QUESTIONS
SUR LE
HEZBOLLAH

octobre 2006

 

1/ Qui dirige le Hezbollah ?

 

Ali Khamenei, Guide de la République islamique iranienne, est aussi l'autorité suprême du Hezbollah. Les chefs du Hezbollah souscrivent à la théorie politique du "Vilayat-e-faqih," mise en oeuvre par l'Imam Ruhollah Khomeyni, qui remet l'autorité suprême de la "Révolution," en fait de l'Iran, à un Guide religieux, élu à vie par la caste cléricale du pays. Cheikh Hassan Nasrallah est considéré par le Hezbollah comme le représentant de Khamenei au Liban.

C'est là une différence considérable avec le cheikh Mohamed Hussein Fadlallah (Mohammad Hussein Fadlallah)qui, ayant pris ses distances à l'égard du Hezbollah, ne reconnaît pas la théorie du "Vilayat-e-faqih," (ou Velayat-e-faqih ou Wilayat al faqih en arabe)et la critique même avec force. Sans doute faut-il voir là la raison de la rupture entre le cheikh Fadlallah et le Hezbollah. (De manière significative, au cours de nos rencontres, les responsables du Hezbollah ont refusé de reconnaître le titre de " marjaa " (1) au cheikh Fadlallah. Ils ne voient en lui qu'un " alem, " un savant).

La " Choura, " ou Conseil consultatif, décide des orientations stratégiques du mouvement. Elle est élue par " l'Assemblée générale, " formée des cadres du Hezbollah. Elle agit comme un bureau politique. Ses membres désignent deux d'entre eux comme secrétaire général et adjoint pour une période de cinq ans. Néanmoins, élu pour la première fois en 1992, cheikh Hassan Nasrallah (2) s'est fait nommé à vie au bout de deux mandats.

Aujourd'hui, dans la Choura formée de sept membres, siègent :
* Cheikh Hassan Nasrallah, secrétaire général.
* Cheikh Naïm Qassem, qui exerce les fonctions de numéro deux et supervise l'action des députés élus du Hezbollah.
* Sayyed Ibrahim Al-Amine Al-Sayyed, ancien président du groupe des députés Hezbollah au parlement.
* Jawad Noureddine, directeur de la fondation des martyrs.
* Cheikh Mohammad Yazbek, qui jouit d'une relation privilégiée avec l'imam Ali Khamenei et la hiérarchie religieuse iranienne.
* Hachem Saffieddine, d'autre part président du Conseil exécutif du Hezbollah.
* Hussein Khalil, chef du Bureau politique.

A noter, les responsables du Hezbollah présentent Cheikh Nasrallah comme n'exerçant qu'une fonction de porte-parole du mouvement. Il est évident que son autorité dépasse largement une telle mission.

 

2/ Quelles sont les structures organisationnelles du Hezbollah ?

 

Les responsables du Hezbollah nous ont parlé :
- Du "Majlis Jihadique" (ou assemblée du jihad ou "Majlis aj Jihadi,") qui dirige la "résistance."
- Du " Conseil exécutif, " dirigé par Hachem Saffieddine, qui est aussi l'un des membres de la choura. Saffieddine dirige en quelque sorte le "gouvernement" du Hezbollah, lui-même divisé en plusieurs services.

Nous savons les services suivants exister au sein du Conseil exécutif :
- L'information et les relations avec la presse, dirigée par Mohammad Afif.
- Les régions.
- La culture.
- Les oeuvres sociales.
- L'éducation supervisant le réseau des écoles gérées par le Hezbollah.
- etc...

En outre, si cheikh Naïm Qassem supervise les députés du Hezbollah, Hussein Khalil a la charge des négociations avec le parti de Hariri, le mouvement Amal et le gouvernement libanais. Enfin, Nawaf Al-Moussaoui est le responsable des relations avec l'étranger. " Le ministre des Affaires étrangères " aime-t-on à dire. Quant à cheikh Mohammad Yazbek, il siège au Conseil suprême chiite, organisation religieuse regroupant tous les chiites du Liban sans distinctions politiques(3) et, à ce titre, occupe une position clé pour sensibiliser la hiérarchie chiite du pays à la cause du Hezbollah.

Comme le répètent avec insistance les responsables du mouvement, " le Hezbollah est plus petit qu'un Etat et plus grand qu'un parti. "

Parallèle à l'organisation civile, il existe une organisation militaire. Bien sûr, le Hezbollah se révèle très discret sur le sujet.

Nous avons cependant compris le Hezbollah disposant d'un noyau de permanents très bien entraînés, nous le savions avant le 12 juillet 2006. Nous pensons qu'il contrôle pour le reste une masse de réservistes en deux échelons.

Le premier échelon est constitué des permanents des différents services de l'organisation : fonctionnaires et cadres du Hezbollah. Ils effectuent des périodes obligatoires et, quand Israël occupait le sud Liban, jusqu'en 2000, participaient obligatoirement aux actions militaires. Même les plus hauts responsables devaient alors se soumettre à ces périodes.

Le deuxième échelon est formé d'un maximum de jeunes gens, sensibles aux thèses du Hezbollah ou dépendant du parti, en raison des aides sociales que leurs familles reçoivent.

 

3/ Quelle est la nature du Hezbollah ?

 

La nature du Hezbollah est particulière et ambiguë. D'une part, il est né d'une structure militaro-politique héritée de la guerre civile libanaise. Dans ce cadre, comme les autres mouvements chrétiens ou musulmans et jusqu'à la fin des affrontements (4), il aspirait à la prise du pouvoir par la force des armes.

D'autre part, avec la paix, le désarmement des autres milices et l'entrée de celles-ci dans la vie publique en tant que partis, il s'est vu lui aussi associé au jeu politique. Une confrontation, qui pour avoir ses mauvaises manières, n'en est pas moins pacifique. Aussi passait-il d'une logique de conquête du pouvoir par la force à celle de l'accession aux affaires par les idées et la séduction.

Problème cependant, force et faiblesse, avec ses armes le Hezbollah gardait sa nature guerrière. Face à Israël, certes, mais toujours dans une logique de force.

Cette situation duelle est ingérable. D'un côté le Hezbollah doit être acteur de guerre et de défi, de l'autre rassurant pour la population. Nous verrons toute sa politique relever de cette contradiction.

 

4/ Le Hezbollah est-il un mouvement terroriste ?

Il faut d'abord savoir ce que signifie le terme " terroriste. " On qualifie ainsi des actions armées ciblant des hommes ou des femmes désarmés. Les attentats qui se déroulent dans les lieux publics correspondent à cette définition. Certes, pendant la guerre civile libanaise, le Hezbollah était une organisation terroriste. Ne l'oublions cependant pas : ni plus ni moins que les autres milices, palestiniennes, sunnites ou chrétiennes. Elles aussi faisaient exploser des voitures bourrées d'explosif au milieu de la foule.

En clair, ou bien l'on attribue le qualificatif " terroriste " à tous les acteurs de la guerre civile libanaise et l'on paralyse ainsi la vie politique du pays. Ou bien, solution de sagesse, l'on prend comme point de départ la fin du conflit pour évaluer le comportement des uns et des autres.

Or, dans la tranche de temps commençant en octobre 1990, que peut on reprocher au Hezbollah en matière d'actions terroristes ? A compter de cette date, et jusqu'au départ de l'armée d'Israël du sud Liban, le 24 mai 2000 (5), le Hezbollah a conduit ses attaques essentiellement contre des militaires israéliens ou des combattants de l'ALS (6). A partir de mai 2000, il a concentré ses activités militaires contre les soldats israéliens continuant d'occuper le territoire réputé libanais du lieu-dit des " Fermes de Chebaa. "

Agissant ainsi, le Hezbollah prenait pour cibles des militaires, armés et en uniforme. De surcroît, il lançait ses opérations en toute légitimité puisque, internationalement, est reconnu le droit de combattre une occupation étrangère. On ne peut à aucun titre qualifier ces attaques du Hezbollah de terroristes.

Les Israéliens, à la fois cibles et ennemis jurés du Hezbollah, insistent néanmoins pour ranger ce mouvement dans la catégorie terroriste. A partir de la fin de la guerre civile (octobre 1990), ils lui reprochent deux attaques :
1/ Le 17 mars 1992, l'explosion d'une bombe à l'ambassade d'Israël en Argentine. On comptait 30 morts.
2/ Le 18 juin 1994, à nouveau en Argentine, un attentat perpétré contre un centre communautaire juif faisait 87 morts.

Certes, les autorités argentines accusaient d'abord le Hezbollah. Elles arrêtaient plusieurs membres de la communauté chiite vivant en Argentine mais finissaient par les relâcher faute de preuves. Quant à la Cour suprême de ce pays sud-américain, elle réfute désormais cette accusation. Aujourd'hui, on ne compte guère qu'Israël et ses partisans pour continuer de soutenir la thèse d'attentats commis par le Hezbollah.

Reste le dernier conflit, déclenché le 12 juillet 2006 à la suite de l'enlèvement de deux soldats israéliens par le Hezbollah.

Les Israéliens, pour cette opération, qualifient le parti de Dieu de mouvement terroriste. Est-ce justifié?

Notons qu'ils sont eux-mêmes coupables d'enlèvements sur le territoire libanais. Un document des Nations unies, daté du 11 février 2000, disait: " Les forces israéliennes détiennent actuellement cent-quatre-vingt-trois (183) otages libanais. Quelque 142 d'entre eux au camp de rétention de Khiam... L'âge des prisonniers va de 14 ans à 70 ans... " (7) Certes, ce camp, situé au Liban, est dorénavant fermé, mais il existe des précédents.

Cela ne justifie pas la capture des soldats israéliens, puisqu'il semble bien établi, aujourd'hui, qu'il y a eu pour ce faire violation de frontière de la part du Hezbollah. Mais il faut se contenter d'un constat de non-respect des règles internationales, puisqu'il s'agit d'un acte de guerre habituel, consistant à faire prisonniers des soldats ennemis. Donc en rien une action terroriste.

Enfin, les tirs de roquettes et de missiles, effectués par le Hezbollah contre le territoire israélien pendant le conflit des mois de juillet et août 2006, sont eux-mêmes présentés par les Israéliens comme des actions terroristes.

Là encore, on les trouve bien mal placés. D'abord, les premiers tirs sont partis le soir du 12 juillet 2006 des positions de Tsahal. Le Hezbollah a répliqué. Ensuite, côté israélien, on comptait 161 morts. 43 d'entre eux étaient des civils et 118 des soldats. Les Libanais, par contre, avaient retrouvé 1183 cadavres de civils le 23 août. Plus des deux tiers des victimes libanaises étaient des civils quand Israël déclarait avoir tué, sans donner de preuves, 500 combattants du Hezbollah. Compte tenu de la plus forte proportion de victimes civiles sur le sol libanais, on en viendrait presque à se demander qui est le terroriste, du Hezbollah ou de l'Etat hébreu.

Ceci ne fait pas du Hezbollah une organisation vertueuse au regard de nos principes. Certes, d'une part, Israël était accusé de " crimes de guerre, " dans un rapport publié le 23 août 2006 par Amnesty International, à propos de l'attaque perpétrée contre le Liban. Mais d'autre part, le 14 septembre, la même organisation reprochait au Hezbollah d'avoir commis des actes " s'apparentant à des crimes de guerre. " Toute la nuance est dans ces mots ajoutés, " s'apparentant, " pour précéder l'incrimination contre le Hezbollah, quand celle contre Israël se révèle directe. Si l'on comprend les experts d'Amnesty avoir à l'esprit une graduation des faits quand ils écrivent, ils n'en tiennent pas moins rigueur aux deux camps pour leurs agissements.

 

5/ Quels sont les objectifs politiques du Hezbollah ?

 

Dans un premier temps, il veut être reconnu comme un parti légitime, y compris par l'alliance dite " du 14 mars. " Cette dernière regroupe globalement les partisans du départ de l'armée syrienne du Liban.

Dans cet esprit, le Hezbollah a accepté de siéger dans le gouvernement de Fouad Siniora formé le 19 juillet 2005. Mohammad Fneich et Trad Hamadé détiennent les portefeuilles de l'Energie et du Travail. Quant à Faouzi Salloukh, ministre des Affaires étrangères, sans appartenir au parti, il a été opté par lui.

Dans un deuxième temps, le Hezbollah cherche à obtenir la disparition du système confessionnel dominant la politique du Liban.

Il faut savoir qu'aucun groupe n'est majoritaire au Liban, chrétiens et musulmans étant divisés en Eglises et en sectes qui cultivent chacune leur propre identité. Pour éviter la domination d'une communauté sur les autres et des conflits communautaires motivés par la volonté d'accéder au pouvoir, celui-ci a été partagé.

Au sommet de l'Etat d'abord. Le Président de la République doit sortir de la communauté maronite (les chrétiens les plus nombreux) quand le Premier ministre appartient à la communauté sunnite et le Président du Parlement à celle des chiites. Dans la hiérarchie politique et jusque dans l'administration et dans l'armée, tous les postes à responsabilité sont distribués en fonction de l'appartenance communautaire.

Le Hezbollah veut la suppression du système communautaire et, comme plusieurs de ses responsables nous l'ont dit, l'instauration d'une démocratie de type occidental. Cela permettrait, disent-ils, de sortir du carcan communautaire.

 

6/ Pourquoi le Hezbollah
veut-il la suppression
du système confessionnel au Liban ?

 

Il faut observer l'état des lieux avec honnêteté. D'une part, les chrétiens, plus que les autres composantes communautaires du Liban, tendent de plus en plus à quitter le pays pour travailler ou s'installer à l'étranger. Les difficultés économiques et l'espoir d'obtenir de meilleures situations en Europe ou aux Etats-Unis expliquent le plus souvent ces migrations.

D'autre part, même si les chiffres exacts sont difficiles à obtenir, on sait la natalité plus élevée chez les chiites que chez les chrétiens et même chez les sunnites.

Les effets de l'émigration et de la natalité se cumulant, on comprend au bout de quelques années la communauté chiite appelée à devenir la plus nombreuse et même à représenter la majorité de la population.

En d'autres termes, dans un système non communautaire et dans quelques années, le Hezbollah, s'il parvenait à recueillir l'ensemble des voix chiites, gouvernerait le pays sans partage.

Sur ce plan, il ne faut pas se laisser abuser par les sirènes du Hezbollah. D'une part, on sait le système politique iranien, son modèle, limité en terme de démocratie. Ne peuvent présenter des candidats aux élections que les partis autorisés par l'autorité et l'essence du pouvoir demeure dans les mains du Guide, aujourd'hui Ali Khamenei, mis en place par la caste religieuse et non par le suffrage universel.

En outre, supprimant le système communautaire, les autres communautés perdraient une protection légale et le confort psychologique qu'elle leur procure. Il faudrait s'attendre à de nouveaux troubles communautaires, à une nouvelle vague d'immigration et, probablement, à l'éclatement du pays en régions homogènes. Enfin, cela priverait le Liban de sa spécificité, son appartenance multiple, qui en a fait un espace de communication.

 

7/ Pourquoi le général Michel Aoun
s'est-il allié au Hezbollah ?

Rentrant au Liban le 7 mai 2005 après quinze ans d'exil, le général Michel Aoun, un chrétien maronite, se présenta d'abord en rassembleur de l'opposition face aux partisans de la Syrie, dans une large mesure la communauté chiite et ses partis politiques : Amal et le Hezbollah.

Les composantes du mouvement du " 14 Mars " regroupant les partisans du départ de l'armée syrienne (achevé depuis le 26 avril 2005) acceptèrent le général Aoun dans leurs rangs. Néanmoins, elles refusèrent de le prendre pour chef et de le promouvoir au rang de Président de la République. Entraînant son parti (le CPL) avec lui, le général Aoun se tourna alors du côté du Hezbollah pour conclure une alliance.

Les deux alliés trouvent leur profit dans l'affaire. Le Hezbollah se pare d'une apparence de tolérance, donnant à croire qu'il privilégie les bonnes relations avec les chrétiens. Cela devrait lui permettre, escompte-t-il, une meilleure reconnaissance politique.

Pour sa part, à l'élection du Président de la République par le Parlement, le général Aoun peut compter à la fois sur les voix des membres du Hezbollah et sur celles de son propre parti. Un bon moyen, pour lui, d'obtenir la Présidence de la République contre la volonté des partisans du mouvement du " 14 Mars. "

Enfin, encore pour le Hezbollah, obtenir l'élection du général Aoun à la magistrature suprême, lui assurerait une plus grande influence sur l'exécutif, grâce à un maronite passé à ses côtés.

 

8/ Le Hezbollah
est-il traité avec équité
par les puissances occidentales?

 

Nous avons vu plus haut qu'à la réponse " Le Hezbollah est-il un mouvement terroriste ? " la réponse était non.

L'Occident est partagé. Aux Etats-Unis, le Hezbollah fait partie des 42 organisations inscrites sur la liste des organisations réputées terroristes.

L'Europe, par contre, quand elle partage souvent l'opinion des Etats-Unis en la matière, a refusé jusqu'ici de qualifier le Hezbollah d'organisation terroriste. Mais, au regard des principes, l'Europe est-elle honnête jusqu'au bout ?

L'interdiction de diffusion en France de la chaîne Al-Manar, la télévision du Hezbollah, peut nous servir de référence.

Tout commence en octobre 2003. Al Manar diffuse un feuilleton nommé " La Diaspora, " (ach Chatat) qui, entre autres, met brièvement en scène le meurtre rituel d'un enfant chrétien par des juifs. Certes une évocation assez répugnante mais dont on évalue moins la portée dans un Moyen-Orient où le comportement d'Israël ne fait rien pour calmer les passions.

Le 12 du mois suivant, le CRIF (Conseil représentatifs des institutions juives de France) dépose une plainte à ce sujet auprès du CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel). La machine se met en marche.

Le 6 avril 2004, le CSA exige d'Al-Manar la signature d'une convention pour l'autoriser à continuer d'utiliser les satellites d'Eutelsat. Il n'en avait pas été question jusque là.

Le 9 juillet 2004, une nouvelle loi est votée par le Parlement dotant le CSA de nouvelles prérogatives.

Le 19 novembre 2004, Al-Manar et le CSA signe une convention comme demandée. Celle-ci met en évidence les règles et engagements auxquels la chaîne du Hezbollah doit se soumettre.

Le 24 du même mois, la délégation rentre à Beyrouth. Les gens d'Al-Manar affirment avoir immédiatement travaillé à constituer une commission de " sept membres chargés d'élaborer un code déontologique. "

Mais le 23, la veille du retour de la délégation, au journal d'Al-Manar, un invité avait parlé à l'antenne de la "transmission par Israël de maladie graves, telle l'infection du SIDA, à l'occasion de l'exportation de produits israéliens vers les pays arabes.

Le 13 décembre, sur requête du CSA, le verdict du Conseil d'Etat tombe. Il ordonne à la société Eutelsat de cesser la diffusion des émissions d'Al-Manar.

On a compris la manoeuvre. Dans un premier temps, on renforce la loi. Dans un second, on fait signer une convention à Al-Manar pour le piéger. Dans un troisième, on attend le dérapage.

Si nous avions pour usage de montrer la même rigueur à l'égard de tous, il n'y aurait rien à dire. Quelques exemples pour montrer qu'il n'en est rien.

* Fox News est une chaîne américaine, créée en 1996 par Rupert Murdoch, un sioniste confirmé et soutien inconditionnel du Président Georges W. Bush. Sa chaîne tient fréquemment un discours intolérant, raciste et agressif. En particulier à l'égard des Français, quand nous avons refusé de participer à la guerre en Irak. Pendant l'attaque israélienne contre le Liban, nous avons entendu les journalistes de Fox News faire un rapport biaisé de la situation. Ils sur-médiatisaient les dégâts essuyés côté israélien, et passaient sous silence la destruction d'agglomérations entières par Tsahal côté libanais. Fox News, nous répondra-t-on, ne relève pas de l'autorité du CSA. Mais pourquoi ne cherche-t-on pas, au nom des principes appliqués à Al-Manar, à interdire sa diffusion sur le territoire français ?

* Guysen Israël News n'a rien à voir par la taille avec Fox News, mais ce site d'information en ligne, mis à disposition sur Internet, est établi en France et publie en Français. Le 11 mars 2006, l'un de ses rédacteurs, Albert Bellaïche, publiait un article intitulé " Fabriquer des preuves, créer des indices en toute innocence, et le terrorisme mourra ! " Dans le texte, Bellaïche appelait à tricher et à mentir pour vaincre " les terroristes " parce que " trop de démocratie tue la démocratie. " Nous avons signalé ces errements contraires aux principes qui nous gouvernent. En vain. Il y a quelques semaines, nous avons néanmoins constaté la disparition de ce texte du florilège d'écrits de cet auteur dans les archives de Guysen Israël News(8).

* Enfin, il est vrai, publier une fausse nouvelle affirmant qu'Israël transmet volontairement le SIDA aux populations arabes est inacceptable. Puisque cela émanait d'un invité, chez nous, le journaliste aurait réagi. Pourtant, dans le silence, nous assistons aujourd'hui à bien pire. Depuis le 9 février 1999, cinq infirmières bulgares et un médecin palestinien sont retenus en détention en Libye, accusés " d'assassinat prémédité " en provoquant "une épidémie par injection de produits contaminés par le SIDA à 393 enfants." Les six accusés sont menacés de la peine de mort. Le 8 août 2006, le professeur Luc Montagnier a pourtant déclaré certains malades infectés avant l'arrivée des accusés dans l'hôpital.

En septembre 2003, cela n'a pas empêché les Nations unies de lever les sanctions imposées à la Libye depuis 1992. Il faut dire, les Etats-Unis le demandaient expressément pour accéder aux champs pétroliers libyens.

Al-Manar est une télévision partisane, dont les dirigeants, de plus, s'estiment en situation de conflit avec Israël. Que nous exercions des pressions pour la modérer, très bien ! Mais de là à penser faire d'Al-Manar une succursale de TF1, il y a un pas.

En attendant, sur nos écrans, avec la disparition d'Al-Manar, nous avons perdu un moyen d'information. Nous le regrettons, parce la liberté de s'informer réside dans la diversité des moyens d'information. Même si nous ne sommes pas d'accord avec l'un d'eux.


NOTES

(1) Selon l'école chiite majoritaire, un "marjaa at-taqlid" est une autorité religieuse d'un tel degré de compétence qu'elle peut émettre des fatouas, ou interprétations des textes religieux, sans précédents juridico-religieux dans l'histoire de l'islam. En d'autres termes, s'il le veut et pense cela en harmonie avec sa croyance, un marjaa jouit chez les chiites du pouvoir d'adapter les principes religieux et le droit aux réalités du temps. Chez les sunnites, la notion de marjaa n'existe pas et une telle latitude d'action s'est perdue au XIème siècle de notre ère.

(2) Cheikh Soubhi Toufeily a été évincé de la direction de la " Choura " en septembre 1990. Cheikh Abbas Moussaoui l'a remplacé mais est mort, tué par un raid d'hélicoptères israéliens, le 16 février 1992.

(3) Le Conseil suprême chiite du Liban est dirigé par le cheikh Adbdelamir Kabalan, successeur à ce poste du Cheikh Chamseddine.

(4) On peut retenir le 13 octobre 1990, date d'attaque par les forces syriennes du réduit tenu par le général Michel Aoun, comme date de la fin de la guerre civile.

(5) Le repli des Israéliens derrière la frontière n'a cependant pas été total car ils ont continué d'occuper le lieu-dit les " Fermes de Chebaa. "

(6) L'ALS est " l'Armée du sud Liban, " formée massivement de chrétiens, mais aussi de nombreux chiites recrutés sur place par Israël pour constituer une " marche " de protection du territoire hébreu. Parmi les chrétiens combattant dans l'ALS, beaucoup ne voyaient dans leur engagement que la continuation de leur combat dans un Liban divisé entre chrétiens et musulmans. En mai 2000, les Israéliens les ont trahi, leur laissant le choix entre rester sans armes, et risquer la mort assassinés par les hommes du Hezbollah, ou partir en Israël pour un exil à vie.

(7) Ce document a été produit par le " Conseil économique et social " des Nations unies et la commission des Droits de l'Homme lors de sa 56ème session.

(8) Le Centre de Recherches sur le Terrorisme a conservé la mémoire de ce document.

 

Alain Chevalérias
consultant au:
Centre de Recherches sur le terrorisme
depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com
 
 
 
 
Logo du Hezbollah
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Nasrallah embrassant la robe de Khamenei en signe d'allégeance
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Nasrallah et Khamenei sous le regard de Khomeiny
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Le cheikh Mohamed Hussein Fadlallah. Voir l'interview
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Cheikh Sobhi Toufeyli.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Cheikh Naïm Qassem
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Jeunes du Hezbollah au cours d'un défilé militaire.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Complément
d'information

Poursuites judiciaires de l'Argentine contre le Hezbollah

 

Le 25 octobre 2006, douze ans après les faits, la Justice argentine a officiellement accusé l'Iran et le Hezbollah d'un attentat perpétré contre une association juive de Buenos Aires en 1994. On avait compté 87 morts et 300 blessés.

En 2003, déjà, Hadi Soleimanpour, ancien ambassadeur d'Iran à Buenos-Aires, avait été arrêté à Londres à la demande de l'Argentine. La Justice britannique l'avait remis en liberté faute de "preuves suffisantes."

En novembre 2005, l'autorité argentine avait alors accusé un Libanais chiite d'être l'auteur de l'attentat, mais elle avait dû elle aussi le relâcher faute de preuves.

Si des preuves sérieuses étaient apportées cette fois, l'affaire prendrait une importance considérable car elle ferait passer le Hezbollah au statut d'organisation terroriste.

Il convient néanmoins de rester prudents. Ce dossier a été instrumentalisé à plusieurs reprises par les États-Unis et Israël afin d'obtenir de l'Europe l'inscription du Hezbollah sur la liste des organisations terroristes.

Même si l'on ne saurait, en la matière, accorder au Hezbollah le Bon Dieu sans confession, les expériences récentes nous ont néanmoins appris à nourrir la plus grande méfiance en matière d'accusations portées par Israël et les États-Unis.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
L'attaque d'Israël du 12 juillet 2006 contre le Liban.
Voir le rapport de Human Rights Watch
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Nasrallah et Aoun, une alliance politique.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Fox News de Rupert Murdoch
Voir: Fox News embauche un membre des Moujahidine comme spécialiste de l'Iran
 

 

Lire aussi:
-Explications sur la crise du pouvoir au Liban
-Réflexions à propos d'une étude sur le Hezbollah faite par Alain Chevalérias
-Interview de Ali Al Amine, mufti Jaafarite de Tyr et du Jabal Amel au Liban
-Terrorisme et gaullisme
-Définition du terrorisme: "Les terroristes c'est les autres!"
 
Retour Menu
Retour Page d'Accueil