Ceux qui croient l'islam cause quasi exclusive
du terrorisme, perçoivent plus ou moins consciemment tous
les musulmans comme un danger global. Ils parlent de " guerre
de civilisations, " à la manière de Samuel
Huntington (1)
Cette façon d'interpréter
la réalité conduit à ranger les individus
dans deux camps : d'une part l'Occident, "
civilisé " et déclaré chrétien.
D'autre part l'ensemble musulman, barbare et mauvais.
Les guerres se préparent toujours de cette manière,
les idéologues suscitant une vision manichéenne
du monde et diabolisant celui dont on a décidé
de faire l'ennemi.
Imaginons donc, qu'acceptant cette
manière de voir, et sous prétexte de réduire
le terrorisme, nous partions en guerre contre l'ensemble musulman.
Les Anglo-Saxons ont commencé par l'Irak, nous
sommes aussi en Afghanistan, l'Iran et la Syrie
sont visés, certains, les amis d'Huntington justement,
parlent de l'Arabie Saoudite. D'autres viendront, la Turquie,
par exemple, si son penchant islamiste s'affirmait, ou le Pakistan,
s'il basculait dans le fondamentalisme avec sa bombe atomique.
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Bush à bord du porte-avion
A. Lincoln en mai 2003. Il annonce la fin des combats en Irak.
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Il
faut envisager les conséquences d'une telle guerre.
1/ Provoquant un conflit généralisé,
nous aurions la guerre à l'échelle planétaire.
Les frustrations vécues par les musulmans et le sentiment
de subir l'injustice des grandes puissances seraient exacerbés.
Alors oui, nous entrerions dans une " guerre de civilisations.
"
2/ L'Europe, l'Asie et l'Afrique se couperaient
en deux.
Individuellement ou collectivement,
le choix du camp tendrait à se faire non en fonction de
la nationalité ou des intérêts, mais de la
seule sensibilité religieuse. Cette dernière serait
perçue non comme une croyance mais comme une appartenance
quasi tribale.
3/ En Europe, singulièrement en France,
la guerre civile éclaterait.
Les citoyens assimilés, mais de souche musulmane, suscitant
la méfiance des autres Français seraient exclus
de la société. Aussi, de plus en plus coupés
des milieux musulmans, nos services de renseignements ne pourraient
plus prévenir les attentats dont les projets iraient croissant
en nombre.
4/ Pour faire la guerre, il faudrait réinstituer
la conscription. En dépit
de leurs démographies très faibles, les pays européens
devraient lever des troupes. Nos enfants et nos petits-enfants
iraient combattre en Indonésie ou en Azerbaïdjan.
5/ L'énergie deviendrait plus rare et
plus chère. Dans les
zones de guerre, l'extraction du gaz et du pétrole deviendrait
plus difficile. Leur transport, sujet à des attaques,
serait plus aléatoire. Résultat, nous manquerions
de carburant et celui dont nous disposerions serait réservé
à l'effort de guerre, à nos avions, à nos
bateaux et à nos blindés. Nous serions obligés
de remiser nos voitures et de passer l'hiver dans des appartements
non chauffés.
6/ Nos économies s'effondreraient. D'une part, la plus grande partie de nos
ressources serait confisquée par la guerre. D'autre part,
nos entreprises manqueraient de main d'oeuvre en raison du nombre
de soldats appelés sur les fronts ou pour assurer la sécurité
intérieure du pays. Enfin les échanges commerciaux
seraient largement paralysés. Résultat, notre machine
économique marcherait au ralenti.
7/ Les aides sociales et les retraites seraient
revues à la baisse.
En France, le chiffre d'affaire des entreprises et les revenus
des particuliers s'effondrant, prélèvements sociaux
et fiscaux chuteraient. Ni l'État, ni les différentes
caisses versant les aides sociales ne pourraient faire face aux
besoins. L'accès aux soins médicaux serait régenté.
Dans la catégorie la plus vulnérable, les retraités,
beaucoup seraient réduits à la misère.
8/ Les investissements immobiliers et les valeurs
boursières chuteraient eux aussi. Ceux des
retraités, qui auront investi pour s'assurer un complément
de retraite, verront la pierre et les actions perdre de leur
valeur, ce revenu de substitution s'effondrer.
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Oussama Ben Laden tirant à
la Kalachnikov en Afghanistan.
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Encore
tout cela n'est-il que peu de chose au regard de l'après-guerre.
Toutes les guerres ont une fin. Celle-ci
n'échapperait pas à la règle. Mais, après
la guerre, il faut trouver des réponses aux problèmes
qui ont été sa cause. En d'autres termes, régler
les différents dont la solution, appliquée plus
tôt, aurait permis d'éviter la guerre.
Mais, n'en déplaise aux adulateurs,
conscients ou inconscients, de la " solution finale,
" nous ne parviendrons pas à exterminer un milliard
300 millions de musulmans comme nous le fîmes autrefois
des Cathares (2). Le simple
fait de l'avoir envisagé, comme une solution à
nos maux, pèserait sur nos consciences. Car, force ou
faiblesse, nous sommes ainsi faits.
Certes, nous serions le camp du vainqueur.
D'abord en raison de notre supériorité technologique.
Ensuite, parce que nous voyons déjà l'Inde
se joindre à nous, par haine de l'islam, avec son milliard
d'individus (3). Sur les fronts les
plus meurtriers, elle nous fournirait des troupes au sol, la
chair à canon qui nous manque.
Néanmoins, cette compensation
de nos besoins en combattants, nous la paierions très
cher. New Delhi échangerait la vie de ses gens
contre l'accès aux technologies les plus performantes.
Mais
cela n'est encore que peu de chose.
Pressés par l'Inde,
soucieuse de récupérer les dividendes de son engagement
à nos côtés, en outre mises en demeure de
répondre aux projets annexionnistes d'Israël
(4), les puissances occidentales
risqueraient, de plus, d'imposer une solution injuste. Comme
les " dommages de guerre " excessifs imposés
à l'Allemagne en novembre 1918 préparèrent
la Deuxième guerre mondiale, il faut craindre l'extrême
exigence des conclusions de la " Troisième
" revitalisant le terrorisme islamiste au lieu de le
réduire. Ce serait un retour à la case départ.
Reste
le pire.
La Chine, dont nous voyons
le développement économique se faire aux dépens
de notre prospérité, sortirait probablement grande
bénéficiaire du conflit.
Elle aurait, pensons-nous, la sagesse
de garder ses distances du conflit tout en fournissant aux
belligérants les équipements dont ils auraient
besoin (5). Ceux que nous ne pourrions
plus produire ajoutés à ceux que le monde musulman
nous achetait par le passé.
Aussi, si elle s'en tient à
ce comportement de sage bien dans sa tradition, la Chine s'enrichira,
quand la guerre et nos erreurs nous appauvriront. Résultat,
une fois passées les hostilités, elle sera l'une
des premières puissances mondiales. Sinon la première.
Non loin, débarrassée dans le conflit du surplus
de ses populations analphabètes, l'Inde se sera elle
aussi renforcée.
En clair, comme la Deuxième
guerre mondiale avait été la cause première
de l'effondrement de nos empires coloniaux, la "Troisième
" réduirait à néant nos restes de grandeur.
Nous serions perdants
sur toute la ligne et, après tout, nous l'aurions bien
mérité.
Car si tout cela était l'indispensable
prix à payer pour préserver notre sécurité
et notre liberté, nous l'accepterions sans hésiter.
Mais ne peut-on faire face à la menace terroriste autrement
qu'en mettant en péril les fondements de notre civilisation
? Réfléchissons !
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La RAI Tv révèle
l'usage du phosphore blanc par les américains contre la
ville irakienne de Falloujah en novembre 2004.
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Il
faut d'abord évaluer la réalité de la menace
qui pèse sur nous.
Faut-il parler de " guerre
contre le terrorisme " ? Pendant la " guerre
froide, " l'Union Soviétique, directement
et par l'intermédiaire de ses alliés, protégeait,
finançait et armait des structures terroristes (6).
Aujourd'hui, aucun pays, en tant qu'État, ne
protège ou ne soutient des groupes terroristes dirigés
contre l'Occident. Nous avons bien dit l'Occident.
Ceux-ci, sont partout pourchassés,
y compris par ceux qui les ont laissés prospérer
ou ont usé de cette tactique, car ils en sont devenus
les premières victimes. Nous pensons à l'Arabie
Saoudite, à la Libye, à l'Algérie
à l'Iran et à quelques autres (7).
Dans ce cadre, ne parlons plus de
" guerre contre le terrorisme " mais d'une
vaste opération de police. Cette dernière désignation
aura l'avantage sur la première de nous éviter
la paranoïa collective.
Nous en connaissons pourtant, manipulés ou manipulateurs,
qui s'accrochent avec insistance à l'appellation de "
guerre contre le terrorisme, " pour mieux désigner
l'islam comme ennemi à abattre. Ils ont pour cela des
arguments de poids.
D'une part, l'Histoire. De
l'émergence de l'islam jusqu'à aujourd'hui, les
guerres et les affrontements n'ont pas manqué avec la
chrétienté. D'autre part, nos différences
culturelles, exacerbées par la modernité, la
place accordée, chez nous, à la femme dans la société
et l'élévation de l'homosexualité au rang
de moeurs honorées creusent l'incompréhension.
Il y a plus grave : le contenu des
textes islamiques, principalement du coran, livre fondateur
de la religion de Mahomet. Pour les musulmans, il est
la parole de Dieu révélée aux hommes. Or,
ses préceptes, des ordres divins donc, ont souvent
des accents terribles. Quelques exemples tirés
de la quarantaine de versets appelant au jihad sont édifiants
:
"
Combattez-les (ceux qui vous combattent) jusqu'à l'élimination
de toute subversion et jusqu'à ce que le culte ne soit
rendu qu'à Dieu
" Lit-on dans le verset 193 de la sourate II.
" Ceux des croyants qui demeurent dans leurs foyers, ne
sont pas égaux (en mérite) aux croyants qui exposent
leurs biens et leur personne dans la lutte pour la cause de Dieu
" Dit le
verset 195 de la sourate IV.
" Combattez ceux qui ne croient pas en Dieu, ni au jour
dernier et ne s'interdisent pas ce que Dieu et son envoyé
ont prohibé. (Combattez) également ceux parmi les
gens du Livre, qui ne professent pas la religion de la vérité,
à moins qu'ils ne versent la capitation directement et
en toute humilité. " Ordonne le verset 29 de
la sourate IX.(8) |
Il faut savoir, par " gens
du Livre, " l'islam entend les chrétiens
et les juifs. A lire cela, on pourrait penser les partisans
de la guerre à outrance fondés dans leur bellicisme.
Ils le seraient en effet si tous les musulmans, ou une proportion
significative d'entre eux, appliquaient les versets du coran
à la lettre. Mais, chez les musulmans, comme parmi
les chrétiens, il en est bien peu à se soumettre
à tous les préceptes de leur religion.
Combien de fidèles du Christ
accepteraient de tendre la joue gauche après avoir
été frappé sur la droite ? Combien de
musulmans se soumettent, en Occident, ou même en Orient,
au rite des cinq prières quotidiennes ? C'est vrai, le
coran prône le jihad. Dans les années 80, répondant
à cet appel, 20000 jeunes gens s'étaient rendus
en Afghanistan afin de combattre les Soviétiques.
20000 sur un milliard 300 millions de musulmans, ce n'est
pas un raz-de-marée !
On voit le pas entre le fait de se
déclarer croyant d'une foi et celui d'une pratique absolue
de toutes ses règles.
Ceci est encore plus vrai aujourd'hui,
qu'hier. Car, " lentement mais sûrement, "
la société musulmane se laisse gagner par la
modernité. Les mahométans, qui ont opté
pour un mode de vie comparable au nôtre, sont de plus en
plus nombreux. Ils sont nos meilleurs alliés contre
le terrorisme d'inspiration islamique.
Certes la masse reste plus traditionaliste.
Allons-nous cependant la convaincre d'évoluer en nous
taisant sur les injustices perpétrées contre
eux ? Pouvons-nous décemment nous prétendre
les porte-drapeaux de l'équité quand les États-Unis
ont violé les frontières de l'Irak sous
les prétextes que nous savons, avec le résultat
que nous voyons et pour les motifs que nous devinons ?
Pour réduire le terrorisme, il faut certes le combattre avec fermeté.
Mais là où il se trouve. Pas là où
des propagandistes malintentionnés le disent terré
pour nous lancer à l'attaque d'objectifs sans relation
avec lui.
Et d'abord, soyons clair, nous devons
régler l'une des principales causes du terrorisme islamique
: le problème israélo-palestinien. Imposant
une solution équitable, mettant un terme pour cela à
la politique d'annexion lente des territoires palestiniens par
les Israéliens, nous nous honorerions. Mieux, nous
porterions le coup le plus redoutable jamais porté au
terrorisme d'inspiration islamiste.
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Colons israéliens évacuant
Gaza selon le plan de désengagement unilatéral
de Sharon en septembre 2005.
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