmonisation des actions militaires et humanitaires.

Le 29 septembre, au CAPE, on a senti la progression de cette méthodologie chez plusieurs personnes.

Le plus surprenant reste néanmoins Gaymard. Sortant de son rôle de médiatrice, elle a été jusqu’à imputer une certaine responsabilité des pays européens dans les agressions perpétrées par les Libyens contre les migrants africains de race noire. Pour elle, puisqu’ils sont de passage en Libye et aspirent à entrer en Europe, nous leur éviterions des sorts funestes en leur ouvrant nos portes.

Il serait temps, nous semble-t-il, de se pencher sur la mouvance humanitaire, devenue un acteur politique essentiel. Échappant à tout contrôle, subissant des influences diverses et manquant souvent de profondeur de réflexion, elle risque de devenir un véritable danger.

Notes

(1) Centre d’Accueil de la Presse étrangère. Financé par l’État français il présente néanmoins des opinions différentes. Les rencontres sont organisées en conférences de presse.
(2) Depuis le mois de mars 2011, nous avons rédigé plusieurs articles, dans pour dénoncer ces violations

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

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