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- Mais ce qui importe, au premier chef,
c'est l'attitude du gouvernement iranien. Elle a été
à la fois péremptoire et ambiguë. Hamid Reza
Assefi, porte-parole du ministère des Affaires étrangères
(ce sera Manouchehr Mottaki, ancien ambassadeur au Japon) déclara
que " cette résolution politique, adoptée
sous la pression des Etats-Unis et de leurs alliés n'a
pas de fondement juridique ni de logique et elle est inacceptable
La république islamique d'Iran ne renoncera pas à
ses droits légitimes et insiste toujours pour avoir la
maîtrise de la technologie nucléaire civile ".
A Téhéran le président Mahmoud Ahmadinejad
affirma que le traitement de l'uranium était, pour l'Iran,
un droit et s'il acceptait de poursuivre la négociation
avec l'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne, il
rejetait catégoriquement leurs propositions, qu' "
il tenait pour une insulte à son peuple, comme si les
Iraniens formaient une nation de primitifs ". Et les
scientifiques iraniens remirent en marche les installations transformant
en gaz le minerai d'uranium, activité qu'ils avaient stoppée
- de leur plein gré disaient-ils - à l'issue des
entretiens avec les diplomates des trois intervenants européens.
" Cette relance des activités de la centrale nucléaire
d'Ispahan est une mesure de protection des droits de la
nation ", déclara Téhéran, justifiant
ainsi la levée des scellés apposés sur le
site par l'AIEA. L'ambiguïté réside dans
le fait que le traitement de l'uranium naturel n'est pas l'enrichissement
qui, poussé à un pourcentage élevé,
aboutit à un matériau fissile utilisable à
des fins militaires, mais il en est la lointaine condition préalable.
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- D'où la controverse
: Les Occidentaux estiment que l'Iran vise la bombe - mais ils
ne peuvent le prouver, et M. Elbaradei, directeur de l'AIEA le
reconnaît - tandis que Téhéran réclame
l'enrichissement nécessaire au combustible de ses centrales
nucléaires productrices d'électricité.(1) - mais ne s'interdit pas de le porter
un jour au niveau des applications militaires -.
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Celles-ci
peuvent être obtenues, compte tenu des ressources de l'Iran,
par deux procédés :
- L'un consiste à
traiter du minerai d'uranium pour en extraire un gaz, l'oxyde
d'uranium concentré, lequel est progressivement "
enrichi " à l'aide de centrifugeuses, montées
en chaîne, aux rotors tournant à une vitesse très
élevée et séparant les isotopes d'uranium
235 fissile une fois atteint un certain niveau d'enrichissement.
L'Iran chercherait à disposer de quelque 5000 centrifugeuses,
installées dans une usine souterraine. Les inspecteurs
de l'AIEA auraient constaté l'existence de seulement 160
de ces centrifugeuses (à Natanz). Ce procédé
a été mis au point par la société
anglo-germano-hollandaise URENCO avec deux modèles de
centrifugeuses, le G1 et le G 2, l'Iran les détenant l'un
et l'autre. Le scientifique pakistanais Abdel Qadir Khan
aurait aidé l'Iran, comme il aida la Corée du nord
et la Libye, à la fois en ce qui concerne les centrifugeuses
et aussi en ce qui a trait à l' " architecture "
de la bombe.
Voici deux ans, le président Mohamed Khatami révéla
que l'Iran possédait une mine d'uranium naturel, mine
découverte en 1985 et située non loin de la ville
de Yazd, au centre du pays et que cette mine était en
exploitation, déclaration qui confirmait la validité
du procédé qui vient d'être sommairement
décrit.
- Le second procédé
repose d'abord sur l'achèvement du réacteur
de Boushehr. Après plusieurs années de fonctionnement
l'Iran disposerait d'assez de matière fissile (plutonium)
pour assembler plusieurs dizaines de bombes. Autre solution :
produire de l'eau lourde (ce serait le cas à Arak)
pour alimenter les centrales nucléaires et obtenir du
plutonium militairement utilisable.
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Si indirectement, la Chine,
le Pakistan, la Russie ont aidé l'Iran dans
sa quête d'indépendance par l'atome militarisé,
l'entreprise recueille l'adhésion de la majorité
des Iraniens. Déjà, au cours des années
70, le Chah avait souhaité que son pays entre dans le
club des Etats nucléairement nantis. Mais les " convenances
" politiques et diplomatiques voulaient que l'armement atomique
fut proscrit et qu'on se déclare opposé à
la prolifération et partisan de l'élimination de
cet armement. Aussi les dirigeants successifs de l'Iran ont-ils
tenu le même discours. Mais tous ont admis que l'intérêt
de la nation exigeait l'adoption de dispositions contraires.
Dans son ensemble la population souscrit à la politique
du gouvernement. L'Iran est peut-être le seul pays où
religieux, intellectuels, " bazar " et paysans sont
prêts à fournir des volontaires pour défendre
les sites d'activités atomique, y former des " boucliers
humains " ou exercer des représailles en cas d'attaque.
Les opposants
sont à l'extérieur. Adversaires du régime
des mollah, ils ajoutent à leurs griefs les efforts nucléaires
de Téhéran proclamant qu'un changement de statut
politique permettrait de mettre fin à l'aventure atomique
dans laquelle est engagé leur pays, attitude qui leur
apporte la sympathie
d'une fraction de la communauté internationale souhaitant
l'élimination du nucléaire. " Il faut désarmer
les tyrans de Téhéran qui mentent effrontément
aux inspecteurs de l'AIEA, déclarait un opposant iranien,
M. Amir Jahahchahi.
Le comportement du gouvernement iranien est compréhensible.
C'est d'abord, un grand pays au passé prestigieux et à
l'avenir prometteur. Ses 70 millions d'habitants occupent
une surface trois fois plus grande que celle de la
France. Héritiers d'une civilisation millénaire,
ils ont un taux d'alphabétisation élevé,
une longue espérance de vie et forment néanmoins
une population jeune, le taux de fécondité
renouvelant largement les générations. Riche
est le sous-sol de l'Iran, essentiellement en pétrole
(12 milliards de tonnes de réserves), en gaz naturel
(27 milliards de mètres cubes) et, même on l'a vu
, en minerai d'uranium.
Ce sont
ces richesses qui ont provoqué l'ingérence étrangère
: en 1951 une première nationalisation des installations
pétrolières avait décidé de l'éviction
du premier ministre Mossadegh et en 1973, le Chah s'assurant
la maîtrise de la production de pétrole avait dressé
contre lui les entreprises pétrolières étrangères
dans le même temps que la population désapprouvait
ses efforts de " modernisation à l'occidentale ".
Les discours de Khomeyni, enregistrés à Neauphle-le-Château,
ont préparé le départ du Chah et l'instauration,
en 1979, d'une république islamique en Iran.
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Les évènements
internationaux ont placé l'Iran dans une situation géopolitique
difficile. En effet :
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- Les voisins de l'Iran sont
des Etats nucléaires, militairement parlant. C'est le
cas de la Chine, de l'Inde, du Pakistan, de la Russie, et aussi
de la Corée du nord. Et, en face, de l'Etat d'Israël.
On sait également, que la Corée du sud, sans en
référer à l'AIEA, a procédé
à des essais d'enrichissement de gaz d'uranium et aussi
de séparation du plutonium fourni par le fonctionnement
de ses 19 centrales nucléaires.
- Au sein du monde musulman
(1 ,2 milliard) on ne compte que 120 millions de chiites,
dont la moitié vit en Iran. Avec ses 160 millions, à
80 % sunnites, le Pakistan a bien été le premier
Etat musulman à détenir l'arme atomique, mais les
musulmans chiites n'ont pas ce privilège.
- Les ingérences étrangères,
celles de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis, notamment, ont
démontré aux dirigeants iraniens les avantages
de l'indépendance et de l'auto suffisance avec l'audience
internationale qu'elles confèrent l'une et l'autre.
- La stratégie interventionniste
pratiquée par les Etats-Unis
soucieux de s'assurer les approvisionnements en énergies
fossiles nécessaires à leur développement
économique et industriel aboutit à l'investissement
stratégique de l'Iran. A l'ouest, sur 1500 kilomètres
de frontière avec l'Irak, les contingents armés
des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne montent la garde. A l'est,
sur un millier de kilomètres, des formations militaires
occidentales, exercent les mêmes fonctions tandis qu'au
sud le Golfe persique et la mer d'Oman (2500 kilomètres
de littoral) sont placés sous le contrôle de la
puissance maritime et aérienne des Etats-Unis. Ajoutons
qu'au nord, sur 1000 kilomètres, la Turquie et
l'Azerbaïdjan, alliés des Etats-Unis, isolent l'Iran,
en particulier de l'ami russe. Et voici l'Iran " enclavé
", ses voies d'acheminement du pétrole et du
gaz naturel tributaires de la bonne volonté de ses adversaires
politiques, aussi bien sur terre que sur mer.
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" La communauté
internationale doit trouver un moyen pour être assurée
que cela (un Iran détenteur de l'arme nucléaire)
n'arrivera jamais ", affirmait, en août 2004, madame
C. Rice, Secrétaire d'Etat. Elle oubliait que les opérations
militaires américaines, le désir d'étendre l'action de l'OTAN jusqu'à la Caspienne, l'annonce d'un chambardement politique au Proche
et Moyen-Orient, toutes initiatives de son pays, légitimaient
les démarches nucléaires de Téhéran.
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-Les énergies
fossiles constituent la principale ressource de l'Iran.
Mais il s'agit là, d'une richesse temporaire, rémunératrice
durant encore quatre ou cinq décennies. Il est
normal que Téhéran se soucie, aujourd'hui, de satisfaire
demain ses besoins en énergie et que le gouvernement iranien
- quel qu'il soit -
entende être maître du cycle atomique complet, en
laissant ouvertes ses différentes options. Il est de bonne
guerre d'affirmer que le seul objectif visé est l'utilisation
industrielle de la désintégration de la matière.
Mais aussi, à la fois de tirer profit du chantage au renoncement
à l'atome militarisé et de conserver aussi longtemps
que possible la menace d'en venir aux applications militaires.
Ainsi Téhéran gagne du temps. Les comportements
antérieurs des Etats-Unis l'y incitent.
- Washington a détruit
l'Irak dépourvu d'armes d'intimidation et respecté
la Corée du nord soupçonnée, à la
longue, d'en détenir quelques unes.
- Washington a renoncé
à ratifier le traité d'interdiction de tout essai
nucléaire, sans doute faute d'être en mesure de
détecter et de sanctionner les expérimentations
de faible énergie et afin d'avoir les mains libres pour
moderniser sa panoplie atomique. Mais en supprimant un obstacle
à la prolifération horizontale. Pourquoi l'Iran
devrait-il être la seule puissance qui, en ayant la capacité
financière et scientifique, ne tirerait pas parti des
agissements des Etats-Unis ?
-Pour l'ancien recteur de l'Université de Téhéran,
M. Houchang Nahavandi,
ce n'est pas l'Etat d'Israël qui est visé par la
future arme atomique iranienne, mais c'est assurer la pérennité
du régime, c'est imposer qu'on le respecte, c'est
le renforcer à l'intérieur en donnant des preuves
de sa puissance avec la sécurité dans l'indépendance
qu'il s'efforce de fournir au peuple iranien. Si bien que, pour
le recteur, les attaques dont il est l'objet ne font que l'unir
à son gouvernement et à sa politique nucléaire,
" les Etats-Unis ne comprennent pas l'Iran ",
conclut-il.
ààà
|
Dans son combat contre
une large fraction de la communauté internationale, l'Iran
n'est pas sans atouts.
- Il appartient au groupe d'Etats
qui, en dépit de leurs positions spécifiques très
différentes, ont en commun l'opposition à l'expansion
politique et militaire des Etats-Unis en particulier, et des
alliés de la superpuissance, en général.
Et au nombre de ces Etats figurent de grandes puissances telles
que la Russie et la Chine, auxquelles il faut, maintenant, ajouter
sinon les gouvernements, du moins, les populations musulmanes
fustigeant le " grand Satan américain ". Aussi
Téhéran ne redoute-t-il pas que le Conseil de sécurité
des Nations-Unies soit saisi et qu'il impose à l'Iran
des sanctions économiques, la Chine ou la Russie, voire
les deux puissances y ayant un droit de véto.
- En dépit des particularismes
du monde musulman et des différences confessionnelles
entre sunnites et chiites, l'Iran est un pays musulman. Après
s'être attaqué à l'Irak et à l'Afghanistan,
avoir longtemps soutenu l'Etat d'Israël, on imagine mal
les Etats-Unis bombardant un troisième pays musulman.
La pratique de l'intimidation par la menace d'en venir au conflit
armé serait une démarche politique de même
que le sont, du côté de l'Iran, les arrêts
et les remises en route successifs de son programme nucléaire.
- Exportateur de pétrole
et de gaz naturel, l'Iran fournit de l'énergie fossile
aux pays gros consommateurs, eux-mêmes dépourvus
des approvisionnements nécessaires au développement
de leur économie, tels la Chine et le Pakistan. Les évènements
d'Irak contribuant à l'augmentation du coût du baril
de pétrole, l'attaque des installations iraniennes bouleverserait
davantage encore ce marché de l'énergie.
- L'Iran chiite a pour allié
naturel, aujourd'hui du moins, la population chiite, majoritaire
en Irak. Aussi, vis-à-vis de Washington, l'Iran détient-il
un moyen de pression car il a la faculté d'attiser ou
de calmer la révolte contre l'occupant occidental.
- Les dirigeants iraniens ont
tout naturellement retenu la leçon de la destruction du
centre atomique irakien de Tamouz, près de Bagdad au début
du mois de juin 1981. Leurs installations scientifico-techniques
sont dispersées et, surtout, enfouies assez profondément.
Aussi faudrait-il de nombreux bombardements sur zones
et la dévastation du pays pour neutraliser à coup
sûr l'entreprise atomique irannienne.
- Enfin, l'Iran aligne encore
une armée active de 500.000 hommes, auxquels il faut ajouter
les 100.000 hommes de la Garde islamique révolutionnaire.
Il tient sous la menace de ses missiles Scud et
Chahab les contingents occidentaux déployés
en Irak et en Afghanistan. Ravitaillant en armes et en explosifs
la résistance à l'occupant, l'Iran là où
il est placé sur la carte, est en mesure de se faire craindre.
ààà
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La question se pose,
compte tenu de la démarche iranienne peut-on exorciser
l'atome militarisé ?
Il est communément admis que l'arme atomique constitue
un grave danger pour l'humanité et qu'un monde à
nouveau sans désintégration de la matière
serait plus sûr. Aussi, faute d'être en mesure de
revenir à l'ère pré- atomique et d'effacer
ce qui a été appris et réalisé au
cours du dernier siècle, est-il indispensable à
la fois de limiter le domaine nucléaire, de réduire
les panoplies de ceux qui détiennent l'armement correspondant,
de tarir études et recherches jusqu'à l'extinction
naturelle d'une discipline qui aurait dû demeurer ignorée.
C'est là un sentiment général. Tout être
censé croit devoir témoigner de cette réprobation
et, pour ainsi dire, automatiquement. Cette condamnation ne peut
être l'objet d'aucune discussion. Il s'agit d'une évidence
et bien rares sont ceux qui la nient.
Et pourtant ?
Est-il souhaitable d'en revenir à l'ère pré-atomique,
celle de la poudre qui succéda à celle de la flèche
? Au cours des six siècles de l'ère de la poudre,
l'humanité a été constamment en guerre.
En près d'un demi siècle (1905 - 1945) le paroxysme
de la violence guerrière a été atteint avec,
probablement, 150 à 200 millions de victimes et plus de
50 millions de morts. Par dizaines de millions les combattants
se sont affrontés, mettant en uvre canons et chars
d'assaut par centaines de milliers, avions par dizaines de milliers,
navires de combat par milliers. Et sur de pareilles lancées
les industries d'armement s'apprêtaient à faire
" mieux " encore afin de rendre la guerre plus rémunératrice.
Hiroshima et Nagasaki, un avion, dix
hommes d'équipage, deux projectiles, en 3 jours ont mis
un terme au massacre. Le Japon a chèrement payé
cette brutale cessation d'hostilités mais Pearl Harbour
a été son initiative, comme la cruauté de
ses combats. En revanche, l'irruption de l'atome militarisé
sur la scène internationale a imposé bien
des renoncements à la guerre et notamment en Europe,
apporté soixante années de paix, ainsi que le reconnaît
le professeur Michel Serres (une paix qui eut été
totale si l'Allemagne, mue par ses vieux démons n'avait
mis les Balkans à feu et à sang ou si devenue une
puissance nucléaire, la Yougoslavie eut été
respectée).
Ce ne sont pas les mots qui comptent ici mais les faits :
- Entre les forces de l'OTAN
et celles du Pacte de Varsovie, de 1955 à 1989
l'antagonisme a été manifeste. Mais, l'épée
est demeurée au fourreau, ou plutôt les mégatonnes
ont sommeillé dans les dépôts. A Moscou comme
à Washington, l'on savait que l'affrontement armé
était impossible. On savait - et l'on sait de plus
en plus - qu'à l'ère atomique gigantesque est la
disproportion entre l'enjeu d'une guerre - et les bénéfices
qu'on en attend - et les risques qu'il faudrait prendre à
y avoir recours.
- Ce fut également le
cas entre la Russie et la Chine au cours des années 60,
lors de leur différend doctrinaire.
- Et aussi entre la Chine
et l'Inde, avant de devenir des puissances atomiques
s'affrontant militairement dans l'Himalaya mais négociant
sagement leurs intérêts respectifs depuis que l'atome
est partagé, même inégalement, entre Pékin
et la Nouvelle-Delhi.
- Il en a été
de même avec l'Inde et le Pakistan que deux
guerres ont opposés. Depuis que chacun de ces deux
pays possède un (modeste) armement nucléaire, l'entente
et la coopération se sont imposées. Islamabad
et la Nouvelle-Dehli ont substitué la négociation
à l'épreuve de force.
- Enfin, figurant en tête
de l'énumération des peuples de l' " axe
du mal ", la Corée du nord, potentiellement
nucléaire, n'a pas subi le sort de l'Irak dont on sait,
maintenant, qu'il était dépourvu de ces "
armes de destruction massive " qui incitent à respecter
l'Etat qui les détient. On ne peut mieux avoir mis en
valeur l'intérêt national de l'atome militarisé.
Renonçant au traité
d'interdiction de toute expérimentation nucléaire
et laissant entendre que les Etats-Unis reprendraient les essais
de leurs prochaines réalisations atomiques, M. Bush
a implicitement admis que le " génie
nucléaire ne pouvait plus être remis en bouteille
", que la prolifération horizontale échappait
au contrôle et que, dans ce domaine, les Etats-Unis
en ayant la liberté de création et d'expérimentation,
feraient mieux que quiconque.
De son côté, sachant qu'elle va affronter politiquement
et économiquement les Etats-Unis, la Chine n'est sans
doute pas opposée à une certaine dissémination
d'un armement qui, rétablissant la pleine souveraineté
des Etats, limite le nombre de ceux qui recherchent la protection
américaine.
Et si la sagesse populaire
se trompait ? Si
le rejet quasi unanime du nucléaire d'Etat était
une erreur ? Et si l'horreur d'Hiroshima escamotait l'abomination
des guerres traditionnelles ? L'humanité en aurait-elle
la nostalgie ?
La Grande-Bretagne ayant
manifesté, au sein de l'AIEA une certaine intransigeance,
à Téhéran, les étudiants
ont lancé des pierres et
des tomates sur
l'ambassade britannique en réclamant, pour leur pays,
la liberté de poursuivre son programme nucléaire.
La fierté nationale les animait. Pourquoi l'Iran serait-il
incapable de gérer l'indépendance que confère
la possession de l'arme atomique ? Le monde est dirigé
par ceux qui la détiennent et ils ne cessent de se donner
en exemple. Autour de l'Iran nombreux sont, maintenant, les
Etats qui gèrent convenablement cette forme de souveraineté.
Devant
les conséquences des incessantes innovations de l'humanité,
les peuples seraient-ils à ce point inégaux ? La
jeunesse iranienne ne l'admet pas.
Ses clameurs
ne demeurent pas sans écho. Il est de l'intérêt
des pays producteurs de pétrole - et non encore "
nucléarisés " - de consacrer les ressources
nouvelles que procure le renchérissement du baril aux
énergies de remplacement, à commencer par l'énergie
atomique. Ses applications industrielles contribuent au développement
et ses applications militaires apportent à la fois la
sécurité et l'indépendance. Si bien que
combattre pour éliminer les armes de destruction massive
- celles-là du moins - aboutit à un résultat
opposé à celui qui était visé : la
rente pétrolière devient si rémunératrice
qu'elle finance l'interdit.
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