EN AFGHANISTAN |
novembre 2008
Sous le titre « Subversion iranienne en Afghanistan », nous avons publié un article en mars 2008 sur la pénétration de lIran dans ce pays. Au cours des derniers mois, le phénomène sest amplifié et lon peut parler dune opération consciencieuse de minage sous les pas de nos soldats. Début juillet, des affrontements éclataient dans la région de Maidan Wardak (1) entre Hazaras, de religion chiite, et nomades kouchis, sunnites dethnie pachtoune. Quatre Hazaras étaient tués. Les premiers avaient refusé aux seconds laccès aux pâturages pour leurs bêtes. Le 9 juillet, Haji Mohammad Mohaqeq, membre hazara du Parlement, donnait une conférence de presse à Kaboul et menaçait les Kouchis dune guerre tribale sans précédent. A première vue, on pourrait prendre cette affaire pour une banale dispute entre groupes ethniques, si lIran des ayatollahs ny était mêlé. En effet, début juin, avons-nous appris, une délégation de 29 personnalités afghanes de second plan a séjourné en Iran à linvitation des autorités de Téhéran. Haji Mohammad Mohaqeq en faisait partie. Au cours des réunions, les Iraniens ont promis daider « les musulmans et les moujahidine dAfghanistan ». Tenant un discours très anti-occidental, ils sont allés jusquà demander à leurs invités de soutenir les Taliban. Des têtes-à-têtes ont aussi pris place entre chacun des invités et les officiels iraniens. De retour à Kaboul, Mohaqeq
na pas tardé à se manifester. Sur sa chaîne
de télévision, Farda TV, il a appelé
les Hazaras à se montrer fiers et à revendiquer
« leurs droits ». Comme par hasard, les affrontements
avec les Kouchis prenaient place sur ces entrefaites.
Environ 4000 armes légères étaient
même distribuées dans les quartiers chiites de Kaboul
et Mohaqeq invitait chaque famille à inscrire lun
de ses membres dans une milice de la communauté. Comme
toujours en Afghanistan, une distribution dargent a permis
de calmer les esprits mais sans que lÉtat et les
forces doccupation ne remontent à la cause du mal. Un ancien responsable politique afghan, de lethnie pachtoune, a été recruté par Téhéran (2) pour constituer un réseau de mollahs sunnites (3). En échange dun salaire mensuel de 1000$ et dun téléphone satellite, ces mollahs prêtent allégeance aux Iraniens et transmettent leurs mots dordre. Nous avons récupéré et traduit du persan en français plusieurs des documents de propagande distribués par les agents iraniens à lintention des Afghans. Ils mettent en évidence la volonté de déstabilisation du pays par Téhéran. Dans lun deux, rédigé à loccasion de la « Journée de Jérusalem » (4) (Yaoum al Qods), on lit : « Connaissant le b,a, ba du jihad et de la résistance, une nation comme la nôtre a le devoir de raviver lesprit du jihad ». Plus loin : « Votre jihad fera trembler les fondations dinjustice et diniquité en même temps que léchine des tyrans ». Un autre texte affirme : « La souffrance de la Palestine est telle entre les griffes sionistes que tout homme ne peut en déduire que lholocauste des juifs par les Allemands nest quun mensonge ». Enfin en guise de conclusion, on lit : « Cest le monde chrétien et sioniste qui fait couler le sang des musulmans de Jérusalem à lAfghanistan ». On sétonne que de tels documents puissent être distribués par un pays voisin, quand les États-Unis apparaissent comme la principale force doccupation en Afghanistan. Un petit livre dune trentaine de pages, « Comment le Hezbollah a vaincu Israël », a particulièrement retenu notre attention. Il sagit de la traduction en persan, elle aussi distribuée par les agents de lIran, dun essai en anglais rédigé par Alastair Crooke et Mark Perry en 2006. Le premier a été conseiller de Javier Solana (5) et le second a exercé la même fonction auprès de Yasser Arafat. Le texte est une apologie du Hezbollah et une critique, dans des termes souvent excessifs, de leurs adversaires à propos de la guerre menée au Sud Liban par Israël en juillet 2006. Pratiquant la distorsion des faits,
les deux analystes concluent à « lémergence
dun nouveau leadership dans la région »
du Moyen-Orient. Ils voient ce leadership aux mains de
lIran, de la Syrie et du Hezbollah.
Sans doute sans sen rendre compte, les auteurs présentent
comme un fait acquis le plan des Iraniens, qui voudraient soulever
sous leur autorité les masses sunnites contre leurs dirigeants
et contre les forces occidentales imprudemment envoyées
dans la région (6). Or, et cest là le véritable danger de loffensive iranienne en Afghanistan : après sept ans doccupation maladroite, la haine contre lOccident se propageant à travers la population, ce pays se prête mieux quun autre au travail de sape de Téhéran. La passivité des Occidentaux face à ce danger, voire leur ignorance de ce qui se trame derrière eux, nous apparaissent alarmantes. (1) Province située à une
centaine de kilomètres à louest de Kaboul. |
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