VOYAGE VERS L'ENFER

Mourad Benchellali
Editions Robert Laffont

 Un ex-détenu français à Guantanamo témoigne…


"Voyage vers l'enfer,"
Mourad Benchellali,
Editions Robert Laffont,
2006, 280 pages

 

Une troublante naïveté


Mourad Benchellali a séjourné dans un camp d'entraînement d'Al-Qaïda en Afghanistan avant d'être arrêté et livré aux Américains après le 11 septembre. Il a alors croupi 30 mois à Guantanamo. Aujourd'hui, il est libre, blanchi même par la Justice française.

Retour sur une " aventure " au cours de laquelle l'auteur témoigne en permanence de sa naïveté. Que l'on en juge!

Son frère fait de fréquents et mystérieux voyages à l'étranger, son père est arrêté en Bosnie, Ben Laden s'installe en Afghanistan avant le 11 septembre 2001… Cela ne trouble pas Mourad. Et, quand ce frère énigmatique lui propose d'aller " en vacances " en Afghanistan sous un faux nom et avec de faux papiers, le jeune homme ne s'en émeut guère et joue le jeu sans hésiter.

Il déclare se rendre compte de la situation une fois coincé dans un camp afghan d'Al-Qaïda où l'entrainement est exténuant. Quid de son passage à Londres dans une mosquée radicale ? Quid des amis de son frère qui le guident au Pakistan ? Il ne décèle à aucun moment des signes d'extrémisme avant de voir Ben Laden débarquer dans son camp et prêcher la guerre contre les Etats-Unis. Ben Laden, dont il dit tout ignorer à cette époque !

Mourad Benchellali se présente comme un jeune des banlieues, tranquille et peu porté sur la religion. Certes l'enquête témoignera d'une vie ordinaire à Vénissieux (petite amie qu'il va bientôt épouser, petit boulot, voiture d'occasion…), mais comment pouvait-il ignorer à ce point qu'au moins deux membres de sa famille étaient des militants djihadistes ? Qu'il ne fût jamais intégriste ou terroriste est une chose probable, mais comment croire à son aveuglement ?

L'enfer carcéral de Guantanamo

 

Une fois capturé par les Pakistanais et vraisemblablement vendu aux services américains, Mourad et d'autres petits poissons d'Al-Qaïda se retrouvent à Guantanamo, le bagne américain basé à Cuba.

Tout le monde s'accorde pour voir dans cette prison une zone de non droit. Officiellement les accusés ne sont accusés de rien et, trop souvent, se révèlent être innocents. C'est le cas de l'auteur qui affirme sans cesse n'avoir été qu'un " malgré nous " du djihad. D'après lui, la plupart des dizaines d'hommes enfermés à Cuba sont comme lui des malchanceux ou des militants de base de l'organisation de Ben Laden. On peut même se demander si Al-Qaïda n'est pas un agglomérat d'individus manipulés, incapables de faire autre chose que des micro-groupes terroristes. Les attentats de Londres, par exemple, ont mobilisé moins d'une dizaine de personnes).

En tout cas, les conditions de détention à Guantanamo et les interrogatoires incessants sont directement inspirés du système carcéral américain : gardiens brutaux, insultes, punitions arbitraires, privations du minimum nécessaire, tortures psychologiques… Mourad Benchellali a subi les affres d'un détenu américain qui n'a pas les moyens de se payer un avocat de célébrités! Il vaut néanmoins mieux se retrouver enfermé à Guantanamo qu'en Russie ou au Proche-Orient.

Innocent ?


Après avoir surmonté un passage au détecteur de mensonges, par conséquent devenu inutile aux yeux de ses geôliers, l'auteur est remis aux autorités françaises qui l'accusent de participation à une association de malfaiteurs en relations avec une entreprise terroriste. Pourtant, même l'opiniâtre juge
Jean-Louis Brugières finit par considérer le jeune homme innocent de l'accusation portée contre lui. D'autres pourront estimer qu'il n'a pas eu le temps de passer à l'acte, même si depuis son retour personne n'a pu lui reprocher quoi que se soit…

Centre de Recherches sur le Terrorisme depuis le 11 septembre 2001
www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

Lire aussi: La guerre infernale, Le montage Ben Laden et ses conséquences

 

Retour Menu
Retour Page d'Accueil