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octobre 2011
Depuis le 21 août 2011,
les opposants au régime sont dans Tripoli et ont pris
les centres névralgiques. Kadhafi
a perdu. Nous ne serons pas de ceux, très rares,
qui pleurent sa fin. En revanche, les moyens utilisés
pour y parvenir nous laissent dubitatifs. Nous sommes en particulier
choqués par le détournement des Résolutions
des Nations Unies par les intervenants européens, Nicolas
Sarkozy en tête. Nous avons une autre raison de nous interroger. Le 12 juillet, nos députés votaient, presque comme un seul homme, la poursuite de lintervention militaire française en Libye : sur 516 votants, 482 ont voté pour. Le destin de Kadhafi nétait pas encore scellé. Sa résistance pouvait laisser présager des combats interminables. Des négociations, pour obtenir un cessez-le-feu, conformément à la Résolution 1973, apparaissaient encore comme le meilleur moyen de sortir du bourbier et de limiter les souffrances liées à la guerre pour la population. Certes, dun autre côté, il convient, quand notre armée est au feu, de la soutenir. De ne pas labandonner en rase campagne ou de lui ordonner le repli à la première récrimination de lopinion. Car les choses de la guerre fonctionnent selon des logiques peu compatibles avec les discours de salon. Mais comment, moralement, soutenir une action décidée par Sarkozy, et frappée, comme nous lavons vu plus haut, du vice du détournement des Résolutions des Nations Unies ? A notre sens, il ny avait quun seul moyen de résoudre le dilemme : sabstenir. Car, répondant de cette manière à la question posée par le gouvernement, les députés, au moins ceux de lopposition, auraient fait part de leur réserve tout en nempêchant pas la poursuite de lopération. Mieux, ils auraient pu demander un amendement, exigeant du gouvernement dentreprendre des démarches diplomatiques en marge de laction militaire. Lapproche diplomatique était induite, non écrite mais dite, par les féaux de Sarkozy, nous opposera-t-on. Cest vrai. Cela a même fait partie du subterfuge imaginé pour obtenir un vote aussi massif. Les émissaires de lÉlysée y ont beaucoup travaillé, faisant circuler le bruit de négociations en cours avec des envoyés de Kadhafi. Ce dernier, lui-même, sest laissé prendre au piège et, pendant la première quinzaine daoût, avons-nous appris, a mis un bémol à ses activités de désinformation destinées à lOccident. Il croyait les Français décidés à négocier. À la guerre, le mensonge et la dissimulation font partie du jeu. Mais en politique, quand le chef de lÉtat et ses collaborateurs déguisent la vérité devant le Parlement, cela sappelle de la félonie. On comprend mieux la soudaine chute de Tripoli. Même la presse aux ordres faisait état de linconsistance de larmée du CNT, réduite au sens de rassemblement dhommes. Depuis des mois, elle piétinait devant les positions des Kadhafistes. La prise de la capitale est leffet dune opération conjointe par mer, avec débarquement de nuit, pénétration par voie terrestre et appui aérien assuré par lOTAN. À cela sajoute, ce qui nest plus quun secret de polichinelle, lintervention des forces spéciales françaises et britanniques pour guider les rebelles. Si Kadhafi sétait maintenu au pouvoir, dans quatre mois, conformément à la Constitution, le Parlement aurait dû à nouveau se prononcer sur le prolongement de notre intervention. Des députés pouvaient demander des comptes et interroger le gouvernement sur linsuccès des négociations. Pour Sarkozy, il fallait une conclusion rapide : la chute du maître de Tripoli par les armes, puisquil ne voulait pas se contenter dune victoire politique. Pour ce faire, il na pas craint de violer un peu plus la Résolution 1973 en envoyant des soldats au sol. Voilà pourquoi cette victoire a un goût amer. Mais elle pourrait être plus amère encore si, comme il faut le craindre, la Libye sombre dans les luttes fratricides, alimentées par le tribalisme et la montée de lislamisme. Or, sur ce dernier point, il faut savoir des hommes proches dAl-Qaïda siégeant au CNT. |
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