DU JIHAD |
L' idée du jihad (1) suscite beaucoup de fantasmes et engendre la mort. En principe cest une guerre de défense. Mais cest devenu une excuse pour lancer des opérations de conquête au nom de la religion. Aujourdhui, pour soumettre des populations à un nouvel ordre. |
Tout commence dans lunivers des tribus sémites, les nomades qui peuplaient depuis plus de six mille ans les régions connues aujourdhui sous le nom de Péninsule Arabique et de désert de Syrie. Où que ce soit, y compris autrefois en Europe, les tribus ont leur logique (2). Pour se protéger, elles ne connaissent que les armes, pour se renforcer elles constituent des confédérations tribales qui se forment sur la base daccords de défense. Mais il est bien tentant dutiliser cette force pour soumettre dautres peuples, voire prendre leurs terres ou tout simplement les piller. Grâce à la Bible, les Juifs, appelés alors Hébreux, sont les Sémites les plus connus, mais non point les seuls ni les plus anciens à former un peuple (3). Lidée de confédération tribale est chez eux passée à la postérité. Nous la reconnaissons dans les 12 tribus qui sallient autour dun projet commun et dun accord militaire tout en sinventant, sans doute, un ancêtre fondateur, Abraham (4). Nous passons aussi dans la Bible,
de la guerre de défense à la guerre de conquête
et à la soumission des autres peuples, avec linvasion
du pays de Canaan par les Hébreux. Comme
dans le jihad, on remarque qualors la guerre de
captation est bénie par Dieu puisque ce sont ses
ordres, que les héritiers de Moïse
exécutent, pour défendre son nom et son culte.
Comme quoi Dieu se prête volontiers aux desseins des hommes
qui se réclament de lui quand ils partent à la
conquête de nouveaux territoires. Certes, aux débuts de lislam, le texte coranique ne comporte pas dappels au jihad. Mahomet vit alors à La Mecque. Cest la période dite « mecquoise ». Il nest quun prédicateur de type christique. Il subit des persécutions et est même banni. Il répond par la non violence allant jusquà envoyer certains de ses disciples en Éthiopie pour échapper aux avanies. Mais en septembre 622, il sinstalle à Médine à la suite dun accord passé avec la population. Ses partisans sont désormais nombreux et, aux menaces des tribus de La Mecque, il répond par le fer. En chef de guerre. Cest à partir de cette période, dite « médinoise », que les versets guerriers et la notion de jihad prennent place. Certes, ce nest quune guerre de défense. Il faut néanmoins savoir que, dans le Coran, existe la notion de jihad par anticipation sur lintention dattaquer de lennemi. Du reste, la première attaque, celle de Nakhlah, est une embuscade contre les Mecquois à linitiative de Mahomet. De même que, au nom du jihad contre les infidèles, la première bataille, celle de Badr, le 17 du mois de ramadan, contre une riche caravane mecquoise de marchandises arrivant de Syrie. On voit le principe de simple défense bien dépassé.
Il faut bien comprendre ce que le jihadisme emprunte à lesprit tribal. Visiblement, le plus souvent, linvocation du nom de Dieu pour faire la guerre nest quun artifice politique. Dans le passé, lOccident aussi y a eu recours. Nous nous ressemblons tellement ! Mais aujourdhui, dAl-Qaïda à Daech ou à Boko Haram, ceux qui sappuient sur de prétendus décrets divins pour tuer napparaissent plus que pour ce quils sont : des assassins. Parce que le monde a changé. Quelques-uns parmi nous, des musulmans mais pas seulement, ne lont pas encore compris.
Jean Isnard
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