Qu'est-ce que l'extrême gauche ?

janvier 2009

Denis Gorteau s'exprime dans ce billet sur la nature de l'extrême gauche. La nuance de son approche méritait d'être publiée.

 

A l'origine était la Révolution…


Historiquement les mouvements d'extrême gauche se définissent comme des organisations existant à la gauche des partis communistes issus de la révolution de 1917. On trouve du vivant même de Lénine une kyrielle d'organisations, généralement minuscules, qui accusent les communistes soviétiques et leurs successeurs de " trahison " et réinventent l'histoire de la révolution russe.

Cette mouvance va rester jusqu'à aujourd'hui hétéroclite et charrier des militants aux positions politiques très variables et souvent opposées…

La référence hallucinée à la révolution de 1917 et le côté confus de l'extrême gauche sont les deux caractéristiques marquantes de cette famille politique qui reste aussi morcelée qu'à ses origines.

 

Le rapport à la violence

Autre caractéristique évidente de cette galaxie politique : la fascination pour la violence dite " révolutionnaire ". Refusant de changer la société par des réformes, les groupes d'extrême gauche considèrent que la violence " de classe " est le moteur de l'histoire. Cela explique leur fascination pour des événements au cours desquels le sang coule (Commune de 1871, révolution de 1917, guerre d'Espagne, etc.) même si généralement leurs modèles y perdent la vie.

Sorti de quelques tentatives très marginales de passer à l'action, l'extrême gauche française n'a pas connu de vraies organisations terroristes : Action Directe fait pâle figure à côté des Brigades Rouges… La plupart des groupes récusent le terrorisme au profit d'actions de type " grève générale ".

Il n'en demeure pas moins que la violence est un classique de la phraséologie de cette mouvance qui fait souvent de la surenchère verbale pour mieux cacher son impuissance politique et la faiblesse de ses effectifs car si l'extrême gauche affole les médias de temps à autre, les militants réellement impliqués sont à l'image des lecteurs de leurs journaux, très peu nombreux.

Généralement, la révolution et sa violence sont renvoyés après la construction d'un " grand parti révolutionnaire " en projet depuis les années 1920…

Quelle cohérence ?

Plus concrètement on peut aussi constater que le rejet du capitalisme, de la bourgeoisie et de l'Eglise ne suffit guère à donner une identité et une unité à l'extrême gauche.

En effet, aucune question de société ou de politique ne donne lieu à un discours unitaire des organisations " révolutionnaires " : par exemple la LCR est tolérante avec le cannabis et l'homosexualité là où Lutte Ouvrière y est catégoriquement opposée. Les deux organisations se disent pourtant trotskistes. Les traités européens sont la cible n°1 des trotskistes du POI alors que LO y est plutôt favorable. Et que dire de la laïcité parfois rejetée parce qu'elle serait le fromage des francs-maçons, archétype des " sociaux traîtres " rejetés par Lénine en son temps…

Rappelons aussi que l'extrême gauche a présenté pas moins de quatre candidats aux élections présidentielles de 2007 (Olivier Besançenot, Gérard Schivardi, José Bové, Arlette Laguiller) en plus de la candidate du PCF. Drôle de façon de s'unifier…

Aussi éclatée et divisée que les surgeons de la droite ultra, partagée entre chapelles idéologiques et personnalités rivales, l'extrême gauche n'a guère changé depuis ses origines, elle n'a même jamais pesé dans les grands évènements qu'elle revendique comme mai 68 où l'extrême gauche de cette époque voyait dans les premières manifestations une " provocation " du pouvoir gaulliste (sic).

Pour notre société, c'est plus la situation politique et sociale qui la fait exister que l'extrême gauche elle même qui est un danger.


Denis GORTEAU

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

D'autres textes de Denis Gorteau sont accessibles sur : http://quefaire.e-monsite.com

Lire aussi: L'Accord secret de Baden-Baden.Comment De Gaulle et les Soviétiques ont mis fin à mai 68 (Livre de H-C Giraud)

 

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