LA RUSSIE S’INSURGE

janvier 2015

Le 18 décembre 2014, Vladimir Poutine montait à la tribune devant un millier de journalistes. En prestidigitateur habile, il a promis le retour à la prospérité pour dans deux ans et concentré ses critiques sur les causes extérieures de la crise. Et s’il avait raison !

En chutant de 40% depuis le mois de juin, l’effondrement des cours du pétrole a réduit les revenus de Moscou entraînant la chute du rouble. On pourrait n’attribuer celle-ci qu’à la baisse des cours de l’or noir, engendrée par le tassement de la demande et la crise mondiale. Ce serait faire peu de cas des calculs politiques.

En effet, depuis des décennies, premier exportateur de pétrole du monde, l’Arabie Saoudite s’attache à réguler le marché. Elle exerce d’habitude des pressions sur l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole), pour faire baisser l’offre, quand la demande ne suit pas et entraîne la chute du prix du baril. Or, cette fois, rien de tel. Au contraire, Riyad insiste pour mettre en vente les mêmes quantités de brut.

Tout le monde a compris qu’une guerre économique se déroule sous nos yeux. Certains veulent croire à une volonté délibérée des Saoudiens « d’éliminer rapidement les quantités de pétrole concurrentes les moins rentables, y compris aux États-Unis », comme on l’entendait sur RFI le 18 décembre 2014. La journaliste faisait allusion à la production massive de gaz de schiste outre-Atlantique.

Si c’était le cas, on se demande pourquoi Washington, qui dispose de moyens de rétorsions importants contre le Royaume saoudien, se laisserait faire sans broncher.

On constate les principales victimes de la baisse des cours du pétrole deux pays dont l’économie dépend quasi exclusivement de la vente de l’or noir : l’Iran et la Russie. Comme par hasard deux puissances en conflit plus ou moins larvé avec les États-Unis.

Pour nous concentrer sur la Russie, on pourrait croire à un fantasme de notre part si, dans le même temps, l’Occident, poussé par Washington, n’avait pas décrété des sanctions économiques contre Moscou... pour punir les Russes de refuser de laisser tomber l’Ukraine dans la zone d’influence européenne.

Ainsi, dans plusieurs régions du monde, on assiste à la relance de l’ancien conflit est-ouest : en Syrie, quand d’un côté nous soutenons la rébellion et la Russie le régime en place ; ou en Libye, où nous boudons les anciens kadhafistes auxquels Moscou fait les yeux doux.

Résultat, un camp anti-occidental tend à se reconstituer autour de la Russie : l’Iran s’appuie sur lui, mais aussi la Chine, qui vient d’offrir son soutien financier à Moscou.

Dans cette nouvelle partie de bras de fer, il ne faudrait pas croire la Russie sans ressources. Poutine connaît ses forces. Quand il parle d’une échéance de deux ans, il ne parle pas dans le vague, car on sait l’Arabie Saoudite incapable de maintenir des cours du pétrole aussi bas au-delà de deux ans. Elle devrait en effet réduire son train de vie et risquerait de susciter un mouvement de mécontentement dangereux pour le pouvoir.

En attendant, le 18 décembre, Poutine a laissé entendre sur quoi il compte pour tenir : l’opinion publique, qui lui est favorable à 80%, et le sentiment patriotique, flatté par l’habile coup de force perpétré en Crimée, voire les parades guerrières autour de l’Ukraine.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
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