HISTOIRE
Naissance de l’Empire ottoman

On a souvent une vision déformée de ce qu’est la Turquie en la réduisant à l’actualité : un pays musulman, en voie de développement et producteur d’une forte immigration. Son Histoire en fait pourtant bien autre chose. Après les vagues d’Indo-européens, en grande partie nos ancêtres partis de la steppe russe, et de Sémites surgis de la péninsule arabique, plusieurs millénaires avant Jésus-Christ, apparurent, au cours des premiers siècles de l’ère chrétienne, les Mongols et les Turcs, populations asiatiques venues du nord-est du continent jaune. Nomades et guerriers, comme leur prédécesseurs, ils n’eurent de cesse de se bâtir des empires, ajoutant à leur soif de terres celle de s’enrichir du bien des populations sédentaires au cours de raids sanglants. Nous avons subi leur rudesse au Vème siècle, quand les Huns d’Attila violèrent l’espace de la Gaulle. Après avoir pénétré à plusieurs reprises le pré carré chinois, les Turcs commencèrent à déferler sur l’Asie centrale à partir du VIème siècle. Dans un premier temps, au VIIème siècle, la percée arabo-musulmane stoppa leur progression. Pas longtemps, offrant leurs services en tant que mercenaires aux monarchies islamisées, ils se convertirent pour le plus grand nombre à la nouvelle religion. Renversant alors le
pouvoir, comme en Iran, ils reprirent leur avance, au nom de l’islam, cette fois, mais en gardant leurs motivations
premières, auxquelles les théories du djihad offraient l’alibi de la religion.

Déjà islamisée, l’une de ces tribus turques, au XIIIème siècle, fuyant la pression mongole, abandonna le Khorasan (1), où elle s’était installée. Elle prit position au sud de Nicée, dans une Anatolie dont l’Empire byzantin avait déjà perdu la plus grande partie, sous les coups des Seldjoukides, une dynastie turque qui s’était imposée de l’Iran à la Syrie.

Servant les plans de leur souverain, les nouveaux venus furent employés à lancer des raids contre les frontières de Byzance. Puis, à la mort du sultan seldjoukide régnant sur la région, leur chef, Osman 1er, prit le titre de bey, se déclara indépendant et, privilège normalement du calife, fit dire la prière en son nom. La tribu, augmentée de recrues avides de butin, se donna le nom de l’ambitieux, Osmanlis, qu’en Occident on appelle Ottomans.

Commençait une grande aventure. Sans que cessât le harcèlement contre Byzance, le fils d’Osman 1er , Orhan Gazi, crée une véritable armée et lance les bases de l’État. Puis il pénètre dans l’Europe balkanique, multipliant les raids, tout en éliminant une à une les autres monarchies turques implantées en Anatolie. En 1354, il s’empare de Gallipoli, du côté européen du détroit des Dardanelles.

L’avancée des Ottomans est devenue irrépressible. Fils de Orhan, Mourad 1er soumet les Bulgares (1388) et écrase les Serbes (1389). Pour éviter un risque de coup d’État, il inaugure la tradition de l’assassinat des cadets du sultan, en faisant étrangler son frère. Un moment retenu par l’expansion de Tamerlan, un Turco-mongol, les Ottomans s’emparent de Constantinople, future Istanbul, le 29 mai 1453. A la fin du siècle, le jeune empire ottoman a éliminé les derniers bastions byzantins. Il domine l’Anatolie et les Balkans.

Il se tourne alors contre le Moyen-Orient. Il prend à la Perse le Haut-Euphrate en 1514. Puis s’empare de l’Égypte, de la Syrie et des villes saintes islamiques d’Arabie, en 1516. Selon la tradition, retenu prisonnier, avant de mourir, le dernier calife arabe aurait abandonné ses droits de chef religieux du monde musulman au sultan ottoman Süleyman le Magnifique. Compte tenu du rapport de force et des moeurs, on peut imaginer cette passation de droit légèrement différente.

Süleyman donne alors la plus grande extension à l’Empire. Après plusieurs batailles, il annexe la Hongrie en 1541, s’empare de l’île de Rhodes (1522), de la Mésopotamie (actuel Irak) en 1555. Sur la mer, ses corsaires, commandés par Barberousse, menacent les lignes commerciales de l’Europe et ravagent ses côtes, principalement au sud, redonnant vie à une horreur oubliée chez nous : l’esclavage. Seul sujet d’amertume, du point de vue ottoman, en 1529, Süleyman a dû battre en retraite devant les murailles de Vienne.

Le XVIème siècle n’en représente pas moins l’apogée de l’Empire ottoman. Bloqué à l’est par l’Iran, au nord par l’Europe, surtout par l’Autriche et la Russie, ses frontières sont arrêtées, encadrées par d’autres empires. De plus, au sud, sur mer, les Portugais sont très actifs. Cette situation prive l’Ottoman d’un revenu, qui a fait sa richesse et nourri son expansion : le butin de guerre.

Faute de savoir susciter un appareil économique et politique adapté à la paix, l’empire s’engage alors sur la voie de la décadence.

Jean Isnard

Note

(1) Région à cheval sur l’Iran et l’Afghanistan.

 

Centre de Recherches sur le Terrorisme depuis le 11 septembre 2001
www.recherches-sur-le-terrorisme.com

Lire aussi: Puissance et déclin de l'Empire ottoman

 

Retour Menu
Retour Page d'Accueil