du pouvoir |
Le 12 août, la nouvelle estomaquait les kremlinologues avertis : Sergueï Ivanov, le chef de ladministration présidentielle de Vladimir Poutine, perdait sa place pour une vague mission de « Représentant spécial du Président pour les affaires denvironnement et de transport ». Quand on sait le chef de ladministration présidentielle plus puissant que le Premier ministre, on apprécie lhumiliation subie par Ivanov. Une situation dautant plus étonnante quil fait partie des « Siloviki » (1), des hommes issus des services de sécurité et de larmée. Depuis les années 90, les Siloviki se sont ligués pour éviter leffondrement de la Russie et tenter de redonner au pays la puissance quil avait du temps de lUnion Soviétique. Ce sont eux qui ont fait monter Poutine au pouvoir. Mieux, Ivanov fait partie du groupe dit de Leningrad, ces Siloviki qui ont croisé Poutine dans les couloirs de ladministration municipale ou à lécole du KGB, installée dans cette ville. Cest la garde rapprochée de lactuel maître du Kremlin en somme. Ivanov et Poutine sont du reste issus de la même promotion dofficiers du KGB. Preuve de la proximité entre les deux hommes, Poutine accédait en 1996, sous Boris Eltsine, au poste dadjoint du directeur des affaires de la Présidence. Quand en juillet 1998 il devenait directeur du FSB, qui a succédé au KGB, il appela Ivanov à ses côtés comme directeur adjoint. En 2000, Poutine était élu Président de la Fédération de Russie et, à peine un an plus tard, Ivanov se voyait nommé ministre de la Défense. En 2008, Ivanov est même pressenti pour remplacer Poutine à la Présidence, la Constitution interdisant à ce dernier deffectuer un troisième mandat consécutif. Mais un scandale léclabousse qui nuit à son image : à la suite dun byzutage qui a mal tourné, un jeune soldat, Andreï Sytchev, est amputé des deux jambes et des testicules. Lopinion lestime responsable. Ce sera Dimitri Medvedev qui aura lhonneur dassurer ce qui apparaît comme un intérim. Il faut dire, les moeurs ont évolué au Kremlin depuis Staline. Sous la férule du Géorgien, Ivanov aurait fini en Sibérie. Avec Poutine, on lui demande seulement de partir en disant que cest de sa propre initiative. En passant sous les fourches caudines, a-t-il pensé à son fils, Aleksander, mort noyé dans des circonstances mystérieuses, le 3 novembre 2014 aux Émirats Arabes Unis ? Âgé de 37 ans, celui-ci était membre du conseil dadministration de la banque dite Vnechekonombank. Ivanov nest pas le seul Siloviki à rendre son tablier. Le 28 juillet dernier, Andreï Belianinov, le patron des douanes russes, était prié de quitter ses fonctions sur ordre de Poutine. La veille, une perquisition avait été effectuée à son domicile et dans les bureaux de ses adjoints, permettant de découvrir des documents relatifs à un trafic dimportations illégales dalcool de luxe dont Belianinov aurait profité. Bienvenues parmi les pièces à conviction, à la luxueuse villa de Belianinov, les enquêteurs auraient découvert des boîtes à chaussures débordant deuros et de dollars. Sans attendre, des photos prises pendant la perquisition se retrouvaient sur le site Internet de Gazera.ru, un média électronique dinformation. Belianinov lui aussi semblait à
labri des mauvaises surprises. Dans les années
80, quand Poutine y était lui aussi officier,
il était même en mission pour le KGB en Allemagne
de lEst. Cela crée des liens. Le 10 mai, un message signé dIvanov apparaissait sur Internet pour dire : « Camarades et frères soldats, je veux vous présenter mes excuses parce que je nai pas pu sauver notre organisation. Nous avons protégé honnêtement nos intérêts nationaux ». Des vraies paroles de Siloviki. En à peine une heure, ces mots pourtant bien innocents sévanouissaient des écrans. Depuis, Ivanov na pas donné signe de vie. Scénario à peine différent pour Vladimir Yakounine. Ancien de lindustrie militaire des missiles balistiques, il était diplômé de lInstitut mécanique de Leningrad. Patron des chemins de fer russes depuis 2005, il a perdu sa position lannée dernière. Quand on sait les chemins de fer russes indispensables pour déplacer une importante force armée dun bout à lautre dun pays aussi grand que la Russie, on peut penser Poutine anticipant sur la possibilité dun putsch. Les esprits simples peuvent le croire cherchant à affranchir lÉtat de linfluence des services de sécurité. Ils se tromperaient. Le successeur de Belianinov aux douanes sappelle Vladimir Boulavine. Il sort lui aussi du FSB. Anton Vaïno et Vladimir Poutine Vaïno se dit linventeur du « nooscope », « un réseaux de scanners spatiaux ». « Le réseau de capteurs du nooscope, dit lun de ces articles, permet de lire les occurrences entre le temps et lespace, depuis les cartes bancaires dernière génération jusquà la poussière intelligente ». Comprenne qui pourra ! Néanmoins, quun homme aux pensées aussi étranges jouisse de pouvoirs aussi importants, auprès dun chef dÉtat comme Poutine, ne peut quinquiéter. Les croyances ésotériques dans la proximité dun pouvoir totalitaire, nous en avons vu les effets en Allemagne avec Hitler et le nazisme. Nous nen sommes pas encore là avec Poutine, mais la prudence devrait être de mise quand le maître du Kremlin renforce son autorité. |
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